Cumulus dans les combles d’une copropriété, empiètement ou appropriation des parties communes ?

Publié le 18/08/2015 Vu 6 868 fois 0
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La pose de cumulus dans les combles pour un copropriétaire installé au dernier étage est elle considérée comme une appropriation ou un seul empiètement des parties communes ?

La pose de cumulus dans les combles pour un copropriétaire installé au dernier étage est elle considérée

Cumulus dans les combles d’une copropriété, empiètement ou appropriation des parties communes ?

Il convient de s’intéresser à deux arrêts qui ont été rendus en droit de la copropriété par la Cour d’Appel de Paris en juin 2014, et la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence en octobre 2014.

Ces deux arrêts abordent la question spécifique du sort des combles et des parties communes, lorsque ces derniers font l’objet d’installations posées par l’un des copropriétaires habitant au dernier étage, ce dernier considérant alors qu’il peut aménager les combles, en tout ou en partie, pour y poser des installations techniques tels que des cumulus.

Dans l’une et l’autre des affaires, exposées dans la jurisprudence de la Cour d’Appel de Paris comme dans celle de la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence, le copropriétaire du dernier étage avait pris soin d’installer des cumulus dans les combles.

Concernant la jurisprudence de la Cour d’Appel de Paris, une S.C.I., la S.C.I. HELOISE, était propriétaire dans un immeuble en copropriété de lots se trouvant au sixième et dernier étage de l’immeuble concerné.

La S.C.I. avait entrepris d’importants travaux de ses différents locaux au dernier étage et elle avait sollicité l’autorisation de faire réaliser une évacuation des eaux usées de son studio en traversant le plancher du couloir commun du sixième étage pour se raccorder à une canalisation commune, autorisation qui lui avait été refusée par assemblée générale du 25 juin 2008, annulée par la suite.

La S.C.I. a alors procédé au raccordement de son studio à la colonne d’évacuation d’eaux usées commune, en traversant le couloir, partie commune.

Cependant, dans ce même temps, la S.C.I. HELOISE avait réuni plusieurs lots du dernier étage et installé dans les combles, situés au-dessus de ses locaux, deux chauffe-eaux reliés par diverses canalisations, d’une part à son appartement et, d’autre part, à son studio.

Le syndicat avait alors engagé une procédure de référé à l’encontre de ladite S.C.I. pour demander la restitution des parties communes qu’elle s’était appropriée dans les combles et, la remise en état antérieure des lieux pour des travaux réalisés sans autorisation préalable de l’assemblée générale.

Or, par assemblée générale qui s’en était suivie, les copropriétaires, par une résolution dite résolution numéro 11, avait rejetés la demande d’autorisation sollicitée par la S.C.I. pour la réalisation d’une évacuation des eaux usées passant par le plancher du sixième étage et par une autre résolution, la résolution numéro 35, avait autorisé le syndic à agir à l’encontre de la S.C.I. suite aux travaux effectués par cette dernière sur les parties communes.

Dans le cadre du procès qui s’en suivra, l’une des questions majeures sera effectivement de savoir si, dans le cadre d’une assemblée générale, un copropriétaire vient à solliciter la pose d’installation dans les combles, est-il alors à ce moment-là question d’empiètement ou d’appropriation des parties communes.

En effet, dans l’hypothèse d’un empiètement, le vote de l’article 25 de la Loi de 1965 régissant le droit de la copropriété devrait suffire mais, à défaut, c’est un vote au titre de l’article 26 qui aurait vocation à s’imposer.

L’approche est alors purement factuelle car, afin justement d’être interprétée, la question est de savoir s’il y a empiètement ou appropriation.

Concernant l’affaire de la S.C.I. évoquée devant la Cour d’Appel de Paris en juin 2014, il était constaté dans les combles, au-dessus des lots de ladite S.C.I., la présence de deux cumulus électriques, l’un de cent litres et l’autre de plus grande dimension, dont les tuyaux rejoignaient lesdits lots, ainsi que de carreaux de plâtre qui obstruaient cette portion des combles et effectuaient une division entre les combles principaux et ceux situés au-dessus de l’appartement de la S.C.I.

Le syndic a fait alors valoir que les deux cumulus installés dans les combles, parties communes, ayant nécessité le percement du plancher haut de l’appartement et du studio de ladite S.C.I. pour mettre le branchement des canalisations de ces deux cumulus aux installations sanitaires desdits logements, affecteraient les parties communes et que les travaux ayant été réalisés sans autorisation de l’assemblée générale, il serait fondé à demander la démolition avec remise en état, sans avoir même à établir l’existence d’un préjudice.

Le même syndic fait valoir que la privatisation d’une partie des combles par l’édification d’un mur constituerait une appropriation des parties communes et demande également la démolition du mur dont s’agit.

