L'annulation d'un mariage faute d'intention matrimoniale n'est pas contraire à la liberté du mariage

Publié le Modifié le 20/10/2014 Vu 10 419 fois 0
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L'intention matrimoniale, et par conséquent le consentement au mariage, ne peuvent exister en présence d'une volonté exclusive d'acquérir le statut de conjoint survivant, appréciée souverainement par les juges qui, déduisant d'un faisceau d'indices que l'épouse n'avait pas d'intention de se soumettre à toutes obligations conjugales, ne contreviennent pas à la liberté du mariage.

L'intention matrimoniale, et par conséquent le consentement au mariage, ne peuvent exister en présence d'une

L'annulation d'un mariage faute d'intention matrimoniale n'est pas contraire à la liberté du mariage
L'intention matrimoniale, et par conséquent le consentement au mariage, ne peuvent exister en présence d'une volonté exclusive d'acquérir le statut de conjoint survivant, appréciée souverainement par les juges qui, déduisant d'un faisceau d'indices que l'épouse n'avait pas d'intention de se soumettre à toutes obligations conjugales, ne contreveniennent pas à la liberté du mariage (article 12 de la convention européenne des droits de l'Homme). 
La Cour rappelle donc que la liberté du mariage ne peut le détourner de son sens et l'ensemble des obligations qu'il implique, conformément aux positions du Conseil constitutionnel.

Sur le moyen unique : 

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 25 septembre 2008), rendu sur renvoi après cassation (1re Civ, 3 octobre 2006, Bull. n° 429), que Mme X... a épousé Philippe Y... le 12 juillet 1996 ; que celle-là a été condamnée pour coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort de celui-ci sans intention de la donner, laquelle est intervenue le 7 août 1996 ; 

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt d'annuler son mariage avec Philippe Y..., alors, selon le moyen : 

1°/ que le devoir de secours entre époux et la vocation successorale du conjoint survivant, qui emportent l'un et l'autre des effets patrimoniaux, sont inhérents à l'institution matrimoniale ; qu'en considérant que le mariage avait été contracté à des fins étrangères à l'union matrimoniale cependant qu'il ressortait de ses propres constatations que Mme X... avait au contraire épousé M. Y... dans le but de bénéficier d'un avantage inhérent au mariage, la cour d'appel a violé l'article 146 du code civil ; 

2°/ que la protection de la liberté du mariage implique que celui-ci puisse être contracté indépendamment de la finalité poursuivie par les époux, laquelle ne regarde qu'eux et n'intéresse pas la société ; qu'en considérant, pour annuler le mariage contracté par Mme X..., que cette dernière avait exclusivement cherché à appréhender le patrimoine de son époux, la cour d'appel a violé l'article 12 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; 

Mais attendu que l'arrêt relève qu'il ressort de plusieurs dépositions qu'au moment du mariage, Mme X... était animée par une intention de lucre et de cupidité, n'ayant pour but que d'appréhender le patrimoine de Philippe Y..., afin d'assurer son avenir et celui du fils qu'elle avait eu avec un tiers, et que cette dernière s'était refusée à son époux après le mariage, n'ayant consenti à une relation sexuelle que le jour du mariage, ce qui avait conduit Philippe Y..., qui éprouvait des doutes sur la sincérité de l'intention matrimoniale de son épouse, à exprimer sa volonté, dès le début du mois d'août, soit quelques jours avant de subir les coups mortels portés par Mme X..., de demander l'annulation du mariage ; qu'ayant ainsi fait ressortir que celle-ci n'avait pas eu l'intention de se soumettre à toutes les obligations nées de l'union conjugale, c'est à bon droit que la cour d'appel, après avoir retenu que Mme X... s'était mariée dans le but exclusif d'appréhender le patrimoine de Philippe Y..., en a déduit, sans méconnaître les exigences conventionnelles de la liberté du mariage, qu'il y avait lieu d'annuler celui-ci, faute de consentement ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; 

PAR CES MOTIFS : 

REJETTE le pourvoi ; 

Condamne Mme X... aux dépens ; 

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme X... à payer à Mmes Arlette et Mireille Y... et à M. Francis Z... la somme globale de 3 500 euros, et rejette sa demande ; 

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf décembre deux mille douze.


MOYEN ANNEXE au présent arrêt 

Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour Mme X... 


Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR déclaré nul le mariage contracté le 12 juillet 1996 entre M. Y... et Mme X... ; 

AUX MOTIFS QUE, selon l'article 146 du code civil, il n'y a pas de mariage sans consentement ; que le mariage est nul lorsque les époux ne se sont prêtés à la cérémonie qu'en vue d'atteindre un résultat étranger à l'union matrimoniale ; que, nonobstant le témoignage de Mme B..., qui n'est pas probant pour ne pas être écrit de la main de l'intéressée, selon lequel M. Y... aurait été amoureux de Mme X... depuis 1993, les dépositions de l'entourage des époux devant les service de police lors de l'enquête criminelle, notamment celles concordantes de M. C..., M. D..., Mme E..., Mme F..., Mme G..., situent le début des relations du couple en avril 1996, même si la première rencontre a pu avoir lieu antérieurement ; que les circonstances de la rencontre sont relatées dans la déposition de Mme H..., relation de Mme X... : que cette dernière hébergée chez une voisine de M. Y... lui a dit en parlant de la maison de ce dernier qu'elle appartenait à un vieux garçon, sans femme, sans famille, et qu'elle ferait en sorte de le connaître ; que Mme X... a ajouté que bien que M. Y... fût malade et en mauvais état physique, elle voulait se marier avec lui pour assurer son avenir et celui du fils qu'elle avait eu avec un tiers ; que les dépositions des témoins précités confirment que Mme X... était pressée de se marier, tandis que M. Y..., bien qu'amoureux d'elle, hésitait ; que M. C..., ami d'enfance de M. Y... précise que son ami se plaignait, avant le mariage, des exigences financières de sa fiancée, qui lui demandait assez souvent de l'argent, étant mannequin sans emploi, qu'elle lui avait présenté une documentation sur un véhicule 4x4 Cherokee Renault, au motif que son véhicule avait été volé, qu'elle lui avait fait acheter une bague de fiançailles à 12. 000 francs alors qu'il croyait acheter un bijou à 1. 200 francs ; qu'il ressort des dépositions de M. I..., Mme E..., Mme K..., que M. Y... se plaignait de ce que Mme X... ne voulait pas avoir de relations sexuelles avec lui avant le mariage, et de ce qu'elle se serait refusée à lui après le mariage, n'ayant eu qu'une relation sexuelle avec elle, le jour du mariage ; que, dans sa déposition, M. de L..., en relation avec M. Y..., a indiqué qu'au début du mois d'août 1996, soit quelques jours avant la mort de ce dernier, celui-ci lui a demandé de se renseigner s'il était possible d'annuler un mariage, car il voulait le faire pour le sien, son épouse refusant les relations sexuelles en prétextant que son fils était là, précisant qu'il pensait qu'elle ne s'était mariée avec lui que pour son argent ; que la volonté du défunt de mettre fin au mariage est confirmée par les dépositions de Mme E..., Mme G... et Mme F... ; que ces dépositions, précises et concordantes, émanant de personnes qui ont bien connu M. Y... et le couple qu'il formait avec Mme X..., établissent qu'au moment du mariage, celle-ci était animée par une intention de lucre et de cupidité, n'ayant pour but que d'appréhender le patrimoine de M. Y... composé de biens propres, soit un pavillon situé à Bry-Sur-Marne (Val-de-Marne) et une résidence secondaire sise à Pornichet (Loire-Atlantique), aucun bien commun n'existant en raison de la brièveté du mariage ; qu'au nombre des témoignages invoqués par Mme X..., ceux de M. M..., Mme N... et M. et Mme K..., exprimés en termes généraux, qui sont vagues et non circonstanciés, n'ont pas de valeur probante ; qu'il en est de même de celui de Mme P... qui déclare peu connaître le défunt et qui n'a rencontré le couple qu'une seule fois, ainsi que de celui de Mme B..., qui n'est pas écrit de sa main ; que les dépositions des témoins M. Q..., Mme R..., Mme S..., décrivant la gaîté des époux le jour de la noce, ne contredisent pas les éléments fournis par Mmes Z..., T... et U... ; que l'état de grossesse de Mme X... n'est pas étayée par des éléments probants, celle-ci n'établissant pas qu'elle souhaitait avoir un enfant du défunt ; que Mme X... s'étant mariée dans le but exclusif d'appréhender le patrimoine de M. Y..., soit en vue d'atteindre un résultat étranger à l'union matrimoniale, il y a lieu d'annuler le mariage, faute de consentement ; 

ALORS, 1°), QUE le devoir de secours entre époux et la vocation successorale du conjoint survivant, qui emportent l'un et l'autre des effets patrimoniaux, sont inhérents à l'institution matrimoniale ; qu'en considérant que le mariage avait été contracté à des fins étrangères à l'union matrimoniale cependant qu'il ressortait de ses propres constatations que Mme X... avait au contraire épousé M. Y... dans le but de bénéficier d'un avantage inhérent au mariage, la cour d'appel a violé l'article 146 du code civil ; 

ALORS, 2°), QUE la protection de la liberté du mariage implique que celui-ci puisse être contracté indépendamment de la finalité poursuivie par les époux, laquelle ne regarde qu'eux et n'intéresse pas la société ; qu'en considérant, pour annuler le mariage contracté par Mme X..., que cette dernière avait exclusivement cherché à appréhender le patrimoine de son époux, la cour d'appel a violé l'article 12 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

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