Les règles juridiques en matière de location à un couple.
Lorsqu’un bailleur loue un local à usage d’habitation à un couple, les règles applicables seront différentes si le couple est uni par le mariage, par un PACS ou s’ils sont simplement concubins ou colocataires. Il est donc important de différencier le mariage, du PACS et du concubinage.
Ainsi, le PACS est un contrat conclu entre deux personnes tandis que le concubinage est une simple union de fait. Les concubins bénéficient de peu d’avantages.
Le PACS est défini à l’article 515-1 du Code civil comme « le contrat conclu par deux personnes physiques majeures, de sexe différent ou de même sexe, pour organiser leur vie commune. »
Tandis que le concubinage défini à l’article 515-8 du même Code est « une union de fait, caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité, entre deux personnes, de sexe différent ou de même sexe, qui vivent en couple ».
I – Le champ d’application du principe de co-titularité
1 – Le principe de co-titularité s’applique aux époux et partenaires pacsés
Le principe de co-titularité du bail défini à l’article 1751 du Code civil s’applique aux époux mais aussi aux partenaires liés par un PACS.
2 – Le principe de co-titularité ne s’applique pas aux concubins et colocataires
La cotitularité ne peut être que conventionnelle, c’est-à-dire expressément prévue au contrat de bail. Cependant, le concubin « notoire » qui peut justifier d’une union stable avec le locataire bénéficie d’une double protection:
- le contrat de bail continue à son profit si le logement est abandonné par son concubin
- le contrat de bail lui est transféré en cas de décès de son concubin
Le principe de cotitularité ne s’applique pas non plus aux colocataires à moins que la cotitularité ne soit prévue au contrat de bail comme pour les concubins.
II – Explication du principe de cotitularité tel que défini à l’article 1751 du Code civil
Il y a cotitularité du bail lorsque plusieurs personnes jouissent en même temps des mêmes droits sur un même local et sont tenus vis-à-vis du bailleur des mêmes obligations.
1 – Les époux et le principe de cotitularité
Le principe de cotitularité défini à l’article 1751 du Code civil est le suivant: le droit au bail du local qui sert effectivement à l’habitation des époux est réputé appartenir à l’un et à l’autre des époux, et ce quel que soit le régime matrimonial choisi par les époux.
Ainsi lorsqu’une personne signe un bail et se marie par la suite son conjoint est de plein droit automatiquement ajouté comme titulaire du bail, alors même qu’il n’était pas partie au contrat initial.
Lorsque le couple est déjà marié avant la signature du bail, le principe de cotitularité s’applique également alors même que le contrat est signé par un seul des deux époux.
2 – Les partenaires pacsés et le principe de cotitularité
Le principe de cotitularité de l’article 1751 du Code civil pose donc une protection étendue sur le logement des époux, qui s’applique également aux partenaires liés par un PACS à condition que les partenaires fassent une demande conjointe auprès du bailleur. Ainsi le principe de cotitularité s’applique automatiquement aux personnes mariées, et sur demande conjointe pour les partenaires pacsés.
Plusieurs conséquences vont découler de cette cotitularité à l’égard des locataires mariés ou pacsés mais aussi à l’égard du bailleur.
Comme énoncé précédemment, le principe de cotitularité ne s’applique pas aux concubins. Cela signifie qu’à défaut de signature conjointe du bail, seul le concubin signataire a la qualité de locataire. Ainsi en cas de défaut de paiement, le bailleur ne pourra pas se retourner contre le concubin qui n’a pas signé le contrat de bail.
3 - Les conséquences sur le bail en cours d’un locataire nouvellement marié ou pacsé
La cotitularité s’impose de plein droit au bailleur alors même que ce dernier ignore le changement de situation familiale du locataire.
En principe, le locataire est tenu d’informer le bailleur s’il se marie ou se pacse, mais il arrive que ce dernier ne l’informe pas. Ainsi, pour éviter que le bailleur ne subisse les conséquences d’une cotitularité qu’il ignore, l’article 9-1 de la loi du 13 décembre 2000 est venu rajouter que « les notifications ou significations faites par le bailleur sont de plein droit opposables au partenaire lié par un PACS au locataire ou au conjoint du locataire, si l’existence de ce partenaire ou de ce conjoint n’a pas été préalablement portée à la connaissance du bailleur ».
