Des époux possédant un ancien moulin transformé en maison à usage d'habitation sont assignés en justice par une voisine dont la propriété est traversée par le canal qui alimente l'ancien moulin. La voisine conteste tous droits au couple sur le canal et entend interrompre la circulation de l'eau. En défense, les époux invoquent le droit d'accession selon lequel la propriété d'un immeuble « donne droit sur tout ce qui s'y unit accessoirement, soit naturellement, soit artificiellement » (C. civ. art. 546). Mais pour la cour d'appel, approuvée par les Hauts Magistrats, ce texte n'instaure qu'une présomption simple de propriété en faveur de celui qui l'invoque. Or l'ancien moulin ne fonctionne plus depuis 40 ans et ses installations hydrauliques ont été totalement démantelées, l'ensemble ayant été transformé en maison d'habitation. Ces éléments permettent de renverser la présomption résultant du droit d'accession.
L'arrêt d'appel est en revanche cassé pour avoir rejeté la demande par laquelle les époux réclamaient le bénéfice d'uneservitude par destination du père de famille d'usage du canal. Pour les juges du fond, il n'existait plus de signe apparent de servitude au moment de la division des fonds – les installations hydrauliques avaient disparu – et la seule présence du canal ne suffisait pas à caractériser la servitude. Pour que cette dernière existe, il fallait rapporter la preuve qu'il était actuellement possible de diriger artificiellement l'eau dans le canal et d'en régler le débit, ce qui n'était pas le cas. Censure de la Cour de cassation, qui reproche aux juges d'appel d'avoir statué en ce sens alors qu'ils avaient constaté que la voisine avait récupéré les manivelles permettant de manœuvrer l'écluse.
Une servitude s'établit par « destination du père de famille » lorsqu'un propriétaire, divisant son fonds, a préalablement établi sur l'une des parties au profit d'une autre des aménagements apparents matérialisant l'intention d'asservir la première à la seconde (C. civ. art. 693 et 694). Comme le révèle la lecture du pourvoi, les différentes parcelles ici concernées avaient bien appartenu, par le passé, à un même propriétaire.