Sous l'impulsion du droit de l'Union (CJUE 15 juillet 2016, n° C-458/14 Promoimpresa), le Code Général de la Propriété des Personnes Publiques (art. L2122-1-1 et suivants), prévoit depuis 2017 l'obligation pour toute collectivité de mettre en oeuvre une procédure d'appel à manifestation d'intérêts en amont de la mise à disposition du domaine public à un opérateur qui a vocation à y exploiter une activité économique.
Facialement, la législation n'impose une telle procédure que lorsque la mise en concurrence concerne le domaine public, alors même que la Cour de Justice de l'Union ne distingue pas entre le domaine public et le domaine privé, ce qui conduisait trois réponses ministérielles à préconiser, par prudence, une telle mise en concurrence sur le domaine privé (rép. min. à la QE n° 12868, JOAN du 29 janv. 2019, p. 861 – rép. min. à la QE n° 13180, JO Sénat du 30 janv. 2020, p. 537 – rép. min. à la QE n° 16130, JO Sénat du 10 sept. 2020, p. 4096).
Par deux arrêts rendus récemment, le Conseil d'Etat tranche la difficulté.
Par un premier arrêt du 2 décembre 2022 (CE 2 décembre 2022, n° 460100), le Conseil d'Etat précise que la mise à disposition du domaine privé n'a pas à faire l'objet d'une mise en concurrence quelconque, le contrat de mise à disposition porterait-il sur un bien rare et non substituable.
Par une second arrêt rendu le même jour (CE 2 décembre 2022, n° 455033), le Conseil d'Etat précise le régime applicable aux mises à disposition du domaine public conclues avant 2017, en précisant que seuls les biens dont le caractère peu ou pas substituables devaient faire l'objet d'une mise en concurrence.
En d'autres termes, l'état du droit est aujourd'hui cristallisé comme suit :
- Pour les contrats passés avant 2017 :
- Sur domaine privé : Pas d'AMI
- Sur domaine public en vue d'une exploitation économique : nécessité de dénoncer le contrat existant si la dépendance et peu ou pas substituable
- Sur domaine public sans exploitation économique : pas d'AMI
- Pour les contrats passés depuis 2017 :
- Sur domaine privé : Pas d'AMI
- Sur domaine public en vue d'une exploitation économique : AMI systématique
- Sur domaine public sans exploitation économique : pas d'AMI
Reste toutefois un point d’attention.
Il est en effet constant que, par des stipulations imposant au cocontractant des sujétions quant à l’objet, à la qualité ou la tarification de l’activité exploitée sur le domaine, le contrat d’occupation peut révéler le fait que l’activité exploitée est érigée en service public.
Une telle situation est susceptible de remettre en cause la qualification du contrat (en réalité une DSP) et du domaine (qui reste affecté à un service public et donc relève potentiellement du domaine public).