Bataille des conditions générales et détermination du moment de la formation du contrat

Publié le 15/02/2015 Vu 6 109 fois 0
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Il est important de connaitre le moment de la formation du contrat lorsque les parties échangent des offres et des contre-offres à partir de ce qu’on a appelé la bataille des conditions générales.

Il est important de connaitre le moment de la formation du contrat lorsque les parties échangent des offres e

Bataille des conditions générales et détermination du moment de la formation du contrat

Connaître le moment de la formation d’un contrat peut s’avérer utile, voire indispensable.

En effet, la date du contrat déterminera la loi applicable ainsi que le point de départ des effets du contrat. À partir du moment où le contrat définitif est conclu, les parties ne peuvent plus se rétracter. S'il existe un conflit de lois dans le temps, la loi applicable au contrat se détermine au regard de sa date de formation.

Généralement, le moment de la formation du contrat se pose lorsqu’on est en présence de contrat par correspondance ; c’est-à-dire les contrats entre des personnes qui ne sont pas physiquement au même endroit au moment de la formation du contrat.

Mais il est important de connaitre le moment de la formation du contrat lorsque les parties échangent des offres et des contre-offres à partir de ce qu’on a appelé la bataille des conditions générales.

En effet, de nombreux professionnels élaborent des conditions générales, c’est-à-dire des clauses rédigées par avance pour un nombre indéfini de contrats d’une même nature et censées, le moment venu, s’appliquer sans faire l’objet de négociation individuelle entre les parties.

Généralement, les conditions générales regroupent des informations relatives à des conditions de vente ou d’achat d’un produit ou d’un service tels que :

  • Les conditions de livraisons ;
  • Les remises
  • Les conditions de règlement
  • Les pénalités
  • Les conditions de remboursement
  • Le tribunal compétent ...

On distingue les conditions générales de vente (fournies par le vendeur) des conditions générales d’achat (fournies par l’acheteur).

Dans la plupart des cas, les clients non professionnels ou consommateurs n'ont pas le poids commercial suffisant pour pouvoir négocier les conditions générales de vente insérées dans leurs contrats (EDF, GDF, Chronopost, La Poste, Téléphonie mobile…). Ils ont juste la faculté d'accepter en l'état ces conditions pour pouvoir acheter ou refuser de conclure le contrat ; c'est ce que l'on appelle un contrat d'adhésion.

Mais il peut arriver, notamment dans le monde des affaires, que le destinataire d’une offre (l’acheteur) répond à celle-ci en opposant ses conditions générales d’achat; c'est-à-dire, il accepte de conclure le contrat à condition que ses conditions générales d’achat soient applicables.

Le problème est alors de savoir si dans ces conditions un contrat peut être formé. Si oui, à partir de quel moment ?

Nous envisagerons ci-après :

  • La solution en droit interne (1)
  • La solution de la Convention des Nations Unies sur la vente internationale de marchandises (2)

1) La solution en droit interne

En droit interne français, il convient de distinguer les obligations essentielles du contrat des obligations non essentielles.

L'obligation essentielle est celle par laquelle découle l’essence du contrat, c’est à dire, celle sans laquelle le contrat ne pourrait exister en tant que tel. Elle diffère selon la nature et le type de contrat envisagé.

Par exemple, pour la vente, les obligations essentielles sont la chose vendue et le prix. Pour le contrat de bail, il s’agit de la délivrance du local et le paiement du loyer.

Tout désaccord sur les obligations essentielles du contrat a pour conséquence d’empêcher le contrat de se former.

En revanche, tous les autres éléments du contrat considérés comme non essentiels ne peuvent empêcher la formation du contrat.

En cas de désaccord sur ces éléments, ce sont les dispositions du code civil qui prennent le relais.

Par exemple dans la vente, les obligations essentielles sont la chose vendue et le prix.

Le contrat de vente est formé dés lors que les parties ont convenu de la chose vendue et du prix (article 1583 du code civil). En revanche, tous les autres éléments du contrat de vente (le moment du paiement, le lieu de délivrance de la marchandise par exemple) sont considérés comme non essentiels et ne peuvent empêcher la formation du contrat.

En cas de désaccord des parties sur les obligations non essentielles, on considère que le point litigieux n'entre pas dans le champ contractuel. On appliquera alors le droit commun; c’est-à-dire les dispositions supplétives du code civil.

A partir de là, il devient simple de résoudre la bataille des conditions générales.

En effet, lorsque chacune des parties a stipulé ses propres conditions générales et que celles-ci se contredisent sur certaines clauses (ex : une clause attributive de compétence désigne le tribunal de commerce de Paris l’autre celui de Marseille), on considère qu’elles se contredisent donc elles s’annulent. Dans cette hypothèse, elles sont remplacées par le droit commun.

Prenons deux exemples pour illustrer cela.

