Selon attestation de dévolution successorale établie par une Etude Notariale, Monsieur André X décédé le 26 mars 2008 a laissé pour recueillir sa succession sa fille, Madame Nathalie Y et Madame Eloise Z, en qualité de légataire universelle des biens dépendant de la succession.
           Or, selon la Caisse Régionale d’Assurance Maladie,  seule Nathalie Z, serait redevable de la somme de 50.000 € au titre de la récupération de l’allocation sur succession.
           Madame Eloise Z, quant à elle, après avoir été sollicitée dans un premier temps par la CRAM pour sa part de remboursement de la somme susvisée, n’est plus recherchée aujourd’hui.
           La question posée ici concerne l’obligation à la dette de l’héritier en nue-propriété (Nathalie Y), et plus particulièrement la répartition du passif successoral entre héritiers nu-propriétaire et usufruitier (Eloise Z).
           En d’autres termes qui du nu-propriétaire ou de l’usufruitier doit supporter la dette successorale ? Selon quelles proportions ? Et surtout la CRAM peut-elle choisir de réclamer la somme due au titre de l’allocation récupérable à un seul des successeurs ?
           Dans un premier temps, la Cour de Cassation a jugé, dans un arrêt du 9 décembre 2003 (Bull. Civ. I, n° 255, D 2004, Somm. p. 2336), que l’usufruitier universel n’était tenu que des intérêts du passif successoral, le nu-propriétaire devant, quant à lui, assumer le capital du même passif.
           Le point qui restait en suspens en 2003 était de savoir si le nu-propriétaire ne pouvait être poursuivi que pour le capital du passif, ou si au contraire, il pouvait être recherché pour la totalité de la dette.
           La jurisprudence, par un arrêt prononcé le 18 janvier 2005 (Cass. 2e civ., 18 janv. 2005, n° 02-30.577, Bull. civ., II, n° 15) a privilégié la seconde solution.
           Après avoir rappelé que l’usufruitier à titre universel ne pouvait être poursuivi que dans les limites posées par l’article 612 du Code Civil, c'est-à -dire pour les intérêts de la dette, la Cour de Cassation précise, au visa de l’article 714 du même code, que le créancier « conserve le droit de poursuivre directement l’héritier comme il aurait pu poursuivre le défunt dont il est le continuateur, sauf tel recours que de droit de sa part ».
           Cet arrêt a été confirmé par la suite, notamment par une décision de la Cour Suprême en date du 6 décembre 2006.
           Ces décisions continuent d’être critiquées par plusieurs auteurs qui considèrent que l’usufruitier universel devrait, au même titre que l’héritier nu-propriétaire, être considéré comme continuateur de la dette du défunt et que cette qualité ne devrait pas incomber au seul nu-propriétaire.
           Selon la Doctrine, ces deux héritiers devraient donc être logiquement traités pareillement sur le plan de la mesure de la dette, ce qui n’est malheureusement pas le cas.
           Cela signifie que le recours exercé par la CRAM contre Nathalie Y est justifié juridiquement: en effet, si le créancier successoral peut poursuivre le successeur en usufruit à proportion de la part des fruits et revenus qu’il a vocation à recueillir, il n’en reste pas moins qu’il peut aussi poursuivre le successeur en nue-propriété pour le tout, c'est-à -dire à concurrence de la dette en intérêt et en capital.
           La CRAM a donc le choix de poursuivre soit les deux héritiers, soit le seul nu-propriétaire.
           C’est ce qu’elle a choisi de faire en l’espèce.
           Reste pour Nathalie Y la possibilité d’exercer un recours contributoire auprès de Eloise Z, recours qui permettra de rétablir une proportionnalité à laquelle elle reste tenue, et qui n’a pas été respectée par la CRAM poursuivante. Cette action peut être diligentée devant le Tribunal de Grande Instance.
           Nathalie Y, en sa qualité d’héritière nue-propriétaire, devra donc s’acquitter auprès du créancier poursuivant de la somme réclamée.
           Les droits de successions doivent être versés au plus tard dans les six mois du décès. A défaut de règlement, ou d’accord sur celui-ci, les héritiers s’exposent au paiement d’intérêts de retard et de pénalités.
Caroline YADAN PESAH
          Avocat à la Cour
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