Le concubinage : peut on l'organiser pour protéger sa famille ou son concubin ?

Publié le 22/02/2014 Vu 1 640 fois 0
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Le concubinage : peut on l'organiser pour protéger sa famille ou son concubin ?

Le concubinage : peut on l'organiser pour protéger sa famille ou son concubin ?

Le concubinage : peut on l'organiser pour protéger sa famille ou son concubin ?
I- Le régime du concubinage
 
A- Données sociologiques et définition
1- Données sociologiques :
Aujourd'hui, l'union libre est vécue par beaucoup comme une phase indispensable à la construction du couple. Les adeptes du mariage passent, en effet, de plus en plus tardivement à la mairie, d'après des études statistiques.
On estime aujourd'hui à 5 millions, soit un couple sur cinq, le nombre de personnes vivant en concubinage. Il concerne toutes les tranches d'âge et toutes les classes sociales.
On constate une certaine normalisation de l'union libre, qui passe surtout par les enfants, qui ont désormais le même statut : on ne distingue plus les enfants légitimes, des enfants naturels ou adultérins.
Le droit a donc suivi les nouveaux comportements, même si à l'origine c'était loin d'être le cas, puisqu'aucune définition légale ne lui avait été donnée lors de l'élaboration du Code Civil.

2- Définition légale :
En effet, Napoléon, le père du Code Civil les considéraient de façon très lapidaire : "Les concubins ignorent la loi, la loi ignore les concubins !" disait'il. La définition s'opérait donc par l'absence de statut.
Ce n'est qu'en 1999 (dans la Loi sur le PaCS) que le Code Civil donne une définition.
« Une union de fait, caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité, entre deux personnes, de sexe différent ou de même sexe, qui vivent en couple ».
Le terme de "vie commune" sous-entend que le couple partage le même logement. La "stabilité" et la "continuité" supposent une certaine ancienneté.
Quant à la référence au mot "couple", elle exclut la possibilité pour deux membres d'une même famille, de se revendiquer comme concubins.
Le concubinage est une union de pur fait. Cela implique que son existence n'est subordonnée à aucun formalisme : pas de cérémonie, pas de déclaration, pas d'obligation, si ce n'est celle de vivre ensemble. Et la rupture : libre, et sans forme.

B- Les effets du concubinage :
Mais alors, quels peuvent être les effets du concubinage ?
1- Absence de statut
Un principe domine : celui de la séparation stricte des biens.
Les règles juridiques qui s'appliquent ont le mérite de la simplicité. Les biens détenus par l'un des concubins restent son entière et unique propriété.
L'argent gagné par l'un n'appartient qu'à lui, ainsi que toute donation ou succession. Et tout bien acquis appartient à celui qui l'a payé. Si la facture est établie au nom des deux, le bien sera présumé appartenir aux deux à parts égales.
L'épargne reste personnelle.
Chacun gère ses liquidités et ses investissements sur des placements mis à son seul nom.
Les dettes demeurent privées.
Contrairement aux époux auxquels l'article 220 du Code Civil impose la solidarité pour les dettes ménagères, chacun des concubins est responsable des dettes qu'il a lui-même contractées, même quand elles ont financé les dépenses du ménage. Quand bien même un concubin profite de l'argent d'un prêt, il ne peut être condamné à le rembourser s'il n'en est pas signataire.
En l'absence d'un statut légal, les effets du concubinage entre les concubins sont très limités,

