-Maître, je suis veuve, j’habite depuis de dizaines d’années un appartement d’un immeuble appartenant à Monsieur X qui avait en son temps autorisé mon défunt époux à y loger avec sa famille. Le temps pour lui de trouver les moyens nécessaires pour se trouver un toit à lui. Mais aujourd’hui, les enfants du propriétaire de l’immeuble exigent que je m’en aille.
-Que dit Monsieur X ?
-Il est décédé longtemps même avant mon époux. Et nous y avons toujours habité sans aucun problème jusqu’à ce que dernièrement ses enfants ne cessent de me harceler.
Voilà une Dame qui durant de nombreuses années habitent un appartement gracieusement offert à son époux par solidarité, mais qui n’a jamais songé à le libérer parce que pour elle la condition résolutoire qui est celle de trouver un logement personnel ne s’est pas encore réalisée.
Elle se prévaut donc du droit d’habitation. De quoi s’agit-il exactement ? Comment se constitue-t-il ? Et comment prend-il fin ?
Aux termes de l’article 632 du Code Civil, celui qui a un droit d’habitation dans une maison peut y demeurer avec sa famille quand bien même il n’aurait pas été marié à l’époque où ce droit lui a été donné.
Le droit d’habitation est conféré à une personne pour lui permettre d’y loger avec sa famille dans un immeuble bâti. Il se restreint donc à ce qui est nécessaire pour l’habitation de celui à qui se droit est concédé et de sa famille
Le droit d’habitation ne peut ni être cédé, ni être loué.
Le droit d’habitation est un droit réel. Et comme tel, il fait l’objet d’une publicité foncière. Il est viager, personnel, insaisissable et incessible.
L’analyse de chaque caractéristique du droit réel vous permettra de mieux comprendre le droit d’habitation.
Je vous l’ai dit, le droit d’habitation est :
- Il est un droit réel, c’est-à-dire qu’il porte sur quelque chose, sur un bien : l’immeuble bâti.
- Il est viager c’est-à-dire que le bénéficiaire de ce droit en a la jouissance sa vie durant. Donc, à la fin de sa vie, ce droit prend fin et il ne passe pas à ses héritiers.
- Il est personnel c’est-à-dire qu’il n’y a pas d’intermédiaire entre la chose et la personne bénéficiaire de ce droit. Le pouvoir sur la chose est donc direct et immédiat. Le droit personnel a ceci de particulier qu’il a un effet relatif c’est-à-dire qu’il n’est opposable qu’au débiteur et n’intéresse pas les tiers.
- Il est insaisissable, c’est-à-dire que l’on ne peut pas le saisir. C’est la protection du droit de la résidence principale.
- Il est incessible, c’est-à-dire que le bénéficiaire de ce droit ne peut donner le logement en location. Il ne peut le vendre ou donner ce droit à une tierce personne, ni même le transmettre dans sa succession.
Le droit d’habitation s’éteint :
- De lui-même par l’arrivée du terme si les parties en avaient convenu ;
- La volonté des parties ;
- La réalisation de la condition résolutoire (le bénéficiaire de ce droit a enfin trouvé un logis pour lui et sa famille) ;
- Ou avec la mort du bénéficiaire de ce droit.
Pour revenir au cas de l’espèce, le droit d’habitation dont se prévaut la Dame est :
Ø - Éteint depuis le décès de son mari
Ø - Et quand bien même l’on viendrait à supposer que les enfants de Mr X lui auraient octroyé ce droit, ils ne veulent plus de sa présence dans les lieux et partant, elle devrait s’y plier au risque de se voir expulser.
Donc, que tous ceux qui habitent une maison sur autorisation de son propriétaire se préparent à libérer les lieux un jour ou l’autre de leur propre fait ou à la demande de celui qui leur a donné ce droit sous peine de se voir malmené.
Le logis vous a été donné en solidarité, par charité. Vous n’en êtes donc pas le propriétaire.
En bon entendeur, saaaaaalutttt !