~~Les cas exposés au présent partent du même postulat, une banque consent à une société, un ou plusieurs prêts, pour lesquels, plusieurs personnes, les cofidéjusseurs se rendent cautions solidaires.
Les questions qui se posent sont les suivantes :
- Un cofidéjusseur peut-il exploiter la disproportion de l’engagement de l’autre caution ?
- Un cofidéjusseur peut-il arguer de ce que l’existence des autres cautionnements a été la condition déterminante de son propre engagement en qualité de caution ?
En clair, quels sont les risques pour chacune des cautions prises individuellement, à l’intérieur de ce groupe que constitue l’ensemble des cofidéjusseurs ?
D’une manière générale, le code de la consommation et le code civil enserrent de manière stricte les engagements des personnes physiques en qualité de caution. Rappelons-le avec force, s’engager en qualité de caution est acte important pouvant lorsqu’il est pris à la légère avoir des conséquences financières irrémédiables.
C’est ainsi qu’aux conditions de forme imposées par la loi, les engagements des cautions doivent proportionnés aux biens et revenus des cautions. Il s’agit d’éviter que les cautions ne se trouvent engagées pour des montants excédant leur ressources et patrimoine.
Cette exigence de proportionnalité est inscrite à l’article L341-4 du Code de la Consommation.
Ce qui nous amène à notre première affaire, où pour la première fois la Cour de Cassation, 27 février 2015, °13-13709 a tranché la question de savoir si une caution assignée par une Banque pouvait dans le cadre de sa défense se prévaloir de la perte de toute subrogation à ses droits à l’égard de l’autre caution, au visa de l’article 2314 du Code Civil.
L’article 2314 du Code Civil dispose que la caution est déchargée lorsque la subrogation aux droits, hypothèque et privilège du créancier ne peut plus par le fait de ce même créancier s’opérer en faveur de la caution.
En d’autres termes cet article sanctionne le créancier qui a fait perdre à la caution un droit préférentiel sur lequel elle pouvait légitimement compter au moment de la signature de la caution.
En l’espèce, une Banque consent 4 prêts à une société X, le gérant Monsieur Y et son frère Monsieur Z se portent cautions solidaires desdits prêts.
Monsieur Z est déchargé de son engagement en qualité de caution, sur le fondement de l’article L341-4 du Code de la consommation précité. Son engagement était manifestement disproportionné par rapport à ses biens et revenus.
Par suite, Monsieur Y était assigné au paiement, en conséquence de la défaillance de Monsieur Z.
La Cour de Cassation sur ce point précis estime que la sanction prévue par l’article L341-4 du Code de la Consommation, prive le contrat de cautionnement d’effet tant à l’égard du créancier (la Banque) que de ses cofidéjusseurs.
En effet, lorsqu’une Banque ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement car disproportionné, la sanction est la nullité de ce contrat ; ce qui signifie que ce contrat n’a jamais existé, n’a jamais produit d’effet.
N’ayant jamais existé, et en se positionnant chronologiquement au jour de la signature de son contrat de cautionnement, Monsieur Y se retrouve seul face à la Banque, Monsieur Z ayant disparu.
Dès lors, Monsieur Z ne peut revendiquer le bénéfice de l’article 2314 du Code Civil.
L’autre affaire tranchée par la Cour de Cassation, 18 mars 2014, N°13-11733 concerne quant à elle une caution Madame X qui s’était engagée avec sept autres cofidéjusseurs.
La société est mise en liquidation judiciaire, 5 cofidéjusseurs sont déchargés de leurs engagements.
La Banque décide d’assigner Madame X en paiement.
La Cour d’appel confirmée par la Cour de Cassation estimant que la caution ne s’était engagée qu’en considération de l’existence des de sept autres cofidéjusseurs, avait prononcé la nullité de l’engagement de caution.
La Cour de Cassation confirme cet arrêt en soulignant que Madame X avait fait de l’existence des autres cautionnements souscrits la condition déterminante de son propre engagement.
Deux décisions, deux solutions différentes. Alors comment les appréhender, quelles leçons en tire ?
Ce que nous pouvons comprendre tout d’abord, c’est que le groupe constitué des cofidéjusseurs ne protège pas la caution prise individuellement.
Le groupe protège en définitive la Banque, laquelle dispose de plusieurs garanties.