Exemple 1 :

Voila des conditions générales de vente du vendeur qui prévoient que l’acheteur ne peut engager une action en garantie des vices cachés que dans les 6 mois qui suivent la réception de la marchandise. A l’inverse, dans les conditions générales d’achat, on trouve une clause qui prévoit un délai de 3 ans pour engager une action en garantie des vices cachés à partir de la réception de la marchandise.

Dans cette hypothèse, les deux clauses s’annulent car elles sont contradictoires. On ne peut pas les concilier. Elles sont remplacées par les dispositions supplétives du code civil.

Ainsi, on appliquera l’article 1648 du code civil qui prévoit que « L'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l'acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice ».

Exemple 2 :

Les conditions générales de l’acheteur prévoient que le transfert de la propriété des marchandises s’opère au moment de la commande. L’acheteur sera propriétaire dés l’instant qu’il a passé commande des marchandises. A l’inverse, les conditions générales du vendeur prévoient que le transfert de propriété s’opère seulement au moment du paiement (clause de réserve de propriété).

Dans ce cas, les deux clauses s’annulent. Elles sont incompatibles. On appliquera alors les dispositions du code civil en matière de transfert de propriété (article 1583 du code civil pour ce qui est de la vente. « [La vente] est parfaite entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur, dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée ni le prix payé. »)

Ce système a pour avantage de sauver les négociations par la formation du contrat même si des désaccords persistent encore. En revanche, il a pour inconvénient d'engager les parties dans un contrat alors qu’elles ont pu ne pas vouloir certaines clauses que la loi intègre dans le contrat et qui ne correspondent pas à leur volonté.

C’est la raison pour laquelle certains droits étrangers ont préféré une solution inverse. C’est notamment le cas du droit anglais.

En effet, en droit anglais, tant qu’il y’a un désaccord entre les parties, même sur des obligations non essentielles, le contrat n'est pas formé.

On considère que la modification des termes de l'offre constitue une contre proposition qui nécessite l'accord de l'auteur de l'offre pour pouvoir former le contrat.

Cette solution a l’avantage d’être simple.

2) La solution de la convention des Nations Unies sur les contrats de vente internationale de marchandises

La convention des Nations Unies sur les contrats de vente internationale de marchandises encore appelée convention de Vienne (CVIM) qui s’applique aux contrats internationaux contient une disposition qui règle la question.

En effet,  aux termes de l’article 19 :

« 1) Une réponse qui tend à être l’acceptation d’une offre, mais qui contient des additions, des limitations ou autres modifications, est un rejet de l’offre et constitue une contre-offre.

2) Cependant, une réponse qui tend à être l’acceptation d’une offre, mais qui contient des éléments complémentaires ou différents n’altérant pas substantiellement les termes de l’offre, constitue une acceptation, à moins que l’auteur de l’offre, sans retard injustifié, n’en relève les différences verbalement ou n’adresse un avis à cet effet. S’il ne le fait pas, les termes du contrat sont ceux de l’offre, avec les modifications comprises dans l’acceptation.

3) Des éléments complémentaires ou différents relatifs notamment au prix, au paiement, à la qualité et à la quantité des marchandises, au lieu et au moment de la livraison, à l’étendue de la responsabilité d’une partie à l’égard de l’autre ou au règlement des différends, sont considérés comme altérant substantiellement les termes de l’offre. »

Il ressort donc de cet article que si l’acceptation modifie de manière substantielle l’offre, celle-ci est un rejet de l’offre et constitue une contre-offre. Dans ce cas, le contrat n’est pas conclu.

Par contre, si l'acceptation ne modifie pas de manière substancielle les termes de l'offre, le contrat est formé, si l'auteur de l'offre garde le silence.

Constitue une altération substantielle de l’offre, tout désaccord portant sur :

  • le prix,
  • le paiement,
  • la qualité et la quantité des marchandises,
  • le lieu et le moment de la livraison,
  • l’étendue de la responsabilité d’une partie à l’égard de l’autre
  • ou les modalités de règlement des différends

Exemple :

Je vous vends des poupées alsaciennes. Oui j’accepte de vous acheter vos poupées à condition qu’elles soient bretonnes. Il y’a une modification des termes de l’offre dans l’acceptation.

Soit l’offrant refuse de vendre des poupées bretonnes, en ce moment le contrat n’est pas formé.

Soit il garde le silence, et le contrat est formé tel que modifié par l’acceptation. Le contrat porte alors sur des poupées bretonnes.

Yaya MENDY

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A propos de l'auteur
Blog de Yaya MENDY

Passionné du droit des assurances, j'ai le privilège de travailler au sein de La Médiation de l'Assurance, où je contribue à résoudre des litiges entre les assureurs et les assurés. Mon rôle consiste à proposer des avis visant à mettre un terme aux différends, tout en travaillant activement à améliorer les pratiques au sein du secteur de l'assurance.

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