Le ministère de l'intérieur a annoncé le 22 août la généralisation du "téléphone grand danger"(TGD) dans le cadre interministériel de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes : ce téléphone d'alerte, géolocalisé, garantira aux femmes victimes une intervention rapide des forces de l'ordre et vise à permettre la prévention de la commission de nouveaux faits de violence.
La CEDH avait eu à se prononcer sur le procédé de géolocalisation en 2010 dans son arrêt ' Uzun c/ Allemagne' : l'utilisation du procédé était soumis à des conditions de validité, lesquelles devaient justifier la nécessité et la proportionnalité posés par l’article 8,§2 de la Convention permettant l'ingérence des pouvoirs publics dans la sacro-sainte sphère de la vie privée.
Le juge français avait tiré les conséquences de cette jurisprudence sur le plan interne, notamment à travers deux arrêts de la chambre criminelle de la Cour de cassation en date du 22 octobre 2013, en estimant que « la technique de « géolocalisation » constituait une ingérence dans la vie privée dont la gravité nécessitait qu’elle soit exécutée sous le contrôle d’un juge ».
I. Faisant suite à cette censure prononcée par la juridiction suprême, la loi du 28 mars 2014 etait intervenue pour clarifier la situation :
- création des articles 230-2 à 230-44 du Code de procédure pénale, envisageant deux modes opératoires : la filature d'une personne à travers son téléphone portable, et celui de la pose d'une puce sur son véhicule.
- la géolocalisation n’est désormais possible qu’en cas d’investigations concernant un crime ou un délit puni d’au moins trois ans d’emprisonnement.
- au cours de l'enquête, elle doit être autorisée par une décision écrite du procureur de la République, pour une durée initiale de 15 jours, qui pourra être prolongée, par le juge des libertés et de la détention, pour une durée d’un mois renouvelable.
- au cours de l’instruction, elle doit être autorisée par une décision écrite du juge d’instruction, pour une durée de 4 mois renouvelable.
- seul le juge des libertés ou de la détention ou le juge d’instruction pourra, sous réserve que l’infraction soit passible d’une peine d’au moins 5 ans d’emprisonnement, autoriser l’introduction dans un domicile pour la pose d’un dispositif de géolocalisation.
- cependant, en cas d’urgence (notamment de risque d’atteinte grave aux personnes ou aux biens) un officier de police judiciaire peut décider d’une géolocalisation, sous réserve d’une autorisation a posteriori du procureur de la République.
II. Le plan interministériel de prévention des violences à l'égard des femmes permet de remettre le procédé de géolocalisation au premier plan avec l'utilisation du "téléphone grand danger"(TGD) permettant la géolocalisation en cas de danger et l’intervention de la police :
- ce dispositif peut être proposé à la victime pendant une durée renouvelable de six mois.
- la victime doit y consentir expressément, avoir cesser de cohabiter avec son actuel ou ex-conjoint, concubin ou partenaire.
- le conjoint, ex-conjoint, concubin ou partenaire doit avoir fait l’objet d’une interdiction judiciaire d’entrer en contact avec elle dans le cadre d’une ordonnance de protection, d’une alternative aux poursuites, d’une composition pénale, d’un contrôle judiciaire, d’une assignation à résidence sous surveillance électronique, d’une condamnation, d’un aménagement de peine ou d’une mesure de sûreté.