Cas pratique : l'événement survenu dans le Thalys

Publié le 30/09/2015 Vu 4 465 fois 0
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Cas pratique de droit et procédure pénal librement inspiré des faits survenus lors de l'attaque à bord du Thalys

Cas pratique de droit et procédure pénal librement inspiré des faits survenus lors de l'attaque à bord du

Cas pratique : l'événement survenu dans le Thalys

Les termes du cas pratique, bien qu’inspirés de faits réels, ne sauraient en aucun cas présumer de la culpabilité des différents protagonistes au regard du principe selon lequel « tout homme est présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable »

(Article 9 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789)

Monsieur Dupont, ressortissant néerlandais, comptait se rendre en vacances à Paris. Dans le train reliant à Amsterdam à Paris, monsieur Dupont surprend un individu en possession d’une arme semi-automatique: pris de panique, monsieur Dupont se jette sur l’assaillant, lequel trouve cependant le temps de tirer avec son arme et blesse un passager grièvement. Surpris par le coup de feu, certains autres passagers viennent en aide à monsieur Dupont afin de neutraliser l’agresseur, jusqu’à plonger ce dernier dans un état inconscient, avant de le remettre à la police. Celui-ci sera par la suite placé en garde à vue. Après enquête, il s’avère que cet individu, ressortissant français, a effectué différents déplacements en Syrie et a tenu des propos menaçant à l’encontre de la France, tandis qu’il se serait procuré les armes en Belgique.

1/ L’événement étant survenu sur la ligne Amsterdam-Paris, quelle est la loi applicable relativement aux faits commis ?

2/ Monsieur Dupont risque-t-il quelque chose à raison de son intervention, laquelle a entraîné certains traumatismes à l’encontre de l’agresseur ? Les autres intervenants, ayant roué de coups l’agresseur jusqu’à ce que ce qu’il soit dans un état inconscient, risquent-ils quelque chose pénalement ?

3/ Quel type d’enquête de police est menée par les autorités de police ?

4/ Quel régime est applicable à la mesure de garde à vue ?

5/ Que risque l’agresseur qui était armé et qui a été interpellé ?

1/ La loi applicable aux faits survenus.

Concernant la localisation de l’infraction, en vertu du principe de territorialité de la loi pénale, l’Article 113-2 du code pénal dispose que « la loi pénale française est applicable aux infractions commises sur le territoire de la République ». Parallèlement, il suffira seulement que l’un des faits constitutifs de l’infraction ait eu lieu sur le territoire pour que la loi pénale française s’applique.

L’infraction est constituée suite à la réunion de trois éléments, l’élément matériel (actus reus), moral (mens rea) et légal (la prescription légale) : dès lors, s’il suffit que l’un des faits constitutifs soit observé pour suffire à l’exercice de la loi pénale française, il faut déterminer si le train était en circulation dans le territoire néerlandais ou français au moment des faits. La condition nécessaire à la définition du territoire de la République (territoire terrestre, espace maritime, espace aérien) ne pose pas de difficultés en l’espèce.

Cependant, tandis que la jurisprudence retient une conception extensive des conditions posées par l’Article 113-2 du code pénal, les faits constitutifs  recouvrent les actes préparatoires à la réalisation de l’infraction : dès lors, si les autorités françaises découvrent des documents ayant vocation à préparer la commission de l’infraction, la loi pénale française sera applicable.

Si les faits ont été commis sur le territoire néerlandais, deux systèmes de compétences peuvent jouer : la compétence personnelle active et, ou passive (personnalité active ou passive de la loi pénale).

Selon le premier principe, les juridictions françaises sont compétentes pour juger les agissements délictueux commis par les Français à l’étranger. Cependant, l’Article 113-6, alinéa 2 du code pénal pose la condition que ces crimes et délits soient également réprimés par la législation du pays où ils ont été commis.

Selon le second principe, les juridictions françaises sont compétentes pour connaître de certaines infractions commises à l’encontre de victimes françaises à l’étranger (Article 133-7 du code pénal) à condition que le délit ou le crime soit effectivement puni d’emprisonnement selon la loi française.

Dès lors, le simple fait que l’assaillant soit un ressortissant de nationalité française suffit à remplir les conditions propres à faire jouer la loi pénale française en application du principe de compétence personnelle active, sans qu’il soit besoin de déterminer plus en amont si les victimes avérées ou potentielles sont de nationalité française.

2/ Que risquent M. Dupont ainsi que les autres intervenants ?

