Possibilité de l’envoi simultané d'une mise en demeure de déposer une déclaration et d'un avis ESFP

Publié le 08/11/2018 Vu 2 094 fois 0
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Possibilité de l’envoi simultané d'une mise en demeure de déposer une déclaration et d'un avis d'ESFP.

Possibilité de l’envoi simultané d'une mise en demeure de déposer une déclaration et d'un avis d'ESFP.

Possibilité de l’envoi simultané d'une mise en demeure de déposer une déclaration et d'un avis ESFP

Dans son arrêt n° 416676 du 24 octobre 2018, le Conseil d’Etat juge que l'administration peut, sans entacher d'irrégularité la procédure de contrôle, simultanément adresser au contribuable un avis l'informant de l'engagement d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle et le mettre en demeure de produire une déclaration de revenus catégoriels afférente à l'une au moins des années vérifiées, dès lors que cette mise en demeure ne peut être regardée comme participant du contrôle de cohérence entre les revenus déclarés par ce contribuable et sa situation patrimoniale, sa situation de trésorerie ou son train de vie, mais a seulement pour objet de permettre la réalisation de ce contrôle dans des conditions plus satisfaisantes s'agissant des revenus déclarés.

L’examen contradictoire de la situation fiscale personnelle (ESFP) conduit l’administration fiscale à contrôler la cohérence entre, d’une part les revenus déclarés et, d’autre part, la situation patrimoniale, la situation de trésorerie et les éléments du train de vie des membres du foyer fiscal, conformément aux dispositions de l’article L 12 du Livre des Procédures Fiscales (LPF). L’article précise que l’administration des impôts peut procéder à l’examen contradictoire de la situation fiscale des personnes physiques au regard de l’impôt sur le revenu, qu’elles aient ou non leur domicile fiscal en France, lorsqu’elles y ont des obligations au titre de cet impôt. Ce contrôle qui a pour but de vérifier la sincérité et l’exactitude de la déclaration d’ensemble des revenus, peut donc viser également une personne qui n’a pas son domicile fiscal en France.

Aux termes de l’article L 47 du LPF, un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d’une personne physique au regard de l’impôt sur le revenu, ne peut être engagé sans que le contribuable en ait été informé par l’envoi ou la remise d’un avis ; cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix.

L’article L 47 du LPF précise que l’avis envoyé ou remis au contribuable avant l’engagement d’un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle peut comporter une demande des relevés de compte.

Il a été jugé que la mise en œuvre de l’ESFP n’est pas subordonnée au dépôt préalable d’une déclaration par le contribuable. Cet examen peut ainsi être engagé, après l’expiration du délai de déclaration, afin justement de rechercher si un contribuable est soumis à une obligation déclarative en France.

Il résulte de ces dispositions que l'administration ne peut engager un contrôle visant à vérifier la cohérence entre, d'une part, les revenus déclarés et, d'autre part, la situation patrimoniale, la situation de trésorerie et les éléments du train de vie des membres d'un foyer fiscal avant l'expiration d'un délai raisonnable à compter de la réception, par le contribuable concerné, de l'avis l'informant de ce contrôle.

L’administration est donc tenue d’avertir le contribuable en temps utile. Ce temps utile, selon le Conseil d’État, est d’au moins deux jours entre la date de réception de l’avis de vérification et celle à laquelle commence effectivement le contrôle ; les samedis, dimanches et jours fériés ne devant pas être retenus dans le décompte du délai. En pratique, cet avis est envoyé par le vérificateur plusieurs jours avant le début des opérations.

Au cas particulier, les contribuables ont cédé, le 5 janvier 2009, l'intégralité des titres de la société qu'ils avaient constituée au cours de l'année 2000, pour un prix arrêté à 437 248 euros. Ils n'ont pas déclaré la plus-value de cession à l'occasion de la souscription de la déclaration d'ensemble des revenus de l'année 2009.

Par un courrier recommandé notifié le 27 avril 2012, ils ont été informés par l’administration fiscale qu'ils faisaient l'objet d'un examen de leur situation fiscale personnelle et le même jour, ils ont été mis en demeure, par un autre courrier recommandé signé du même inspecteur des finances publiques, de souscrire dans un délai de trente jours une déclaration des plus-values sur cessions de valeurs mobilières au titre de l'année 2009.

Estimant que ce second courrier marque le début du contrôle dont ils ont été avisés le même jour et qu'ils ont été ainsi privés de la garantie qui découle de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, tenant à l'existence d'un délai raisonnable entre la réception de l'avis de vérification par le contribuable et le début des opérations de contrôle, ils ont demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009 et 2010.

En effet à l’issue de l’examen de leur situation fiscale personnelle pour la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010, l'administration a adressé aux contribuables deux propositions de rectification relatives respectivement aux années 2009 et 2010, incluant notamment, au titre de l'année 2009, un rehaussement en base de 390 994 euros au titre de la plus-value de cessions des actions, des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, assortis de l'intérêt de retard et de la majoration de 40 % pour manquement délibéré.

Par un jugement du 21 juin 2016, le tribunal a rejeté leur demande, et par un arrêt du 19 octobre 2017, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel formé contre ce jugement.

Leur pourvoi est rejeté par le Conseil d’Etat. En effet le Conseil d’Etat juge que l'administration peut, sans entacher d'irrégularité la procédure de contrôle, simultanément adresser au contribuable un avis l'informant de l'engagement d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle et le mettre en demeure de produire une déclaration de revenus catégoriels afférente à l'une au moins des années vérifiées, dès lors que cette mise en demeure ne peut être regardée comme participant du contrôle de cohérence entre les revenus déclarés par ce contribuable et sa situation patrimoniale, sa situation de trésorerie ou son train de vie, mais a seulement pour objet de permettre la réalisation de ce contrôle dans des conditions plus satisfaisantes s'agissant des revenus déclarés. L’administration peut donc envoyer simultanément une mise en demeure de déposer une déclaration et un avis d'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle.

Le Conseil d’Etat rappelle que s'il résulte des dispositions article L. 12 du livre des procédures fiscales que le contrôle de la cohérence entre les revenus déclarés et la situation d'ensemble du contribuable, qui constitue l'objet de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, ne peut débuter avant l'expiration du délai dont ce dernier dispose pour souscrire sa déclaration de revenu global, le défaut de souscription de cette déclaration ou d'une déclaration de revenus catégoriels ne fait pas obstacle à ce que l'administration engage, après l'expiration du délai de déclaration, un tel examen.

CE 24 octobre 2018, n° 416676.

Arnaud SOTON

Avocat au Barreau de Paris

Professeur de droit fiscal

Pour plus d’actualités de droit fiscal http://www.soton-avocat.com/

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