2- Des effets parcellaires entre les concubins
Parce que les concubins sont juridiquement des étrangers l'un pour l'autre. A la différence du mariage ou du PaCS, il n'entraine en principe aucune conséquence personnelle ou patrimoniale.
Il n'y a ni devoir ni obligation légale, si bien que si l'on veut protéger son patrimoine des aléas personnels et familiaux, le concubinage est sans doute la solution la plus radicale.
L'union libre ne produit que des effets parcellaires, qui vont se limiter à la protection sociale et en matière fiscale, s'il y a des enfants.
Le principal effet du concubinage concerne donc la protection sociale :
Un concubin peut bénéficier des prestations de la sécurité sociale, en qualité d'ayant droit.
A la condition d'être à la charge effective, totale et permanente, de l'assuré social, le concubin bénéficie notamment de l'assurance maladie maternité.
Mais il n'ouvre pas droit à la pension de réversion en cas de décès du concubin.
En ce qui concerne les allocations familiales, seule compte la notion de foyer. Toute personne qui a la charge d'au moins un enfant peut prétendre aux prestations familiales.
Mais attention, le concubinage peut aussi entrainer la perte de certains droits : certaines prestations sociales se perdent en cas de concubinage telle l'allocation de soutien familial ; et certaines prestations peuvent être diminuées comme le RSA, qui n'est plus versé individuellement, mais au couple.
Et en matière fiscale, les concubins sont imposés séparément, ils forment chacun un foyer fiscal.
La déclaration des revenus est personnelle.
Chacun souscrit sa propre déclaration. En aucun cas il n'est possible de déclarer à sa charge son concubin, même si celui-ci ne dispose d'aucune ressource.
Une seule exception, mais de taille, concerne l'Impôt de Solidarité sur la Fortune : les concubins doivent faire une déclaration commune, ce qui a pour effet, en réunissant les deux patrimoines de franchir plus facilement le seuil d'imposition.
Et en présence d'enfants ?
Il faut distinguer deux situations selon que le ou les enfants sont communs ou non aux deux concubins.
S'ils sont issus d'une précédente union
Seul leur parent peut les déclarer à sa charge.
S'ils sont communs au couple
Un enfant peut être compté à la charge de sa mère ou de son père, mais pas des deux !
En présence de plusieurs enfants, les parts fiscales peuvent être « attribuées » à un seul parent ou être réparties entre les deux. Mais il faut faire un calcul savant pour savoir ce qui est le plus avantageux.
Autre précision : Le fisc admet que le parent qui ne déclare pas les enfants à sa charge, déduise de son revenu une pension alimentaire. Son montant doit être raisonnable, proportionné aux revenus de chacun et aux besoins des enfants, et effectivement versée au parent qui les déclarent.
En contrepartie, ce dernier devra ajouter cette pension à ses revenus déclarés.
En réalité, en matière fiscale, ce n'est pas le concubinage qui a un effet, mais la présence d'enfant.

***

Comme on vient de le voir, dans le vide statutaire qui le caractérise, le concubinage peut donc être la solution la plus radicale pour protéger son patrimoine des aléas personnels ou familiaux.
Mais à l'inverse, peut on l'organiser pour protéger son concubin ?

II- Les moyens de protection

S'ils souhaitent se protéger, les concubins doivent s'organiser.
Les relations des concubins n'étant pas réglées par un statut légal, elles peuvent être réglées par contrat. Le contrat a donc une place importante, et il peut permettre en insérant les bonnes clauses, de protéger le concubin.

A- L'organisation de la vie courante
La vie courante peut être organisée, par contrat.

1- La convention de concubinage
Chaque couple non marié ou non PACSé peut rédiger une convention de concubinage.
Elle peut prévoir, notamment les conditions dans lesquelles serait versée une contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants.
Elle peut aussi dresser un inventaire précis des possessions de l'un et de l'autre, et prévoir leurs rapports financiers (qui paie quoi).
Pour faciliter la vie courante, les concubins peuvent aussi avoir un compte joint.

2- Le compte joint, avantages et inconvénients
Pour régler les dépenses communes. Il permet de bénéficier d'un chéquier qui peut être utilisé indifféremment par l'un ou l'autre (la seule condition c'est qu'il soit libellé au nom de Mademoiselle Y OU Monsieur X).
Les fonds déposés sur le compte sont réputés appartenir à parts égales aux deux titulaires. Les biens achetés via ce compte seront présumés être des biens communs, mais la preuve contraire est toujours possible, notamment si le compte n'est approvisionné que par un seul.
La contrepartie c'est qu'aux yeux de la banque, tous les deux sont responsables. Concrètement, l'un des concubins peut être amené à régler un découvert même s'il n'est pas à l'origine des dépenses qui ont fait basculer le compte dans le rouge.
Pire encore, il peut être interdit bancaire en raison d'un chèque sans provision émis par l'autre.
L'organisation de la vie courante concerne également le lieu où résident les concubins. Se pose alors la question : Comment assurer la protection du logement ?

