Indemnisation de l'ex-concubin pour les travaux financés dans le logement commun

Publié le Modifié le 13/10/2014 Vu 3 556 fois 0
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Le concubin appauvri après séparation est légitime, sur le fondement de l'enrichissement sans cause de son ex-concubine, à demander une indemnisation dès lors qu'il a substantiellement participé aux travaux réalisés dans l'ancienne habitation commune appartenant à cette dernière, dépassant la simple contrepartie de l'hébergement dont il bénéficiait pendant leur concubinage.

Le concubin appauvri après séparation est légitime, sur le fondement de l'enrichissement sans cause de son

Indemnisation de l'ex-concubin pour les travaux financés dans le logement commun

Le concubin appauvri après séparation est légitime, sur le fondement de l'enrichissement sans cause de son ex-concubine à laquelle appartenait le logement, à demander une indemnisation dès lors qu'il a substantiellement participé aux travaux réalisés dans l'ancienne habitation commune, dépassant la simple contrepartie de l'hébergement dont il bénéficiait pendant leur concubinage.

Cass. 1e civ. 23 janvier 2014 n° 12-27.180 (n° 174 F-D)

La cour de cassation, première chambre civile, a rendu l'arrêt suivant : 

Sur le moyen unique : 

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 5 juillet 2012), que M. X... et Mme Y... ont vécu plusieurs années en concubinage dans un immeuble dont celle-ci est devenue nue-propriétaire suivant acte du 13 juin 2001 ; qu'après leur rupture, Mme Y... a sollicité l'expulsion de M. X... ainsi que sa condamnation à lui payer une indemnité d'occupation depuis le 1er mai 1997 ; que M. X... a formé une demande reconventionnelle en paiement d'une certaine somme au titre de sa participation à l'amélioration du bien immobilier de sa concubine ; 

Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de la condamner à payer une somme de 70 000 euros à M. X... sur le fondement de l'enrichissement sans cause, alors, selon le moyen : 

1°/ que le concubin qui, dans le cadre de relations stables avec sa concubine, finance des travaux en vue de l'aménagement d'un logement qu'il occupe à titre gratuit, n'est pas recevable à invoquer le fondement de l'enrichissement sans cause pour prétendre obtenir le remboursement du montant de ces travaux auprès de sa concubine ; que dans cette hypothèse, en effet, la participation du concubin trouve sa cause, soit dans la recherche d'un intérêt personnel, soit dans une intention libérale, ces deux circonstances faisant obstacle à ce que soit invoqué un enrichissement sans cause ; qu'en condamnant Mme Y... à payer à M. X... la somme de 70 000 euros sur le fondement de la théorie de l'enrichissement sans cause, tout en relevant, par motifs propres et adoptés, que M. X... avait occupé le logement de sa concubine à titre gratuit pendant de nombreuses années dans le cadre d'une relation stable de concubinage, dont était issu un enfant, et que l'intéressé avait « tiré des avantages matériels de sa domiciliation dans la maison », ce dont il résultait que l'initiative prise par M. X... de réaliser des travaux dans lelogement de la famille avait une cause, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article 1371 du code civil ; 

2°/ que dans ses écritures d'appel Mme Y... faisait valoir que M. X... ne pouvait agir à son encontre que pour les travaux réalisés postérieurement à la donation du 13 juin 2001 dont elle avait bénéficié et que, postérieurement à cette date, les seuls travaux réalisés concernaient « la chambre 1 et la cuisine d'été » ; qu'en laissant sans réponse ces conclusions pertinentes, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 

Mais attendu qu'après avoir relevé l'ampleur des travaux réalisés par M. X... dans l'immeuble appartenant à Mme Y..., à l'origine d'une plus-value importante de ce bien, la cour d'appel, qui a répondu aux conclusions dont elle était saisie, a souverainement estimé que ces travaux qui excédaient sa nécessaire participation aux charges de la vie commune, ne pouvaient être considérés comme une contrepartie de l'amélioration du cadre de vie et de l'hébergement gratuit dont M. X... avait profité pendant la période du concubinage ; que la cour d'appel, qui en a déduit que l'enrichissement de Mme Y... et l'appauvrissement corrélatif de M. X... étaient dépourvus de cause, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ; 

Par ces motifs : 

Rejette le pourvoi ; 

Condamne Mme Y... aux dépens ; 

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ; 

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois janvier deux mille quatorze. 

Moyen annexe au présent arrêt 

Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour Mme Y... 

