LE PRE ETAT DATE : NOUVEAUTE ISSUE DE LA LOI ALUR
La Loi ALUR en date du 24.03.2014 a cherché à renforcer l’information de l’acquéreur d’un bien immobilier dés le stade de la signature de la promesse de vente appelé plus couramment « compromis de vente » par les agences immobilières.
Ainsi des documents sur la santé financière de la copropriété et celles du vendeur sont à fournir au futur acquéreur, ce que l’on appelle dans la pratique professionnelle le « Pré-état daté ».
Or la Loi ALUR ne précise pas où trouver ces informations, ni de quand elles doivent être datées. Aussi, deux réponses Ministérielles en date des 16.09.2014 et 15.09.2015 sont intervenues venant apporter un éclairage sur ces deux points.
Nous reviendrons dans cet article de façon plus précise sur la liste exact des informations à fournir à l’acheteur (II), non sans avoir au préalable donné la définition du pré-état daté et le texte légal le régissant (I).
Enfin, nous répondrons également à la question de savoir où trouve t on ces informations (III), à quelle date les informations doivent elles être fournies (IV) et enfin dans la pratique qui doit établir le pré-état daté (V) ?
I LA DEFINITION DU « PRE ETAT DATE »
La notion précise de « Pré-état daté » n’a pas d’existence légale, seule la notion d’« Etat daté » est prévue par l’article 10-1 de la loi du 10.07.1965 sur la copropriété des immeubles bâtis, il s’agit du document exigible lors de la signature de l’acte authentique de vente d’un lot de copropriété qui doit être fourni au Notaire.
Pourtant, l’exigence du « Pré-état daté » est fixée par la loi en son article L 721-2 du CCH (Code de la construction et de l’habitation) nouvellement créé par la Loi ALUR, qui n’emploie pas précisément ce terme de « Pré-état daté » et de nouveau modifié par l'Ordonnance n° 2015-1075 du 27.08.2015.
Cette disposition légale vient néanmoins préciser à ce titre l’ensemble des documents financiers qui doivent être fournies à l’acquéreur au stade même de la promesse de vente par le vendeur directement ou par son intermédiaire à savoir l’agence immobilière.
Ces documents ne sont plus seulement obligatoirement annexés à la promesse de vente mais peuvent être remis par tous moyens et tous supports y compris par voie dématérialisé qous réserve de l'acceptation expresse de l'acquéreur.
II LA LISTE DES INFORMATIONS FINANCIERES A ANNEXER A LA PROMESSE DE VENTE
1/ Les documents relatifs à l’organisation de l’immeuble :
La fiche synthétique de la copropriété (article 8-2 de la loi du 10.07.1965 précité), ce document ne sera à produire que selon un échéancier prévu par la loi à compter du 31.12.2016 uniquement et pour les copropriétés de plus de 200 lots.
- Le règlement de copropriété (RC) et l’état descriptif de division (EDD);
- Les Procès verbaux des 3 dernières assemblées générales de copropriété.
2/ Les documents relatifs à la situation financière de la copropriété et du copropriétaire vendeur
- Les charges afférentes au lot vendu : Charges courantes du budget prévisionnel et charges hors budget prévisionnel payés par le vendeur au titre des deux exercices comptables précédant la vente ;
- Les sommes susceptibles d'être dues par l'acquéreur au syndicat des copropriétaires (SDC);
- Les renseignements concernant la situation financière du SDC à savoir l’état global des impayés de charges au sein du syndicat et la dette vis-à-vis des fournisseurs ;
- Les renseignements relatifs au fond de travaux : si le SDC dispose d’un fonds travaux, le vendeur doit faire connaitre le montant de la part du fonds de travaux rattachée au lot principal vendu.
3/ Le Carnet d’entretien de l’immeuble
4/ Une Notice d’information
Cette notice devra comporter les droits et obligations des copropriétaires et porter sur le fonctionnement des instances du syndicat de copropriété.
Un arrêté du Ministre du logement devra déterminer le contenu de cette notice, qui n’est donc pas applicable à ce jour.
5/ Le diagnostic technique global et le plan pluriannuel de travaux
Précisons ici que cette dernière exigence est d’application différée et ne sera donc applicable qu’à compter du 01.01.2017.
III OU TROUVER CES INFORMATIONS FINANCIERES ?
L’article L 721-2 du CCH issu de la Loi ALUR ne précise pas où trouver ces informations.