L’Article 121-1 du code pénal dispose que « nul n’est responsable que de son propre fait ». Pour autant, n’est pas pénalement responsable la personne qui « accomplit un acte prescrit ou autorisé par des dispositions législatives ou réglementaires » (Article 122-4 du code pénal), pas plus que la personne qui « devant une atteinte injustifiée envers elle-même ou autrui, accomplit, dans le même temps, un acte commandé par la nécessité de légitime défense ou d’elle-même ou d’autrui, sauf s’il y’a disproportion entre les moyens de légitime défense employés et la gravité de l’atteinte » (Article 122-5 du code pénal).

Ainsi, certains agissements, en eux-mêmes infractionnels, sont parfois dépouillés de ce caractère en raison de circonstances exceptionnelles qui effacent leur caractère délictueux : on les appelle les faits justificatifs. Ils sont au nombre de trois, et recouvrent soit l’ordre de la loi et le commandement de l’autorité légitime, soit la légitime défense, ou enfin l’état de nécessité. Dans l’espèce, il y a lieu de distinguer l’intervention de Mr. Dupont intervenant sur le seul soupçon qu’un acte criminel allait se commettre, et celle des autres intervenants après qu’un coup de feu ait été tiré. L’agression étant seulement présumée dans le premier cas, avérée dans le second.

2.1/ L’intervention de Mr. Dupont.

Selon le principe dégagé par l’Article 122-4 du code pénal, et en vertu de l’Article 73 du code de procédure pénale, le simple particulier est fondé à appréhender l’auteur d’un crime ou d’un délit flagrant sans qu’il ne lui soit reproché de recourir à une détention illégale et, ou arbitraire. L’action de Mr. Dupont puise donc son fondement dans l’Article 73 du code de procédure pénale, tandis que l’agression assimilable à un crime ou un délit allait se commettre. Dans cette logique, alors que la jurisprudence retient qu’ « il y a lieu d’assimiler à l’acte délictueux proprement dit le soupçon de sa réalisation, alors même qu’il ne serait pas vérifié par la suite, si les circonstances de la cause le rendent vraisemblable » (TGI, Marseille, 28 janvier 1982.), le simple soupçon pesant sur l’individu en possession d’une arme justifiait que Mr. Dupont appréhende ce qu’il croyait être un agresseur potentiel, « tandis que l’intervention était nécessaire et proportionnée aux conditions de l’arrestation et de la présentation au l’officier de police judiciaire » (Crim, 28 mars, 2006.)

2.2/ L’intervention des autres passagers.

Selon le principe dégagé par l’Article 122-5, la légitime défense se définit toujours comme la commission d’une infraction pénale en réponse à une atteinte injustifiée. Pour que le fait justificatif contenu dans cet article puisse jouer, il faut qu’il y ait réunion de conditions cumulatives : les  premières tenant à l’acte d’agression, les secondes à la riposte.

Seule une agression contre la personne (atteintes à la vie et à l’intégrité corporelle), ou une atteinte aux biens peut motiver la légitime défense si l’agression constitue un crime ou un délit. Quand l’agression vise une personne, cette dernière peut-être soi –même ou autrui. Par la suite, l’agression doit non seulement être actuelle et vraisemblable dans l’esprit de celui qui riposte, mais aussi injuste : dans le cas d’espèce, l’agression est actuelle et plus que vraisemblable dans l’esprit des intervenants, elle constitue une atteinte contre leur personne même, mais aussi contre la personne d’autrui au regard de la blessure par balle dont a souffert un des passagers atteint par le coup de feu ; en l’absence d’habilitation expresse permettant l’usage, sinon le port d’arme à feu, dans le respect des dispositions  l’Article L.2336-1 du Code de la sécurité intérieure, l’agression apparaît par la même occasion injuste.

Concernant la riposte amorcée par les intéressés, celle-ci doit avoir lieu dans le même temps que l’agression, mais surtout être nécessaire à la sauvegarde de l’intérêt menacé et proportionnée à la gravité de l’agression : en l’espèce, tandis que la riposte intervient juste après que le coup de feu ait été tirée, elle semble être nécessaire à la sauvegarde de la vie des passagers, et proportionnelle à la gravité des atteintes à la vie, à l’intégrité de la personne physique commise par l’agresseur.

Ainsi, l’intervention des autres passagers, bien qu’ayant commis des violences sur l’agresseur jusqu’à ce que ce dernier soit dans un état d’inconscience, entre a priori dans le champ d’application de l’Article 122-5 du code pénal.

Il résulte de ce qui précède que Mr. Dupont ainsi que les autres agresseurs, bien qu’ayant commis des actes délictueux normalement répréhensibles, peuvent invoquer des faits justificatifs propres à les exonérer de responsabilité pénale.

3/ Quel type d’enquête est menée par les autorités de police ?