B- La protection du logement

L'absence de statut dans le concubinage ne permet pas de garantir des droits sur le logement, s'ils ne sont pas prévus par un contrat.
Si les concubins vivent dans une location. A la différence du mariage qui présume une co-titularité du bail, seul le concubin qui a signé le bail a un droit sur le logement.
Il est donc préférable que les deux concubins soient titulaires du bail.
Ils seront ainsi solidaires du paiement du loyer, mais leurs droits respectifs sur le logement seront garantis.
Si les concubins achètent un bien immobilier, il faut trouver trouver la forme juridique qui convient le mieux à leur situation.
Le régime juridique de l'achat doit être mûrement réfléchi, parce que l'acte peut prévoir les clauses nécessaires à la protection du concubin, notamment en cas de décès, pour éviter que des enfants d'un premier lit ne puissent le priver du logement partagé pendant la vie commune.

1- L'indivision
L'indivision est sûrement le régime le plus courant. Cela consiste à acheter ensemble en apposant les deux noms sur l'acte notarié : chacun des concubins devient propriétaire d'une quote-part variable de l'immeuble.
Exemple de clause protectrice : la clause de rachat prioritaire : le concubin survivant peut ainsi racheter la part de l'autre à son décès, sans que les héritiers puissent s'y opposer.

2- La SCI, pour les patrimoines importants
Quand ils ont un patrimoine important, les concubins peuvent créer une société civile immobilière (SCI). C'est la société qui est propriétaire, les concubins possèdent des parts.
Si le couple envisage, au fil du temps, de faire évoluer le patrimoine et son partage entre eux, cela peut se faire simplement par la donation ou l'achat de parts.
Là encore, il est possible d'aménager les statuts de la SCI pour prévoir des clauses protectrices, dans sa gestion ou dans la transmission des parts.

3- L'achat croisé
Il est aussi possible de procéder à un achat croisé. Ainsi chaque concubin bénéficie d'une part en propriété et de l'usufruit de l'autre part.
Le meilleur exemple concerne l'hypothèse ou les concubins achètent deux appartements dans le même immeuble, pour les réunir. Chacun est propriétaire d'un appartement et bénéficie d'un droit de jouissance sur l'autre.

4- La tontine, une solution pour des cas particuliers
Dans certains cas, mais c'est plutôt anecdotique, on peut aussi prévoir une clause de tontine (ou clause d'accroissement) dans l'acte d'achat. Elle a pour effet de rendre le dernier vivant unique propriétaire du bien, au décès de l'autre. L'opération fonctionne comme si le survivant avait toujours été le seul propriétaire du bien. Cela peut donc paraître très séduisant.
Mais l'opération est très contraignante et soumise à des conditions strictes ; et en cas de séparation, il peut être très difficile de parvenir à un partage ; la fiscalité n'est pas forcément avantageuse non plus.

C- La transmission du patrimoine
Enfin, la transmission du patrimoine entre concubins est possible, sous différentes formes :
La vente est toujours possible entre les concubins, alors que c'est interdit entre les époux.
Les concubins peuvent aussi se faire des donations.
Et pour léguer son patrimoine à son concubin, il est nécessaire de faire un testament, parce que les concubins ne sont pas héritier l'un de l'autre.
Mais attention : les donations et les transmission par testament sont imposés au taux maximal de 60 % !
Et s'il y a des enfants, il faut respecter leurs droits.
En réalité, s'ils disposent d'un capital, les concubins auront plutôt intérêt à souscrire une assurance vie, chacun désignant l'autre comme bénéficiaire. Au décès, les sommes sont transmises en exonération de droits de succession (jusqu'à 152 500 € pour les versements effectués avant les 70 ans de l'assuré). Cela peut donc être une solution intéressante.

En conclusion, passé un certain âge, si la volonté du couple est de se protéger efficacement et en exonération d'impôts, le mariage devra être envisagé, parce que c'est finalement lui qui assure la meilleure protection du conjoint.

 

Véronique LEVRARD
Avocate
10 avenue Pasteur
49100 ANGERS
Tel : 02.41.87.16.13

e-mail : veronique.levrard@wanadoo.fr

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