En effet, en vertu du principe de cotitularité, le bailleur est tenu de respecter la double notification aux époux s’il a été informé de l’existence d’un conjoint ou du partenaire pacsé. Mais dans l’hypothèse où le bailleur n’a pas été informé de l’existence du conjoint ou du partenaire pacsé, les notifications faites au seul locataire connu sont de plein droit opposables au conjoint ou au partenaire pacsé.
III – L’obligation pour le locataire d’informer le bailleur de l’existence d’un conjoint ou d’un partenaire pacsé
1 – L’obligation d’une véritable « démarche positive » d’information de la part du locataire
La preuve que l’information a bien été donnée au bailleur de l’existence d’un conjoint ou d’un partenaire pacsé repose sur le locataire. La jurisprudence exige en principe que l’information soit délivrée au bailleur par courrier sous la forme d’une lettre recommandée avec avis de réception. C’est ainsi que la jurisprudence exige une véritable « démarche positive » d’information de la part du locataire.
2 – Les conséquences en l’absence d’une véritable « démarche positive » d’information
En l’absence d’une véritable « démarche positive » du locataire, le bailleur pourra mettre en échec les tentatives des locataires de soulever des nullités de procédure au motif que les notifications n’auraient pas été faites aux deux époux ou aux deux partenaires pacsé.
Ne constitue pas « une démarche positive » du locataire, le seul fait que les quittances de loyer aient été établies en cours de bail au nom du locataire et de son épouse. Ainsi la Cour d’appel de Lyon dans un arrêt du 2 juillet 2015 a jugé que le commandement de payer délivré au seul mari était opposable à l’épouse.
Ne constitue pas non plus « une démarche positive », le simple fait que les loyers aient été payés par chèque bancaire au nom de l’épouse. Ainsi la Cour de cassation dans un arrêt du 29 octobre 2013 a jugé que la procédure d’expulsion engagée à l’encontre du locataire était opposable à l’épouse. Cela s’explique par le fait que le locataire n’avait pas informé directement le bailleur de son changement matrimonial et ne pouvait pas rapporter la preuve « d’une démarche positive » d’information, alors même que le bailleur n’ignorait pas l’existence de l’épouse (les chèques étaient signés en son nom).
IV - Les obligations des locataires en cours de bail
1 – Les obligations des époux
Un seul époux peut signer le bail et l’époux n’ayant pas signé le bail sera cotitulaire du bail par l’effet de l’article 1751 du Code civil. La conséquence étant que chacun des époux est tenu des obligations vis-à-vis du bailleur et notamment du paiement des loyers et des charges.
En vertu de l’article 220 du Code civil, les époux sont tenus solidairement des contrats qui ont pour objet l’entretien du ménage ou l’éducation des enfants. Tenus solidairement alors même que le contrat est signé uniquement par un des époux. Concrètement, cela signifie que le bailleur n’a aucune obligation de poursuivre les deux époux, il peut se retourner seulement contre un des époux pour obtenir le paiement des loyers et des charges. Ainsi, chacun est tenu vis-à-vis du bailleur de l’ensemble des obligations inhérentes au bail.
2 – Les obligations des partenaires pacsés
Ce régime s’applique également aux partenaires liés par un PACS en vertu de l’article 515-4 du Code civil: « les partenaires liés par un PACS sont tenus solidairement à l'égard des tiers des dettes contractées par l'un d'eux pour les besoins de la vie courante ».
3 – Les obligations des concubins
Même s’ils ont tous deux signé le contrat de bail, chacun reste tenu à titre personnel, sauf si le contrat de bail contient une clause de solidarité. Il est donc conseillé au bailleur de prévoir une telle clause lorsqu’il loue son local à des concubins.