La vocation de la police judiciaire est de conduire à la manifestation de la vérité, que ce soit à l’occasion d’enquêtes de flagrance ou préliminaires dans le cadre de commissions rogatoires émanant de magistrats instructeurs.

L’Article 53 du code de procédure pénale fixe le régime applicable à l’ouverture d’une enquête de flagrance, laquelle a pour vocation d’établir l’existence d’une responsabilité pénale de l’auteur « d’un crime ou délit flagrant, (…) qui se commet actuellement, ou qui vient de se commettre. [Elle peut aussi concerner] une personne poursuivie par la clameur publique, ou (..) trouvée en possession d’objets, ou présentant des traces ou indices, laissant penser qu’elle a participé au crime ou au délit ». 

En l’espèce, la volonté de l’agresseur de commettre une atteinte volontaire à la vie de Mr. Dupont, sinon à la vie des autres passagers, peut constituer une tentative de meurtre punie de trente ans de réclusion criminelle selon l’Article 221-1 du code pénal. Au stade de la remise de l’agresseur aux autorités de police, l’enquête de flagrance pour tentative de meurtre semble être le cadre d’enquête le plus adapté. D’une durée initiale de huit jours (Article 53, al.2 du code de procédure pénale), sans discontinuer, sous le contrôle du procureur de la République, celle-ci pourra être prolongée pour une durée de huit jours supplémentaires sur décision du procureur de la République (Article 53, al.3 du code de procédure pénale) dès lors qu’elle porte sur un crime puni d’une peine supérieure à cinq ans d’emprisonnement.

4/ Quel régime est applicable à la mesure de garde à vue ?

Prenant place avant toute condamnation définitive, le placement en garde à vue repose sur une présomption de culpabilité : elle constitue une mesure coercitive similaire à l’arrestation, la vérification d’identité ou la détention provisoire. A ce titre, elle doit être strictement encadrée.

Il convient de s’intéresser dès lors au placement, au régime conditionnant la durée de la mesure, ainsi qu’aux garanties reconnues au gardé à vue.

1.1/ Le placement en garde à vue :

L’Article 62-2 du code de procédure pénale dispose que « la garde à vue est une mesure de contrainte décidée par un officier de police judiciaire, sous le contrôle de l’autorité judiciaire, par laquelle une personne à l’encontre de laquelle existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elle a tenté de commettre un crime ou un délit d’une peine d’emprisonnement est maintenue à la disposition des enquêteurs ». Il ressort des termes de cet article que, pour que la garde à vue soit valable, il doit exister non seulement des indices propres à suggérer la commission, ou la tentative de commission d’un crime ou d’un délit d’une part, mais il faut parallèlement que ce crime ou délit soit aussi puni d’une peine d’emprisonnement d’autre part. Enfin, cette mesure doit être l’unique moyen :

« 1° de permettre l’exécution des investigations impliquant la présence ou la participation de la personne ;

2° de garantir la présentation de la personne devant le procureur de la République afin que ce magistrat puisse apprécier la suite à donner à l’enquête ;

3° d’empêcher que la personne ne modifie les preuves ou indices matériels ;

4° d’empêcher que la personne ne fasse pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille ou leurs proches ;

5°d’empêcher que la personne ne se concerte avec d’autres personnes susceptibles d’être ses coauteurs ou complices :

 6° de garantir la mise en œuvre des mesures destinées à faire cesser le crime ou le délit. » (Article 62-2 du code de procédure pénale.)

En l’espèce, le placement en garde à vue semble être justifié non seulement au regard des soupçons pesant sur la culpabilité de l’agresseur (mise en cause d’un tiers, déclarations de l’intéressé contredisant les constations des enquêteurs, comportement anormal de la personne sur les lieux du faits), tandis que la tentative de meurtre constitue une infraction punie de trente ans de réclusion criminelle selon l’Article 221-1 du code pénal, et qu’enfin, cette mesure de coercition permet à tout le moins d’empêcher que l’agresseur ne se concerte avec d’autres personnes susceptibles d’être ses coauteurs ou complices en l’absence de renseignement sur l’existence de complices à ce stade de l’enquête.

