Si le mouvement de libéralisation du divorce n’est pas nouveau, les réformes récentes n’ont eu de cesse de le prolonger et de l’amplifier. Cette libéralisation touche autant les conditions que les modalités du divorce.
Le divorce par consentement mutuel a fait l’objet d’une déjudiciarisation par la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle du 18 novembre 2016, ce qui signifie que dorénavant, le juge ne statuera plus sur le sort des couples qui accepte la séparation et sur les conséquences de celle-ci.
Le divorce par consentement mutuel est donc réalisé par le biais d’une convention établie entre les époux et par leur avocat respectif, qui sera enregistré par un notaire. Comme l’indique l’article 229-1 du Code civil, la convention de divorce prend la forme « d’un acte sous signature privée contresigné par leur avocats et établi dans les conditions prévues à l’article 1374 ».
C’est justement la forme de l’acte qui pose la question d’un possible divorce à distance. La rédaction des conventions peut certes se faire à distance, mais leur signature nécessite-t-elle la présence obligatoire physique des époux et des avocats ?
C’est la loi n°2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice qui permet de répondre à cette question.
Les contrats conclus par voie électronique reconnus et régis par l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, énonce à l’article 1174 du Code civil qu’un contrat conclu sous forme électronique lorsqu’un acte authentique est requis est valide, même lorsque la signature écrite à la main est exigée puisque le contractant peut l’apposer sous forme électronique.
En d’autres termes, cet article autorise la signature électronique dans toute relation contractuelle qui en nécessite l’établissement.
Cependant, une exception générale demeurait à cette autorisation inscrit à l’article 1175 du Code civil pour « les actes sous signature privée relatifs au droit de la famille et des successions ». Celle-ci emportait donc l’impossibilité pour les avocats et leur client de conclure des conventions de divorce réalisées par acte d’avocats.
Ainsi, le divorce par consentement mutuel ne pouvait se réaliser que par convention de divorce papier signés par les avocats et les époux ensembles.
La loi du 23 mars 2019 est venue modifier le régime mis en place depuis 2016. En effet, est venu s’ajouter à l’article 1175 du Code civil, une exception à l’exception. Désormais, les actes sous signature privée relatifs au droit de la famille et des successions sont toujours exclus du régime des contrats conclues par voie électronique, à l’exception des « conventions sous signature privée contresignées par avocats en présence des parties et déposées au rang des minutes d’un notaire »
Cet ajout permet donc, dès maintenant, de procéder à la signature des conventions de divorce par consentement mutuel de façon électronique.
Pour être suffisamment clair, il faut préciser que cette possibilité de signer les conventions de divorce par voie électronique n’emporte pas l’autorisation de procéder à cette signature « à distance », c’est-à-dire sans la présence de toutes les parties.
En effet, la voie électronique est simplement la forme que va prendre la convention, c’est-à-dire un document électronique. La présence des parties reste nécessaire et le devoir des avocats non plus : ils devront s’assurer au moment de la signature de la convention que le consentement est libre et éclairé.
Finalement, pour appuyer cette réponse, la citation de l’assemblée générale du Conseil national des barreaux le 8 février 2019, semble pertinent : « La convention de divorce par consentement mutuel sans juge doit être signée en présence physique et simultanément, par les parties et les avocats rédacteurs désignés à la convention, sans substitution ni délégation possible ». Le divorce par consentement mutuel à distance n’est donc pas légal.