Edmond MBOKOLO ELIMA

Magistrat, Enseignant à la Faculté de droit et Apprenant en DES/Troisième cycle en droit international privé et droit du numérique (Université de Kinshasa et Université de Kisangani)

Identification des motos de transport en commun et la responsabilité du Mairie de Mbandaka devant l’Assemblée Provinciale : Que dit la loi ?

Publié le 17/05/2020 Vu 1 352 fois 0
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L’opération lancée par le Maire de Mbandaka rentre bel et bien dans ses compétences prévues par la loi, qui lui permet de prendre des mesures de police et préventives dans son entité.

L’opération lancée par le Maire de Mbandaka rentre bel et bien dans ses compétences prévues par la loi,

Identification des motos de transport en commun et la responsabilité du Mairie de Mbandaka devant l’Assemblée Provinciale : Que dit la loi ?

Identification des motos de transport en commun et la responsabilité du Mairie de Mbandaka devant l’Assemblée Provinciale : Que dit la loi ?

Par Maitre Edmond MBOKOLO ELIMA

Avocat au Barreau de l’Equateur

Assistant à la Faculté de Droit

Université de Mbandaka en République Démocratique du Congo

 

1. Prolégomènes

Le Maire de Mbandaka, Monsieur Didi Edada Limama a lancé ce samedi 16 mai 2020, l’opération d’identification des taxis motos dans la Ville de Mbandaka, dont le but consiste de réduire sensiblement les actes de banditismes, le regain d’insécurité dans la ville et de faire respecter les mesures barrières en prévention contre la COVID-19.

Répliquant à cet appel du premier citoyen de Mbandaka, Maitre Antony Bomboko Mwamba, Député Provincial élu de cette Ville de Mbandaka dit non aux frais d’identification des motos fixés par le Mairie. Par conséquent, il demande à sa base de ne pas payer, car selon cet élu, ces frais sont anticonstituonnels. Il soutient encore que, bientôt le Maire va s’expliquer devant l’Assemblée Provinciale (autorité budgétaire) selon l’information nous livré par Delphin Ebwa de la RTNC/Mbandaka.

Face à ce tumulte, la science et le droit s’assemblent pour y intervenir. C’est ainsi qu’il sera question de répondre aux questions suivantes : le Maire de la ville engage-il sa responsabilité devant l’Assemblée Provinciale ? (2) et l’identification des motos  de transport en commun est-elle anti constitutionnelle ?  (3).

2. Le Maire de la Ville engage-t-il sa responsabilité devant l’Assemblée Provinciale ?

D’entrée de jeux, nous devons saisir que, la Constitution du 18 février 2006 telle que modifiée par la loi n°11/002 du 20 janvier 2011 a opté pour la décentralisation comme mode de gestion de certaines entités territoriales de la République. En effet, l’autorité exécutive de ces dernières est placée sous la tutelle du Gouverneur de Province. Il s’agit d’un contrôle à priori ou à postériori sur les actes (Lire l’exposé des motifs de la loi n°08/016 du 07 octobre 2008). Elles sont dotées des organes délibérants différents de l’Assemblée Provinciale qui est l’organe délibérant de la Province.

En effet, la Ville dirigée par le Maire est une entité territoriale décentralisée tel que voulu par la Constitution de notre pays. Aux termes de l’article 3 de cette dernière, les  provinces  et  les  entités  territoriales  décentralisées  de  la  République Démocratique du Congo sont dotées de la personnalité juridique et sont gérées par les organes locaux.  Ces entités territoriales décentralisées sont la ville, la commune,  le secteur et la  chefferie. Elles  jouissent  de  la  libre  administration  et  de  l’autonomie  de  gestion  de  leurs ressources économiques, humaines, financières et techniques ».

Avant d’évoluer, il faut signaler que,  la Province fonctionne avec deux institutions, à savoir l’Assemblée Provinciale et l’Exécutif Provincial. Elle est régie par la loi n°08/012 du 31 juillet 2008 portant principes fondamentaux relatifs à la libre administration des Provinces.

