Par deux arrêts, la Cour de cassation a jugé, d’une part, que l’action du comptable public n’a pas à être précédée d’une procédure contradictoire (Cass. com., 15 févr. 2023, n° 21-18.395), et d’autre que lorsqu’un plan de règlement est accordé par la CCSF, l’information que le dirigeant de la société pourra être poursuivi sur le fondement de l’article L. 267 du livre des procédures fiscales en cas d’inexécution du plan ou de non-paiement des taxes courantes, peut être donnée par la CCSF sous la forme d’une mention expresse figurant dans la décision d’octroi du plan ou dans la lettre notifiant cette décision à son bénéficiaire (Cass. Com. 25 janv. 2023, F-B, n° 20-22.939).
Aux termes de l'article L. 267 du LPF lorsqu'un dirigeant d'une société est responsable des maneouvres frauduleuses ou de l'inobservation grave et répétée des obligations fiscales qui ont rendu impossible le recouvrement des impositions et des pénalités dues par la société, ce dirigeant peut, s'il n'est pas déjà tenu au paiement des dettes sociales en application d'une autre disposition, être déclaré solidairement responsable du paiement de ces impositions et pénalités par le président du tribunal judiciaire. A cette fin, le comptable public compétent assigne le dirigeant devant le président du tribunal judiciaire du lieu du siège social.
En ce qui concerne la procédure contradictoire, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l’administration, exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées ainsi que celles qui sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable.
Selon la doctrine administrative (BOI-REC-SOLID-10-10-30), le comptable public territorialement compétent, qui est seul investi du mandat d'exercer en justice l'action prévue à l'article L. 267 du LPF afin de mettre en cause la responsabilité solidaire des dirigeants de droit ou de fait d’une société dont les impositions sont devenues irrécouvrables, doit agir sur autorisation du responsable départemental des finances publiques, cette autorisation devant être produite avec l'assignation.
Pour la Cour de Cassation, la décision qui est prise par le responsable départemental des finances publiques, quand bien même seul le comptable public peut exercer l'action, ne constitue pas une décision soumise au respect d'une procédure contradictoire préalable au sens de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l’administration.
Au cas particulier, une société dont le contribuable était le dirigeant, a été mise en redressement judiciaire le 7 septembre 2016, puis en liquidation judiciaire le 16 novembre 2016.
Le 23 mars 2018, le comptable du pôle de recouvrement spécialisé de l'Ain a assigné le dirigeant sur le fondement de l'article L. 267 du livre des procédures fiscales, afin qu'il soit déclaré solidairement responsable, avec la société, de la dette fiscale de cette dernière au titre de la TVA due pour la période de décembre 2014 à juillet 2016.
Le dirigeant a soulevé l'irrecevabilité de l'action engagée contre lui par le comptable public, comme n'ayant pas été précédée d'une procédure contradictoire préalable conformément aux dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration.
Cependant, en cassation, la Cour de Cassation a rejeté le pourvoi estimant que c’est à bon droit que la cour d'appel a jugé que l'action du comptable public était recevable.
En ce qui concerne l’obligation d’information préalable par l’administration, lorsqu’un plan de règlement est accordé par la commission des chefs de services financiers et des représentants des organismes de sécurité sociale (CCSF), l’information que le dirigeant de la société pourra être poursuivi sur le fondement de l’article L. 267 du livre des procédures fiscales en cas d’inexécution du plan ou de non-paiement des taxes courantes, peut être donnée par la CCSF sous la forme d’une mention expresse figurant dans la décision d’octroi du plan ou dans la lettre notifiant cette décision à son bénéficiaire.
Au cas particulier, une société a obtenu de la commission des chefs de services financiers et des représentants des organismes de sécurité sociale un plan de règlement de ses dettes fiscales. Après paiement d’une première mensualité, la société a été mise en redressement judiciaire, puis en liquidation judiciaire. L’administration fiscale a alors assigné le dirigeant de la société, sur le fondement de l’article L. 267 du livre des procédures fiscales (LPF), afin d’obtenir sa condamnation solidaire au paiement des impositions dues par cette société.
Le dirigeant s’oppose à sa poursuite en soulevant une fin de non-recevoir tirée de son défaut d’information au titre de la mise en œuvre de l’article L. 267 du LPF en cas de non-respect par la société. Il se prévaut de la doctrine administrative selon laquelle le comptable public est tenu d’informer le dirigeant que sa responsabilité pourra être engagée en cas de non-respect d’un plan de règlement et de non-paiement de l’arriéré ou des taxes courantes. Pour le dirigeant, une telle information doit être fournie par le comptable public et lui seul.
La Cour de cassation n’est pas de cet avis. Selon la Cour de cassation, en effet, pour un plan de règlement accordé à la société par le comptable ou la CCSF, une mention expresse informe le dirigeant que son inexécution ou le défaut de paiement des taxes courantes pourrait entraîner la mise en œuvre de l’action prévue à l’article L. 267 du LPF (pt 5).
Ainsi, l’information que le dirigeant de la société pourra être poursuivi sur le fondement de l’article L. 267 du LPF en cas d’inexécution du plan ou de non-paiement des taxes courantes, peut être donnée par la CCSF sous la forme d’une mention expresse figurant dans la décision d’octroi du plan ou dans la lettre notifiant cette décision à son bénéficiaire.
Cass. com., 15 févr. 2023, n° 21-18.395 et Cass. Com. 25 janv. 2023, F-B, n° 20-22.939.
Arnaud Soton
Avocat fiscaliste
Professeur de droit fiscal