En matière fiscale, c’est l’ordonnance en date du 25 mars 2020 n°2020-306 qui régit l’action administrative.
La première conséquence est la suspension des délais de prescriptions.
Avant d’exposer les incidences de cette crise sanitaire en matière fiscale, il convient de définir les notions de droit de reprise et de prescription.
La prescription se traduit, pour reprendre les termes du droit civil, en un mode d'extinction d'un droit résultant de l'inaction de son titulaire pendant un certain laps de temps.
Passé un certain délai, l’administration fiscale perd le droit de réclamer des sommes au contribuable.
En matière fiscale, la prescription va de pair avec la notion de droit de reprise.
Parce que le système français est déclaratif, l’administration fiscale a le droit de contrôler les bases d’imposition et les revenus déclarés par les contribuables.
Ce droit est ce que l’on appelle le droit de reprise. Mais ce droit est limité dans le temps, c’est qu’intervient la prescription.
Ainsi selon, la catégorie d’impôt et de situation dans laquelle se trouve le contribuable ce droit de reprise et de contrôle, peut être de 3, 6 ou 10 ans, délai qui s’applique à partir de l’année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due.
Il s’agit des prescriptions triennale, sexennale et décennale.
Or, du fait de cette crise sanitaire, l’ordonnance précitée a suspendu les délais de prescription.
Ainsi la documentation administrative BOI – DJC- COVID19-20 n°10, 24-06-2020 BOI-DJC-COVID19-20 n°20, 24-06-2020 a suspendu les délais de prescription tel que suit :
Les délais de prescription suspendus sont applicables aux procédures de contrôle fiscal lorsque la prescription est acquise au 31 décembre 2020. Cette suspension s'applique non seulement aux rectifications mais également aux intérêts de retard, majorations et amendes.
En pratique, sont concernés les délais de reprise arrivant à expiration le 31 décembre 2020 notamment pour :
- la prescription sexennale prévue à l'article L.186 du livre des procédures fiscales (LPF) ;
- la prescription triennale prévue au premier alinéa de l'article L. 169 du LPF, à l'article L. 172 G du LPF, au premier alinéa de l'article L. 176 du LPF et à l'article L. 180 du LPF ;
- la prescription décennale prévue aux deuxième et cinquième alinéas de l'article L. 169 du LPF, au deuxième alinéa de l'article L. 176 du LPF et à l'article L. 181-0 A du LPF.
Ainsi le délai de reprise de l'administration est suspendu pour la période comprise entre le 12 mars 2020 et le 23 août 2020 inclus pour la seule année se prescrivant au 31 décembre 2020, et ce quelle que soit la date d'engagement du contrôle.
Exemple 1 : Date de la fin de la suspension : 23 août 2020.
La Durée de suspension s’élève à 165 jours.
Prenons le cas de figure suivant, un contribuable se fait contrôler au titre de l’année 2017, la prescription est triennale.
L’administration fiscale aurait eu normalement jusqu’au 31.12.2020 pour lui adresser la proposition de rectification qui viendrait valablement interrompre la prescription.
Au-delà de ce délai, soit le 31.12.2020, l’administration n’aurait pu réclamer aucune somme, son droit de reprise serait prescrit.
Maintenant, en quoi ces dispositions consécutives à la crise sanitaire ont modifié les délais de prescription.
Reprenons notre exemple, du fait de cette suspension de 165 jours, la proposition de rectification devra être adressée au plus tard le 14 juin 2021 (soit 31 décembre 2020 + 165 jours) pour interrompre valablement la prescription.
Exemple 2 :
Un contribuable se fait contrôler ses revenus au titre de l’année 2014. Il reçoit une proposition de rectification le 15 décembre 2017, qui interrompt dans les délais la prescription triennale.
A compter de la réception de la proposition le 15 décembre 2017, s’ouvre un nouveau délai triennal qui permet à l’administration fiscale de mettre en recouvrement les impositions supplémentaires, soit dans notre exemple jusqu’au 31.12.2020. Or, l’intervention de cette crise sanitaire ainsi que des dispositions prises liées à l’état d’urgence sanitaire, font qu’en l’espèce, le délai pour mettre en recouvrement les sommes dues expirera le 14 juin 2021 (année 2017 + 3 ans + 165 jours).
Maître AFLALO Nathalie
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