Selon la Cour de cassation, interdire le test génétique à l’exception des procédures relatives à la filiation ne porte pas une atteinte démesurée d’une part au droit au respect de la vie privée et familiale (article 8 de la CEDH) et d’autre part, au droit de l’enfant de connaître ses parents et être élevé par eux (article 3, Convention internationale des droits de l'enfant).
Ainsi, sur le fondement de l’article 16-11 alinéa 5 du Code civil, un homme pensant être père ne peut pas obtenir en référé un test de paternité à titre de mesure d'instruction.
Cass, Civ 1e, 8 juin 2016, n°15-16.696
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 26 juin 2014), statuant sur renvoi après cassation (Civ. 1re, 25 septembre 2013, n° 12-19.528), que M. X… a assigné en référé Mme Y… pour obtenir, sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile, la réalisation d’un test de paternité sur lui-même et l’enfant de celle-ci, Raphaël Y…, né en 2010 ;
Sur le moyen unique pris en sa première branche :
Attendu que M. X… soutient qu’une déclaration d’inconstitutionnalité de l’article 16-11 du code civil, à intervenir à la suite d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par lui, doit priver l’ arrêt de tout fondement juridique ;
Attendu que, par arrêt du 2 décembre 2015 (n° 1485 F-P+B), la Cour de cassation a dit n’y avoir lieu à renvoi devant le Conseil constitutionnel ; que le moyen est devenu sans objet ;
Sur le moyen unique, pris en ses deuxième et troisième branches :
Attendu que M. X… fait grief à l’arrêt de rejeter sa demande alors, selon le moyen :
1°/ que chacun a droit au respect de sa vie privée et familiale ; que l’article 16-11, alinéa 5, du code civil, qui prévoit qu’en matière civile l’identification d’une personne par ses empreintes génétiques ne peut être recherchée qu’en exécution d’une mesure d’instruction ordonnée par le juge saisi d’une action tendant soit à l’établissement ou la contestation d’un lien de filiation, soit à l’obtention ou la suppression de subsides, en imposant à celui qui soupçonne sans certitude être le père d’un enfant de le reconnaître préalablement de manière mensongère, pour ensuite introduire en justice une action en contestation de sa reconnaissance à l’occasion de laquelle l’expertise génétique, qui est de droit en matière de filiation, pourra être ordonnée afin de vérifier le lien biologique de filiation, est contraire au droit au respect de la vie privée et familiale, tel que garantit par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme ; qu’en retenant cependant, pour juger que l’article 16-11 du code civil s’opposait à ce qu’une expertise génétique soit ordonnée, qu’aucune action judiciaire relative à la filiation paternelle de l’enfant n’avait été intentée, la cour d’appel a méconnu le droit au respect de la vie privée et familiale de M. X… et a ainsi violé l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme ;
2°/ que, selon les termes de l’article 7 de la Convention internationale des droits de l’enfant du 20 novembre 1989, l’enfant se voit reconnaître « dans la mesure du possible, le droit de connaître ses parents et être élevé par eux » ; que le juge doit en toutes circonstances en assurer la protection dans ses décisions (article 3 de la CIDE), de sorte que l’intérêt supérieur de l’enfant peut justifier qu’un homme qui se déclare prêt à le reconnaître obtienne, avant tout litige, une expertise en vue de s’assurer de la véracité de sa paternité ; qu’en se bornant à relever que l’intérêt supérieur de l’enfant commandait de ne pas faire droit à la demande d’expertise génétique formée par M. X…, parce que l’établissement d’une filiation par le père, qui serait une démarche responsable et raisonnée, ne pourrait être lié par principe à la vérification scientifique préalable de sa paternité, quand l’intérêt supérieur de l’enfant commandait, tout au contraire, qu’une expertise soit ordonnée pour que M. X… puisse, en toute connaissance de cause, décider de reconnaître l’éventuel lien de filiation qui pourrait être confirmé par la mesure sollicitée, la cour d’appel a violé les articles 3 et 7 de la Convention internationale des droits de l’enfant du 20 novembre 1989, ensemble l’article 145 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l’arrêt retient, à bon droit, qu’il résulte du cinquième alinéa de l’article 16-11 du code civil qu’une mesure d’identification d’une personne par ses empreintes génétiques ne peut être ordonnée en référé mais seulement à l’occasion d’une instance au fond relative à la filiation ;
Et attendu que ces dispositions, qui ne privent pas M. X… de son droit d’établir un lien de filiation avec l’enfant ni de contester une paternité qui pourrait lui-être imputée, ne portent pas atteinte à son droit au respect de la vie privée et familiale ; qu’elles ne méconnaissent pas davantage le droit de l’enfant de connaître ses parents et d’être élevé par eux ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;