V - La fin du bail
1 – La fin du bail par la délivrance d’un congé
a- La délivrance d’un congé par le locataire
Pour être valable, le congé doit être adressé au bailleur par chacun des époux ou chacun des partenaires pacsés. Ainsi, le congé donné par un seul des époux n’a aucun effet à l’égard de l’autre, qui reste titulaire du bail et ce même s’il n’habite plus les lieux.
b- La délivrance d’un congé par le bailleur
Le bailleur doit délivrer le congé aux deux époux ou partenaires pacsés. S’il souhaite le faire par courrier, il doit donc adresser deux lettres recommandées distinctes. A défaut, le congé est inopposable au conjoint ou au partenaire pacsé qui ne l’a pas reçu. L’accusé réception signé par un seul des conjoints ne peut pas engager l’autre alors même qu’il était destinataire de la lettre, le congé lui sera donc inopposable.
C’est pourquoi il est conseillé au bailleur de faire délivrer le congé par acte d’huissier. Cependant, le bailleur n’est pas tenu de la double notification s’il ignorait l’existence d’un conjoint ou d’un partenaire pacsé en cours de bail.
2 – La fin du bail par l’effet de la résiliation judiciaire
Le bail d’habitation peut être résilié à la suite d’une décision de justice. Que ce soit par l’effet d’une clause résolutoire en cas de non-paiement des loyers ou en cas de manquement aux obligations du locataire, le bailleur doit signifier tous les actes à chacun des époux ou partenaires pacsés. Cette obligation de la double notification lui incombe uniquement s’il connait l’existence des deux époux ou des deux partenaires pacsés.
La cotitularité dure jusqu’à la résiliation du bail, ainsi jusqu’à la résiliation du bail chacun est tenu des obligations inhérentes au bail. Cela signifie que dans l’hypothèse où uniquement un des époux ou des partenaires pacsés se maintient dans les lieux après la résiliation du bail, la cotitularité ayant cessé au terme du bail, seul celui qui se maintient dans les lieux reste tenu du paiement des indemnités d’occupation.
VI - Le sort du bail en cas de divorce ou de décès du locataire
1 – Les conséquences en cas de divorce ou de séparation de corps
La solidarité des époux cesse lorsque le jugement de divorce est devenu définitif. La transcription du divorce sur les registres de l’état civil marque le caractère définitif du jugement. C’est uniquement à partir de cette transcription que le jugement de divorce devient opposable aux tiers. Ainsi l’époux qui est divorcé et qui a quitté le logement loué, n’est plus redevable vis-à-vis du bailleur des obligations contractuelles.
Le bailleur ne pourra donc plus se retourner contre lui pour obtenir le paiement du loyer et des charges.
Il en est de même en cas de jugement de séparation de corps.
Concernant l’audience de conciliation, il s’agit de la première étape de la procédure de divorce où le juge autorise les époux à résider séparément et statue sur l’attribution du logement loué à l’un ou l’autre des époux. L’époux qui ne se voit pas attribuer le logement loué reste tout de même tenu du paiement des loyers et des charges, tant que le divorce n’est pas définitif c’est-à-dire tant que les formalités de transcription n’ont pas été accomplies. Ainsi jusqu’à que ce que le jugement de divorce soit devenu opposable aux tiers, le bailleur peut poursuivre également l’époux qui n’occupe plus le logement.
Après la phase de conciliation, l’un des époux peut poursuivre la procédure de divorce en faisant délivrer à l’autre une assignation en divorce.
Par application de l’article 1751 alinéa 2 du Code civil, le droit au bail du local peut être attribué par la juridiction saisie de la demande en divorce ou en séparation de corps à l’un des époux. Pour cela, la juridiction saisie prendra en considération les intérêts sociaux et familiaux en cause. Il faut savoir que l’attribution judiciaire du droit au bail à l’un des époux diminue les garanties de paiement du bailleur dans la mesure où la solidarité entre époux disparait une fois la transcription du divorce effectuée. Cependant, le divorce n’a aucune incidence sur la caution qui reste quant à elle tenue vis-à-vis du bailleur.
2 - Les conséquences en cas de décès
Outre un droit de jouissance temporaire qui permet de rester gratuitement dans les lieux pendant un an, le conjoint survivant bénéficie d'un droit exclusif sur le bail d’habitation sauf s’il y renonce expressément (article 1751 alinéa 3). Le partenaire lié par un PACS bénéficie lui aussi de ce droit exclusif sur le bail, sauf renonciation expresse.
Concernant les concubins, le contrat de location est transféré au concubin notoire qui vivait avec le locataire depuis au moins un an à la date du décès.