2/ Le régime de la mesure de garde à vue :

L’Article 63 du code de procédure pénale fixe le régime de droit commun applicable à la mesure de garde à vue : ainsi, dès le début de la mesure, « (…) l’officier de police judiciaire, de son initiative ou sur instruction du procureur de la République (…) donne connaissance à ce dernier des motifs justifiant l’application de l’Article 62-2 du code de procédure pénale, et l’avise de la qualification qu’il a notifiée à la personne (…). [Cependant], le procureur de la République peut modifier cette qualification ; dans ce cas, la nouvelle qualification est notifiée à la personne gardée à vue ». Ainsi, si le placement en garde à vue intervient initialement à raison des suspicions relatives à la tentative de meurtre en application de l’Article 221-1du code pénal, rien ne fait obstacle à ce que les faits soient par la suite qualifiés d’actes de terrorisme, en tant qu’ « atteinte à la vie (…) intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur » (Article 421-1 du code pénal.)

La précision est importante, tandis la tentative de meurtre relevant du droit commun sera susceptible de fonder la mesure de garde à vue intervenant « (…) pour une durée initiale de vingt-quatre heures »  (Article 63, II, -1 du code de procédure pénale), laquelle pourra être « (…) prolongée pour un nouveau délai de vingt-quatre heures au plus, sur autorisation écrite et motivée du procureur de la République, si l’infraction que la personne est soupçonnée d’avoir commise ou tenté de commettre est un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à un an et si la prolongation de la mesure est le seul moyen de permettre l’exécution des investigations impliquant la présence ou la participation de la personne, de garantir la mise en œuvre des mesures destinées à faire cesser le crime ou délit» (Article 63, II, -2 du code procédure pénale.)

Cependant, si les faits viennent à être qualifiés d’actes de terrorisme entrant dans le champ d’application de l’Article 706-73 du code de procédure pénale, le régime spécifique applicable à la mesure de garde à vue en matière de criminalité organisée prévu par l’Article 706-88 du code de procédure pénale pourra s’appliquer. Dès lors, la mesure de garde à vue pourra faire l’objet de deux prolongations supplémentaires, portant sa durée totale à quatre-vingt-seize heures, sous réserve de « la présentation du gardé à vue à l’expiration d’un délai de quarante-huit heures, (…) l’examen par un médecin désigné par le procureur de la République délivrant un certificat médical par lequel il se prononce sur l’aptitude au maintien en garde à vue. »(Article 706-88, -2, -4 du code de procédure pénale.).

Enfin, s’il apparaît au cours de l’enquête ou de la garde à vue elle-même qu’il existe un « risque sérieux de l’imminence d’une action terroriste en France ou à l’étranger (…), le juge de la liberté et de la détention, à titre exceptionnel, pourra par décision écrite et motivée, décider que la garde à vue (…) fera l’objet d’une prolongation supplémentaire de vingt-quatre heures, renouvelable une fois » (Article 706-88-1 du code de procédure pénale). La durée de la mesure de garde à vue peut donc, dans ces circonstances, intervenir pour une durée maximale de cent quarante-quatre heures, soit  six jours.

En l’espèce, bien que l’agresseur ait été initialement placé en garde à vue pour tentative de meurtre (Article 221-1 du code pénal) et que la mesure de garde à vue soit initialement d’une durée maximale de quarante-huit heures, la découverte de voyages effectués en Syrie par cet agresseur et la constatation de propos haineux envers la France peut fonder la requalification des faits en tant qu’atteinte volontaire à la vie en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur (Article 421-1 du code pénal), propre à justifier la prolongation de la garde à vue pour une durée supplémentaire de quarante-huit heures, portant sa durée à un maximum de quatre-seize heures, sous réserve des dispositions de l’Article 706-88-1 du code de procédure pénale.

Toutefois, il est à noter que le début de la mesure de garde à vue court dès lors que « la personne est tenue sous la contrainte à disposition des services de police et qu’elle est privée de la liberté d’aller et venir » (Crim, 6 décembre 2000.) : dès lors, la mesure de la garde à vue court à compter de la remise de l’agresseur aux autorités de police, lesquelles sont seules aptes à notifier ses droits au gardé à vue.

3/ Garanties reconnues au gardé à vue :

Dans un premier temps, la première garantie offerte au gardé à vue tient à la notification des droits dont ce dernier dispose (Article 63-1 du code de procédure pénale), la date présumée et la nature de l’infraction qui lui est reprochée, sans pour autant que lui soit reconnu le droit de « prendre connaissance de tous les éléments justifiant l’arrestation dont disposent les autorités internes » (CEDH, Georgiev c/ Bulgarie, 15 décembre 2000), les dispositions relatives à la durée de la mesure, son droit de faire aviser l’un de ses proches ou son employeur, son droit d’être examiné par un médecin, ainsi que son droit à être assisté d’un avocat. Par ailleurs, les enquêteurs sont tenus de notifier au gardé à vue son droit de garder le silence (DC, Conseil constitutionnel, 18 novembre 2011). Enfin, tous ces droits doivent être notifiés dans une langue que comprend le gardé à vue selon les dispositions de l’Article 5§2 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme (Conv.EDH), lequel justifie cas échéant que les enquêteurs recourent aux services d’un interprète.