C’est en ce sens que la Cour d’Appel de Paris considère que les deux cumulus installés par la S.C.I. dans les combles, parties communes, ainsi que les tuyaux fixés sur les chevrons de la charpente et pénétrant dans ces lots par le percement du plancher haut desdits lots, affectent les parties communes et nécessitent une autorisation préalable de l’assemblée, que la S.C.I. n’a jamais sollicitée.

De telle sorte que le syndicat est bien fondé à demander la suppression desdits cumulus et la remise en état.

La cour considère surtout que la pose de cloisons, et d’une trappe par ailleurs, génère véritablement une appropriation des parties communes et, par conséquent, si vote il devait y avoir à l’assemblée générale, celui-ci ne pouvait être fait qu’à la majorité absolue, car la pose de cumulus et, surtout, la pose d’un mur visant à isoler et à créer une division entre les combles principaux et ceux situés au-dessus de l’appartement en question sont une véritable source d’appropriation.

Ainsi, non seulement l’installation est illicite mais, de surcroît, si celle-ci devait faire l’objet d’un vote à l’assemblée générale, il est bien évident que ce vote devrait se faire à la majorité absolue car nous sommes bel et bien en présence d’une appropriation et non pas d’un empiètement.

A contrario, en l’absence de mur, tout laisserait à penser qu’il n’y a pas d’appropriation.

C’est d’ailleurs, ce qu’a décidé la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence dans une décision d’octobre 2014, dans laquelle les faits étaient à peu près similaires.

Ainsi, dans une résidence, le propriétaire d’un appartement avait installé sans aucune autorisation préalable des chauffe-eaux dans les combles et avait été contraint par décision de justice, en référé, à procéder à un retrait et à une remise en état des lieux.

Ce dernier a alors sollicité à plusieurs reprises, par assemblée générale, l’autorisation a posteriori de laisser les chauffe-eaux et les canalisations en question dans les combles.

Après plusieurs assemblées générales au cours desquelles ces résolutions étaient rejetées, cette résolution a été abordée un nouvelle fois en 2011,

Or, finalement, le vote est revenu favorable et a été présenté sous le biais de l’article 25 et non de l’article 26.

La question était donc de savoir si cette autorisation a posteriori de poser dans les combles, parties communes, plusieurs cumulus avec le passage des canalisations nécessaires, gaines électriques et du raccordement de toute sujétion pour permettre leur fonctionnement, devait se faire par le biais de l’article 25, dans le cadre de l’assemblée générale, ou par le biais de l’article 26.

Il convient de rappeler que l’article 25b, de la Loi du 10 juillet 1965 impose de voter à la majorité absolue, c’est-à-dire la majorité des voix de tous les copropriétaires, l'autorisation donnée à certains copropriétaires d'effectuer à leurs frais des travaux affectant les parties communes et conformes à la destination de l’immeuble.

L’article 26, quant à lui, requiert la majorité renforcée des deux tiers des voix de tous les copropriétaires pour autoriser des travaux affectant les parties communes, lorsqu’ils sont payés par le syndicat des copropriétaires.

Ainsi, la question était de savoir si, oui ou non, les installations en litige pouvaient être considérées comme des empiètements ou des appropriations.

C’est ainsi que la résolution en question, résolution numéro douze, avait fait l’objet d’un vote favorable sur la base de l’article 25.

C’est dans ces circonstances que plusieurs copropriétaires s’estimant lésés ont engagé une action afin d’obtenir l’annulation de la résolution validant a postériori la pose des installations litigieuses,

Ainsi, dans le cadre de leur appel, les demandeurs ont évoqués le fait qu’ils considéraient que l’article 26 avait vocation à s’appliquer lorsqu’il y avait une véritable appropriation des parties communes par l’un des copropriétaires de la résidence, ce qui a été tenté d’être démontré par lesdits demandeurs, en rappelant que le copropriétaire doit jouir des parties communes selon les dispositions du règlement de copropriété.

Suivant ce raisonnement, un copropriétaire ne peut s’approprier une cour, des combles, parties communes, la jurisprudence rappelant notamment qu’un propriétaire ne peut s’approprier une cour intérieure classée par le règlement dans les parties communes.

Le copropriétaire doit donc respecter les droits des autres copropriétaires et, par là-même s’interdire de s’approprier une partie commune pour en faire un usage privatif ou d’empêcher le droit d’usage concurrent des autres copropriétaires, de même, lorsque des travaux sont effectués et qu’ils entrainent l’appropriation des parties communes, comme le soulève très justement d’ailleurs l’arrêt de la Cour d’Appel de Paris de juin 2014, sus-évoqué.

