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Bref rappel de ce qu’est la promesse de porte-fort
L’ancien article 1119 du Code civil (devenu l’article 1203 du Code civil) disposait qu’ « on ne peut, en général, s’engager, ni stipuler, en son propre nom, que pour soi-même ». Toutefois, l’ancien article 1120 du Code civil (devenu l’article 1204 du Code civil), qui lui succédait immédiatement, disposait que « néanmoins, on peut se porter fort pour un tiers, en promettant le fait de celui-ci ».
La promesse ou clause de porte-fort peut être définie comme la convention « par laquelle une personne s’engage envers une autre (qui accepte le risque) à obtenir l’approbation d’un tiers à un acte envisagé et s’expose personnellement à une indemnité pour le cas où ce tiers, comme il est libre de le faire, refuserait de ratifier l’acte[1] ».
La promesse de porte-fort ne constitue pas une véritable exception au principe de l’effet relatif des contrats, dès lors que le tiers n’est pas tenu de ratifier l’engagement, à la différence du porte-fort qui s’engage personnellement à obtenir le consentement du tiers.
L’obligation du porte-fort d’obtenir le consentement du tiers s’analyse en une obligation de résultat[2]. Aussi, le porte-fort ne pourra se décharger de son obligation qu’à la ratification ou l’exécution de l’engagement par le tiers.
En cas de refus du tiers de ratifier ou d’exécuter l’engagement promis par le porte-fort, ce dernier engage sa responsabilité sur le terrain de la responsabilité contractuelle ; le créancier ne doit alors que prouver la non-obtention du résultat promis. Cette réparation s’opère en argent, par l’octroi de dommages-intérêts compensatoires[3]
Le nouvel article 1204, alinéa 3 du Code civil précise que « lorsque le porte-fort a pour objet la ratification d’un engagement, celui-ci est rétroactivement validé à la date à laquelle le porte-fort a été souscrit ».
En revanche, cette disposition n’a pas vocation à s’appliquer dans le cas spécifique du « porte-fort d’exécution », c’est-à-dire dans le cas où le porte-fort garantit l’exécution d’une obligation par un tiers. Dans le cas du « porte-fort d’exécution », « l’exécution du fait promis par le tiers n’a pas à produire d’effet rétroactif[4] ».
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Faits de l’espèce
Dans le cadre d’un litige l’opposant à l’un de ses salariés, une société avait été condamnée, par le Conseil de prud’hommes, à lui verser une somme de près de 180.000 Euros.
Par la suite, un accord transactionnel avait été conclu entre les parties.
Au terme de cet accord transactionnel, la société versait à son ancien salarié une somme de 72.000 Euros et s’engageait, par promesse de porte-fort, à ce que le groupe, auquel appartient la société, reprenne des relations contractuelles avec cet ancien salarié, exerçant alors à titre libéral et indépendant.
En contrepartie, l’ancien salarié renonçait à l’exécution du jugement rendu par le Conseil de prud’hommes lui ayant accordé le versement de cette somme de près de 180.000 Euros.
Or, dès lors qu’aucune mission ne fut proposée à l’ancien salarié, celui-ci, invoquant l’inexécution de la promesse de porte-fort, sollicitait la résolution judiciaire de l’accord transactionnel ainsi que l’octroi de dommages-intérêts.
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Position de la Cour d’appel
La Cour d’appel accueillit cette demande au motif que « la convention contenant une promesse de porte-fort est susceptible de résolution en cas d’inexécution totale ou partielle et qu’il n’est pas contesté qu’aucune mission n’a été proposée [au salarié] entre 2003 et 2010 » par le groupe.
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Solution de la Cour de cassation
Dans son arrêt du 7 mars 2018, au visa des anciens articles 1184 et 1120 du Code civil, la Cour de cassation censura l’arrêt rendu par la Cour d’appel, mais seulement en ce qu’il avait prononcé la résolution de la transaction, au motif que « l’inexécution de la promesse de porte-fort ne peut être sanctionnée que par la condamnation de son auteur à des dommages-intérêts ».
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Analyse