Cependant, si le principe en droit commun est que le gardé à vue a le droit de s’entretenir de manière confidentielle avec son avocat, choisi ou commis d’office, pendant trente minutes dès le début de la garde à vue, puis à chaque prolongation éventuelle de la mesure pour de nouveau trente minutes (Article 63-4 du code de procédure pénale), en matière de criminalité organisée relevant de l’Article 706-73 du code de procédure pénale, la personne gardée à vue pourra demander à s’entretenir avec son avocat à compter de la quarante huitième heure seulement, puis à compter de la soixante douzième heure si prolongation de la mesure de garde à vue est décidée par le juge des libertés et de la détention. Plus encore, et spécifiquement en matière de terrorisme, « (…) l’intervention de l’avocat peut être différée, en considération de raisons impérieuse tenant aux circonstances particulières de l’enquête ou de l’instruction, soit pour permettre le recueil ou la conservation des preuves, soit pour prévenir une atteinte aux personnes, pour une durée maximale de soixante-douze heures » (Article 706-88, al.5 du code de procédure pénale.)

5/ Que risque l’agresseur qui était armé et qui a été interpellé ?

L’article 111-1 du code pénal dispose que les « infractions pénales sont classées, suivant leur gravité, en crimes, délits et contraventions » ; tandis que les crimes sont punis de la réclusion ou détention criminelle de dix ans au moins jusqu’à la perpétuité (Article 131-1 du code pénal), les délits sont quant à eux sanctionnés d’une peine d’emprisonnement, d’une amende, du peine de jour-amende, d’un stage de citoyenneté, du travail d’intérêt général, de peines privatives ou restrictives de droits, de peines complémentaires ou de sanctions-réparation (Article 131-3 du code pénal). Quand le délit est puni d’emprisonnement, la peine correspond à deux mois au moins jusqu’à dix ans au plus (Article 131-4 du code pénal). Enfin, les contraventions sont punies d’amende, de peines privatives et restrictives de droits, de peines de sanctions-réparations, et ne sont pas exclusives d’une ou de plusieurs peines complémentaires (Article 131-12 du code pénal). Depuis la loi du 19 juillet 1993, les peines d’emprisonnement sont donc exclues en matière contraventionnelles.

En l’espèce, plusieurs infractions sont imputables à l’agresseur interpellé : elles tiennent par ordre de gravité à la tentative de meurtre prévue à l’Article 221-1 du code pénal, lequel constitue un assassinat lorsqu’il est commis avec préméditation ou guet-apens (Article 221-3 du code pénal). Par ailleurs, l’assassinat, en tant qu’atteinte volontaire à la vie, est susceptible de constituer un acte de terrorisme, lorsqu’il intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur (Article 421-1 du code pénal). Dès lors, dans l’hypothèse où la tentative d’assassinat, en tant qu’infraction punie de la peine de réclusion à perpétuité,  est écartée dans le cas d’espèce, la tentative de meurtre prévue à l’Article 221-1 du code pénal reste envisageable : or, si la peine maximale prévue correspond normalement à trente ans de réclusion criminelle, celle-ci atteint la réclusion criminelle à perpétuité si elle entre dans le champ d’application de l’Article 421-1 du code pénal, sans qu’il ne soit besoin de prouver l’existence d’un lien entre l’acte poursuivi et une entreprise collective terroriste depuis l’entrée en vigueur de la loi du 13 novembre 2014 (article 5, loi du 13 novembre 2014.)

Enfin, si un agissement ne peut donner lieu à plusieurs déclarations de culpabilité et que le juge est tenu de retenir de préférence la qualification correspondant à l’infraction la plus sévèrement réprimée, en cas de conflit entre une qualification générale (tentative d’assassinat et tentative de meurtre) et une qualification spéciale (acte de terrorisme), la dernière doit prévaloir. Il résulte de ce qui précède que l’auteur encourt la réclusion criminelle à perpétuité à raison du régime pénal spécifiquement applicable aux actes de terrorisme, qu’il s’agisse d’ailleurs d’une tentative de meurtre (puni de trente ans de réclusion criminelle en droit commun) ou d’une tentative d’assassinat (puni de la réclusion criminelle à perpétuité en droit commun), tandis que l’Article 121-4 du code pénal prévoit que l’auteur d’une tentative est assimilé entièrement, s’agissant de la répression, à l’auteur d’une infraction consommée en présence d’un commencement d’exécution, en l’absence de désistement volontaire.

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