L’obligation de délivrance conforme est définie à l’article 1604 du Code civil qui dispose « la délivrance est le transport de la chose vendue en la puissance et possession de l’acheteur ».
L’obligation de délivrance renvoie, en premier lieu, à l’idée de transmission de la maîtrise essentiellement matérielle de la chose. L’acheteur doit en effet être mis en mesure de prendre possession du bien.
En second lieu, l’obligation de délivrance s’entend de la délivrance d’une chose conforme aux prévisions contractuelles.
Pour apprécier la conformité de la chose, on compare les caractéristiques de la chose livrée à celles de la chose qui faisait l’objet du contrat. Il faut dès lors se réfère aux stipulations contractuelles.
L’obligation de délivrance conforme se définit alors comme l’exigence de correspondance de la chose vendue aux normes définies au contrat.
I. Conditions d’application
Quant aux caractéristiques du défaut retenu:
La notion de conformité renvoie à des réalités différentes.
En effet, il peut s’agir soit :
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de la conformité eu égard à la quantité de choses vendues.
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de la conformité eu égard à la qualité de la chose vendue.
Concernant la qualité de la chose vendue, une différence est à établir entre :
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la vente d’un corps certain,
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et la vente d’une chose de genre.
Les choses de genre ou biens fongibles sont celles qui sont interchangeables avec d’autres. Exemple : les biens de l'électroménager neuf, une tablette numérique, un ordinateur portable.
Au contraire, des biens sont des corps certains lorsqu'ils sont considérés dans leur individualité, qu'ils apparaissent uniques, non interchangeables avec d'autres, on parle à leur propos de biens non fongibles. Par exemple : les immeubles, un tableau d’art, une sculpture…
Si la vente porte sur un corps certain, l’obligation de délivrance conforme s’entend de la conformité de la chose en elle-même.
Dès lors, toute différence entre la chose livrée et la chose convenue, même minime, constitue un manquement à l’obligation de délivrance conforme du vendeur.
Ainsi, manque à son obligation de délivrance conforme, le vendeur qui avait fait parvenir à un acheteur, un exemplaire d'un livre avec indication d'un numéro justificatif de tirage différent de celui qui était initialement prévu même s’il n'existait aucune différence entre les deux exemplaires. (Cass. civ. 1ère, 26 novembre 1980, pourvoi n° 79-14547)
Par contre, si la vente porte sur une chose de genre, l’exigence d’identité ne porte plus sur la chose en elle-même, mais sur les caractéristiques de celle-ci.
En effet, selon la Cour de cassation, « le vendeur est tenu de délivrer une chose dont les caractéristiques correspondent à la commande et l'acheteur ne peut être tenu d'accepter une chose différente ».
Dès lors, encourt la cassation l'arrêt qui, pour débouter l'acquéreur d'un mobilier de son action en résolution fondée sur la circonstance que les ferrures et couleurs des bois des meubles livrés ne correspondaient pas à sa commande, énonce que ces différences n'en modifiaient pas profondément l'aspect. (Cass. civ. 1ère, 1er décembre 1987, pourvoi n° 85-12046)
De même, encourt la cassation l’arrêt de la cour d'appel qui, pour déclarer que les légers défauts de fonctionnement et esthétiques d’un véhicule neuf n'ouvraient pas l'action pour défaut de conformité aux stipulations contractuelles, énonce que l'effraction du véhicule en cause, avant la vente, avait des conséquences mineures réparables sans laisser de traces et n'était pas d'une gravité suffisante pour faire déclasser ce véhicule neuf en véhicule d'occasion. (Cass. civ. 1ère, 3 mai 2006, pourvoi n° 04-20432)
Quant à la date d’appréciation du défaut de conformité :
Selon la Cour de cassation, le défaut de conformité s’apprécie, sauf stipulation contraire, au jour de la délivrance. (Cass. civ. 1ère, 7 mai 2008, pourvoi n° 06-20408)
II. Régime applicable
Délai pour agir :
Le délai est de cinq ans à compter du jour de la délivrance (article 2224 du code civil).
Sort des clauses contractuelles dérogatoires :
En principe, les clauses exonératoires ou limitatives de responsabilité sont valables, conformément au droit commun des contrats. (Cass. civ. 1ère, 20 décembre 1988, pourvoi n° 87-16369)
Toutefois, dans les ventes entre vendeurs professionnels et consommateurs, les clauses exonératoires ou limitatives de responsabilité sont réputées non écrites, car elles contreviennent à la prohibition des clauses abusives (article R. 132-1 du code de la consommation).
Preuve du défaut de délivrance :
La preuve est rapportée en deux temps :
- avant le paiement du prix, il incombe au vendeur d’apporter la preuve de la délivrance (article 1315, alinéa 2 du code civil) ;
- une fois la délivrance établie ou accomplie, il revient à l’acheteur de prouver un défaut de conformité. (Cass. com. 16 juin 1987, pourvoi n° 86-12178)