Avoir la capacité naturelle de vivre, tel est le point de départ de la personnalité juridique. En naissant, nous sommes titulaire de droit et débiteur d’obligation, nous participons tous à la vie juridique.
Or, pour obtenir la personnalité juridique, le principe est simple : l’enfant à naître doit être vivant et viable. (Article 318 et 725 alinéa 1 du Code civil)
LA PROCÉDURE DU DIVORCE À L’AMIABLE POUR UNE FEMME ENCEINTE
Depuis le 1er janvier 2017, le divorce par consentement mutuel peut se faire sans la présence d’un juge. En cas d’accord sur le principe et les effets de la rupture, les époux assistés par leur propre Avocat Divorce rédigent une convention dans laquelle sera fixé leur divorce. (Article 229-2 du Code civil).
Cette convention prend la forme d’un acte sous signature privé contresigné par avocats, établi dans les conditions prévues à l'article 1374 du Code civil et sera ensuite enregistré au rang des minutes d’un Notaire.
Rien n’interdit légalement une femme enceinte à avoir recours à un divorce, que ce dernier soit à l’amiable ou non. La procédure reste donc identique pour toutes les femmes. Une convention sera rédigée, un enregistrement sera effectué. Aucun acteur juridique ne peut de surcroît s’opposer à une telle décision sous prétexte de la maternité future d’une épouse. Néanmoins, l’enfant à naître ne pourra être inclus dans la convention. Ne possédant pas de personnalité juridique au sens de l’article 218 et 725 alinéa 1 du Code civil, il est alors impossible de statuer sur son sort.
Certes, même si une convention de divorce est prédisposée au futur, elle ne peut le prédire que par des hypothèses concrètes. Or, en cas d’avortement spontané ou si l’enfant à naître décède, il ne pourra être considéré comme tiers au contrat.
Deux possibilités sont alors envisageables :
- attendre la naissance de l’enfant ;
- divorcer sans que l’enfant ne soit inclus dans la convention.
LES CONSÉQUENCES DE L’ENFANT À NAÎTRE AU SEIN D’UNE CONVENTION DE DIVORCE
L’exclusion de l’enfant à naître de ladite convention peut se révéler problématique pour les parties.
- L’autorité parentale ne saurait être fixée : cette autorité, définie par l’article 371-1 du Code civil comme un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant telle que la scolarité, la santé, la religion ;
- la résidence de l’enfant ne pourrait être définie : il en va ainsi de la résidence principale, mais aussi du droit de visite et d’hébergement des époux ;
- le système de garde ne peut être prévu : que ce soit une garde partagée, exclusive, ou par un tiers ; rien ne pourra être mentionné dans la convention en ce sens ;
- Aucune pension alimentaire n’incombe aux parties : cette somme d’argent qui peut être octroyée à l’un ou l’autre des époux pour couvrir l’état de besoin de l’enfant sera inexistante.
Cependant, si un enfant vient à naître au cours de la procédure de divorce à l’amiable, il acquiert alors la personnalité juridique et sera inclus dans la convention de divorce. Dès lors, une pension alimentaire pourra être envisagée, un système de garde pourra être fixé...
Il est donc préférable d’attendre la naissance de l’enfant. Néanmoins, l’intervention d’un juge a posteriori du divorce est possible pour statuer sur son sort.
LES RECOURS APRÈS LE DIVORCE À L’AMIABLE RELATIFS AUX ENFANTS
Si un litige survient sur la paternité de l’enfant à naître ; elle n’est certes pas reconnue dans la convention de divorce, mais reste incontestable dans certaines situations.
Il convient dès lors de distinguer :
► Le cas où l’époux serait le père de l’enfant
En vertu des dispositions de l’article 314 alinéa 1 du code civil, l'enfant est présumé conçu dans le mariage lorsqu'il est né à partir du 180ème jour qui suit la célébration du mariage et jusqu'au 300ème jour qui suit la dissolution du mariage. Dans cette hypothèse, une présomption de paternité repose sur le mari qui n’aura pas à prouver qu’il est le père de l’enfant à naître, il est automatiquement considéré, présumé comme le géniteur biologique de ce dernier.
► Le cas où un tiers au mariage serait le père de l’enfant
Dans le cas où l’époux n’est pas le père de l’enfant, ce dernier à la possibilité de reconnaître l’enfant avant la naissance dans n’importe quelle mairie auprès du service de l’état civil. Il peut également reconnaître l’enfant lors de la déclaration de paternité effectué dans les trois jours suivants la naissance de l’enfant.
Si une présomption de paternité existe déjà, il est possible de contester cette filiation en rapportant la preuve que le père présumé n’est pas le père biologique de l’enfant. Il faudra saisir le Tribunal judiciaire du domicile de la personne à l’égard de laquelle on souhaite établir ou contester sa filiation (Article 42 du Code de procédure civile) en apportant la preuve de cette contestation par tous moyens.
Si un litige survient sur des dispositions relatives à l’enfant, à son entretien ou à son éducation, les parents lésés peuvent saisir au Juge des affaires familiales qui fixera des mesures pour protéger l’enfant qui vient de naître. Il pourra dès lors fixer une résidence pour l’enfant, définir un système de garde adapté ou encore obliger le versement d’une pension alimentaire à l’une des parties.
Le sort de l’enfant à naitre est donc inexistant au sein d’un divorce. Seul le juge a posteriori du divorce sera compétent pour attribuer des prérogatives à cette nouvelle personnalité juridique.
par Me Alexia Greffet, Avocat Divorce et Mlle Laure Bourdieu, juriste