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Mme Y... à payer à M. X... la somme de 70. 000 ¿ sur le fondement de la théorie de l'enrichissement sans cause ; 

Aux motifs que l'importance des travaux réalisés par M. X... qui sont décrits par l'expert Z...excède la simple amélioration du cadre de vie de ce dernier, la contrepartie de son hébergement à titre gratuit, et encore sa nécessaire participation aux charges de la vie commune, contrairement à ce que prétend Mme Y..., de sorte que l'enrichissement sans cause de cette dernière et l'appauvrissement corrélatif de M. X... sont établis ; qu'ensuite, s'agissant du montant total dû à ce titre par Mme Y..., ses critiques fondées du rapport de M. Z..., contenues dans le rapport Lagofun du 16 décembre 2011 complété le 16 avril 2012, concernant notamment la déduction de la valeur du bien immobilier litigieux au moment de la donation en 2001, l'achat de matériaux réalisés par les consorts Y... eux-mêmes, ou l'assiette exacte et l'étendue des travaux réalisés par M. X..., ont déjà conduit le tribunal a réduire très sensiblement l'estimation qui avait été retenue par l'expert Z...pour ramener à sa juste proportion la part de la plus-value véritablement imputable à M. X... ; 

Et aux motifs adoptés qu'il ressort des éléments de la procédure que la maison a été édifiée sur un terrain qui est la propriété de Mme Laurence Y..., que les travaux n'ont été possibles que grâce à l'achat de matériaux par M. Michel Y..., le père de la requérante, que Mme Laurence Y... est nue-propriétaire de la maison et lui imposer le remboursement total de la plus-value reviendrait à la priver des droits et biens immobiliers dont elle est propriétaire, que la valeur du bien au moment de l'acte de donation était d'environ 70. 000 ¿, que si M. Claude X... a participé à une partie conséquente des travaux, il a également été aidé par des corps de métier, dont il lui appartenait, ce qu'il n'a pas fait, de justifier qu'il les aurait défrayés, que M. X... a tiré des avantages matériels de sa domiciliation dans la maison, qu'il y réside depuis le mois de mai 1997 et apparemment il y résidait toujours le 14 octobre 2010, lorsque son conseil a fait signifier des conclusions, mentionnant qu'il était toujours domicilié dans la villa du ... et ce, sans bourse délier ; qu'à propos de l'évaluation de la maison, l'expert indique que la plus-value sur la valeur du terrain ne concerne pas M. Claude X..., le terrain étant avant la construction propriété de Mme Laurence Y..., il reste à ce jour toujours la propriété de celle-ci, ce qui est conforme au droit positif en vigueur ; que la valeur avancée du bien, conformément à l'acte de donation du 13 juin 2001, était de 68. 602, 06 ¿, pour un atelier et un terrain dans leur état avant 2001 ; que l'expert indique que la valeur du terrain pouvait être estimée au jour de son rapport à la somme de 100. 000 ¿ ; que l'expert chiffre la valeur vénale de l'ensemble terrain et maison à la somme de 488. 285 ¿ ; que c'est ainsi que l'expert dégage la plus-value de 388. 285 ¿, sans avoir tenu compte, néanmoins, de la valeur initiale de la donation, soit 68. 602, 06 ¿, étant entendu que s'agissant d'une donation d'un père à sa fille, cette évaluation initiale ne peut être qu'une évaluation basse ; que M. Claude X... ne justifie pas sur quel fondement il serait le seul à pouvoir profiter de la plus-value, excluant totalement Mme Laurence Y... de ce bénéfice, réalisé à la suite de travaux que celle-ci a autorisés, subis, partiellement réalisés, et pour lesquels elle justifie avoir acquitté les achats de matériaux ; que s'il est établi que M. X... a contribué à la réalisation de la plus-value de la maison, cette contribution doit être limitée et c'est une somme de 70. 000 ¿ que Mme Laurence Y... devra verser à M. Claude X... sur le fondement de la théorie de l'enrichissement sans cause ; 

Alors, d'une part, que le concubin qui, dans le cadre de relations stables avec sa concubine, finance des travaux en vue de l'aménagement d'un logement qu'il occupe à titre gratuit, n'est pas recevable à invoquer le fondement de l'enrichissement sans cause pour prétendre obtenir le remboursement du montant de ces travaux auprès de sa concubine ; que dans cette hypothèse, en effet, la participation du concubin trouve sa cause, soit dans la recherche d'un intérêt personnel, soit dans une intention libérale, ces deux circonstances faisant obstacle à ce que soit invoqué un enrichissement sans cause ; qu'en condamnant Mme Y... à payer à M. X... la somme de 70. 000 ¿ sur le fondement de la théorie de l'enrichissement sans cause, tout en relevant, par motifs propres et adoptés, que M. X... avait occupé le logement de sa concubine à titre gratuit pendant de nombreuses années dans le cadre d'une relation stable de concubinage, dont était issu un enfant, et que l'intéressé avait « tiré des avantages matériels de sa domiciliation dans la maison » (motifs adoptés du jugement entrepris, p. 9, alinéa 1er), ce dont il résultait que l'initiative prise par M. X... de réaliser des travaux dans le logement de la famille avait une cause, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article 1371 du code civil ; 

Alors, d'autre part, qu'en tout état de cause, dans ses écritures d'appel (conclusions signifiées le 21 février 2012, p. 6, alinéa 9), Mme Y... faisait valoir que M. X... ne pouvait agir à son encontre que pour les travaux réalisés postérieurement à la donation du 13 juin 2001 dont elle avait bénéficié et que, postérieurement à cette date, les seuls travaux réalisés concernaient « la chambre 1 et la cuisine d'été » ; qu'en laissant sans réponse ces conclusions pertinentes, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. 

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