Le 02 Octobre 2014, les juges de Strasbourg étaient amenés à se prononcer sur la conformité des mesures de gardes à vue d'une durée de quarante-huit heures, exercées à l'égard de cinq requérants interpellés par les forces de l'ordre à la suite d''une occupation illégale du tarmac de l'aéroport de Nouméa.
Dans le complément d'information demandé par la Cour aux fins de dresser un état des cellules de garde à vue, il ressortait que les cellules étaient respectivement d'une superficie de 140cm sur 150cm, et de 245cm sur 150cm. Ces cellules disposaient d'un couchage en béton, sans matelas, et étaient perforées par un conduit qui servait de moyen d'aération ; aucun éclairage (ni électrique, ni naturel) n'y était présent, sinon la seule lumière qui filtrait à travers une porte vitrée ; ces cellules disposaient de toilettes "à la turque", de murs d'une peinture défraîchie, décorés de nombreux tags et grafitis.
Dans les circonstancces de l'espèce, les juges de Strasbourg relevaient que "les requérants avaient été retenus dans des cellules individuelles d’un peu plus de 2 m2, et les autres dans des cellules collectives d’un peu plus de 11 m2 avec huit à neuf gardés à vue, disposant chacun de moins de 1 m2 d’espace personnel. Il en ressort que les requérants disposaient d’un espace largement inférieur au standard minimum souhaitable préconisé par le CPT[Comité de Prévention de la Torture] dans ses normes et ses rapports nationaux. La Cour note de surcroît que, s’agissant des requérants gardés à vue dans les cellules collectives, ils ne disposaient pas de toilettes isolées(...). Il ressort enfin du dossier que les cellules ne disposaient pas, ou de manière insuffisante, d’un système d’aération et qu’elles étaient privées de lumière naturelle".
Enfin, les juges estimaient qu'au regard de "la taille des cellules dans lesquelles les requérants ont été placés en garde à vue (d'une superficie de...) plus de 2 m2 pour les cellules individuelles à moins de 1 m2 par détenu pour les cellules collectives, n’étaient pas adaptée pour une période de détention de quarante-huit heures. Elle se réfère à cet égard aux recommandations du CPT selon lesquelles ce genre de cellule ne devrait pas être utilisé pour des périodes de détention excédant quelques heures - ce qui exclut d’y passer une nuit - et devrait être aménagé de manière à éviter le plus possible la sensation d’oppression et d’enfermement. Elle note d’ailleurs que les cellules ne bénéficiaient pas d’un éclairage adéquat, et que l’aération était quasi inexistante, ce qui n’a pu que générer une atmosphère encore plus étouffante, rendant la détention des requérants, nonobstant sa durée, contraire à la dignité humaine".
la Cour estime que les conditions de détention en cause ont causé aux intéressés des souffrances aussi bien physiques que mentales ainsi qu’un sentiment de profonde atteinte à leur dignité humaine, et qu’elles doivent s’analyser en un traitement inhumain et dégradant infligé en violation de l’article 3 de la Convention.
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