C’est pourquoi une réponse Ministérielle est intervenue en date du 16.09.2014 et a indiqué que : « tout copropriétaire est en possession de ces informations » car elles peuvent être obtenues à partir de documents dont l’établissement est déjà rendu obligatoire par la loi sur la copropriété à savoir :
- Des annexes comptables à la convocation de l’Assemblée générale que reçoivent les copropriétaires ;
- L’Etat daté qui est à fournir à l’acheteur au moment de l’acte de vente définitif c'est-à-dire environ 3 mois après avoir signé le compromis de vente ;
- Les documents comptables que le syndic doit établir selon les dispositions prévues par la loi qui régit la copropriété comme la comptabilité séparée faisant apparaître la position de chaque copropriétaire à l’égard du syndicat ;
IV A QUELLE DATE LES INFORMATIONS FINANCIERES DOIVENT ELLES ETRE ETABLIES ?
La Loi ALUR n’apporte aucune précision sur la date à laquelle les informations financières exigées lors de la promesse de vente doivent être établies, laissant un vide juridique.
La réponse Ministérielle en date du 16.09.2014 est venue apporter la réponse suivante : « la date d’établissement de ces différentes informations comptables est celle du document comptable dont elle est issue ».
Cette réponse appelle deux conséquences pratiques selon la nature des documents exigés :
1/ Les informations relatives au montant des charges courantes et des charges hors budget prévisionnel payées par le copropriétaire vendeur au titre des deux exercices comptables précédant la vente et celles relatives à l’état global des impayés de charges au sein du SDC et de la dette vis-à-vis des fournisseurs sont datées de la clôture du dernier exercice comptable précédant la vente.
2/ Les informations relatives aux sommes pouvant rester dues par le copropriétaire vendeur au syndicat des copropriétaires et les sommes qui seront dues au syndicat par l’acquéreur et encore les informations relatives au fonds de travaux résultent de l’état daté et sont à la date de ce document.
V QUI DOIT ETABLIR LE PRE ETAT DATE ?
La Loi ALUR une fois de plus ne précise pas qui doit établir ce document.
La réponse Ministérielle du 16.09.2014 précise seulement que le copropriétaire est en principe en possession de ces informations néanmoins il s’avère que dans la pratique quotidienne, seuls les copropriétaires particulièrement diligents et prudents sont à même de retrouver ces documents et d’effectuer la recherche des informations.
De façon plus générale le copropriétaire vendeur se retrouve couramment à faire appel à son syndic, ne retrouvant plus ces documents ou ne sachant pas les exploiter.
De plus pour obtenir dés le compromis de vente, l’ensemble des informations financières visées au II de notre article, le vendeur a besoin notamment de l’Etat daté, or l’Etat daté qui est rappelons le à distinguer du Pré Etat daté, n’est à fournir que quelques mois plus tard pour la vente définitive, par le syndic.
Concrètement il faudra que les copropriétaires sollicitent auprès de leur syndic au plus tôt l’Etat daté afin de pouvoir en exploiter le contenu dés le compromis de vente.
En conséquence, dans la pratique ce sont donc les syndics qui se chargent de fournir ce pré-état daté.
Les syndics ont d’ailleurs désormais bien souvent intégré la préparation de ce document dans la liste des prestations particulières qu’ils sont susceptibles de facturer aux copropriétaires.
VI QUELLES SONT LES SANCTIONS EN CAS D’ABSENCE DU PRE ETAT DATE ?
C’est l’article L 721-3 du CCH qui vient préciser les sanctions applicables en cas d’absence d’annexe des documents financiers à la promesse de vente.
Cet article dispose que lorsque les documents mentionnés aux 1e, 2e et 4e de l’article L 721-2 à savoir les documents relatifs à l’organisation de l’immeuble et à la situation financière de la copropriété, l’attestation Loi Carrez, ne sont pas annexés à l’acte de promesse de vente conformément à l’article L 721-1 du CCH, alors le délai de réflexion ou de rétractation, prévu à ce même article, ne court qu’à compter du lendemain de la communication de ces documents à l’acquéreur.
Afin de conclure cet article, nous sommes tentés de mettre en évidence la complexité de la loi ALUR en ce qui concerne ici le « Pré-état daté » tant dans la préparation de ces documents que dans ces sanctions, laquelle peut être un frein à la signature du compromis de vente par les vendeurs directement ou par les agences immobilières.
Afin d’éviter de retarder la signature de la promesse, nous invitons les agences immobilières chargées de la vente de biens en copropriété à se préoccuper au plus tôt notamment au stade du mandat de vente de réunir l’ensemble des documents financiers soit auprès du vendeur lui-même soit auprès du syndic.
Maître I.SAGAND-NAHUM - Avocat à la Cour
Consultante en Droit Immobilier et Administratrice à la Chambre des Propriétaires de Vincennes (UNPI)
28, Boulevard de la Bastille à PARIS (75012)
Tel : 01 43 70 81 09 Fax : 01 44 40 40 45