La jurisprudence souligne également qu’il y a matière à considérer qu’il y a appropriation lorsque les travaux affectent les parties communes avec une emprise telle que celle-ci peut s’analyser comme une véritable aliénation et une atteinte à la destination de l’immeuble ou des parties communes en question.

Il est bien évident que, si les parties communes en question se trouvent, du fait des travaux conséquents, soustraites à leur destination initiale, et que le droit de jouissance des autres copropriétaires disparait, il est question d’appropriation et certaines jurisprudences, certes anciennes, avaient évoqué le fait que des installations importantes pouvaient être considérées comme des appropriations en tant que telles.

Afin de soutenir cette approche d’appropriation, et étant précisé que dans le cas d’espèces de l’arrêt la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence, il n’y avait pas de mur venant isoler et séparer les installations litigieuses du reste des parties communes, alors que c’était pourtant bel et bien le cas dans les faits de l’espèce de l’arrêt de la Cour d’Appel de Paris, les demandeurs ont évoqué un certain nombre d’arguments.

Le premier argument était de considérer que l’appropriation objective matérielle des parties communes était acquise en l’état notamment d’installations extrêmement importantes.

En deuxième argument, a été mise en avant l’idée d’une appropriation subjective car, de toute évidence, le copropriétaire litigieux n’avait pas manqué de se considérer comme le véritable propriétaire des combles en y apposant bon nombre d’installations et, même à certains endroits et à certains moments, en fermant l’accès au combles par le biais d’un cadenas, ce qui avait d’ailleurs été constaté par un procès-verbal de constat.

Concernant l’atteinte au règlement de copropriété, il a été imaginé que le règlement de copropriété avait été affecté en venant à considérer que les travaux en question n’étaient pas conformes à la destination de ladite partie commune.

Il n’était pas question d’envisager une destination juridique de ladite partie commune mais plutôt une destination technique, puisqu’il était soutenu que les combles en question constituaient un vide de charpente visant à protéger les lieux de vie du contact direct avec l’extérieur, en atténuant considérablement les variations de température et d’humidité.

L’objectif était alors de soutenir que lesdites installations techniques, notamment par le biais de bon nombre de percées de la dalle béton du plancher des combles, créaient des atteintes en termes de sécurité et d’isolation

La Cour d’Appel d’Aix-en-Provence ne retient pas cette argumentation et reste cantonnée à une approche juridique et objective de l’appropriation,

Elle considère qu’une analyse littérale de la résolution démontre qu’il ne s’agissait nullement de concéder au copropriétaire indélicat la jouissance exclusive et privative des parties communes, puisqu’en contrepartie de l’autorisation qui leur était donnée, les intéressés avaient pour obligation de justifier d’une installation aux normes et sécurisée et de ne pas porter préjudice au syndicat des copropriétaires dans la jouissance des parties communes.

Dès lors, la Cour considère que la résolution en litige n’avait pas pour objectif de violer le règlement intérieur en modifiant la consistance et les caractéristiques des parties communes.

La Cour souligne également que les travaux visés dans la résolution en litige ont été exécutés dans les parties communes mais aux frais exclusifs des copropriétaires concernés, lesdits travaux étant conformes à la destination d’habitation des lots et n’ayant nullement pour but, ni de changer la destination (juridique) des parties communes, ni de générer une appropriation de ces mêmes parties communes au seul bénéfice du copropriétaire en question.

Par voie de conséquence, la Cour considère que c’est par une bonne appréciation de la cause qu’il y avait vocation à considérer que le vote de l’installation visant à autoriser a posteriori le copropriétaire en question de poser dans les combles, parties communes, plusieurs cumulus avec le passage de canalisations nécessaires, de gaines électriques, du raccordement et de toute sujétion pour permettre leur fonctionnement, pouvait être votée à juste titre à la majorité prévue à l’article 25-b de la loi du 10 juillet 1965.

De telle sorte que la Cour juge qu’il n’y a pas appropriation par la simple pose dans les parties communes de cumulus et d’installations électriques, l’appropriation n’étant pas caractérisée.

Les deux jurisprudences évoquées dans cet article vont dans le même sens, puisque la Cour d’Appel de Paris, quant à elle, considérait qu’il y avait bel et bien appropriation, non pas tant par l’existence et la pose de chauffe-eaux, mais, surtout, par la pose de carreaux de plâtre qui ont obstrué la portion des combles en question, en effectuant une division des combles principaux.

Ainsi, ces deux arrêts apportent une certaine précision sur les installations pouvant être sources de litige dans les parties communes et combles d’un immeuble assujetti à un règlement de copropriété, dans lequel il y a lieu de considérer que s’il n’y a pas d’appropriation, le vote visant à autoriser les installations en question doit se faire à l’article 25, alors que dans l’hypothèse où une véritable appropriation se ferait, le vote doit se faire à la majorité de l’article 26.

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