Par contre, la Ville en tant qu’entité territoriale décentralisée doit fonctionner avec deux organes : le Conseil Urbain et le Collège Exécutif Urbain. Contrairement à la Province, la Ville est organisée par la loi n° n°08/016 du 07 octobre 2008 portant composition, organisation et fonctionnement des Entités Territoriales Décentralisées et leurs rapports avec l’Etat et les Provinces.

Le Collège Exécutif Urbain est l’organe de la ville et d’exécution des décisions du Conseil urbain. Il est composé du Mairie, Maire-adjoint et de trois échevins urbains équivalant des Ministres Provinciaux (lire les articles 28 et 29 de la loi sur les ETD). Le Maire de la Ville est l’équivalant d’un Gouverneur de Province dans son entité.

Le conseil urbain est l’organe délibérant de la ville composé des conseillers urbains et qui doivent être élus. Il est l’équivalant de l’Assemblée Provinciale dans son entité.

Par ailleurs, l’article 36 de la loi sur les ETD prévoit la possibilité pour le Maire et le Collège Exécutif Urbain dans son ensemble, d’engager leur responsabilité devant le Conseil Urbain et non devant l’Assemblée Provinciale qui a la mission de contrôler le Gouverneur de Province, certains établissements publics, etc….

Pour ce premier aspect des choses, il sied de retenir que, la Ville dirigée par le Maire est une entité autonomie dotée de la personnalité juridique et d’une autonomie de gestion.

En conséquence, le Mairie de la Ville ne peut pas en aucun cas répondre devant l’Assemblée Provinciale, mais plutôt devant un Conseil Urbain…Malheureusement, cet organe n’est pas encore installé pour la non tenue des élections urbaines, municipales et locales.

3. L’identification des motos  de transport en commun par la ville est-elle anti constitutionnelle ?

Nous disons sportivement non.

En République Démocratique du Congo, il existe l’ordonnance-loi n°18/004 du 13 mars 2018 fixant la nomenclature des impôts, droits, taxes et redevances de la Province et de l’Entité territoriale décentralisée ainsi que les modalités de leur répartition. Cette dernière répartie entre les impôts, droits, taxes et redevances d’intérêt commun et ceux spécifiques à chacune des entités (Province et ETD).

Nous avons évoqué cette ordonnance afin de faire la distinction entre impôts, droits, taxes et redevances d’avec les frais administratifs. Les premiers sont de l’émanation de la loi, tandis que les frais administratifs sont créés par l’autorité elle-même.

Le Maire de la Ville n’est pas habilité à fabriquer un impôt, taxe, droit ou redevance mais le Maire de la Ville a la compétence de créer les frais administratifs  pour certains services que la Mairie rend à la Population.

L’ordonnance-loi sous examen prévoit les taxes sur la numérotation des moyens de transport en commun (autres que les motos) dont la compétence est dévolue à la Ville, tandis que la numérotation des motos, vélos et chariot est de la compétence de la Commune, Secteur et Chefferie…

Mais alors, pouvons-nous poser la question de savoir si l’opération d’identification des motos relève d’une taxe de numérotation prévue par la loi ou d’une mesure de police prise par l’autorité dans ses compétences ?

La réponse à cette interrogation est que, la mesure d’identification des motos pour réduire sensiblement les actes de banditismes, réduire le regain d’insécurité dans la ville et de faire respecter les mesures barrières en prévention contre la COVID-19 ne rentre pas dans le cadre d’une taxe….mais au contraire, il s’agit là, d’une mesure de police prise conformément à l’article 40 al.1 de la loi sur ETD qui veut qu’en cas d’urgence, et lorsque le conseil urbain n’est pas en session, le collège exécutif urbain prend des mesures de police et des sanctions de peines ne dépassant pas sept jours de servitude pénale et 25.000 FC d’amende ou d’une de ces peines seulement (article 40 sur les ETD).

A titre comparatif, la Ville Province de Kinshasa est géré par le Gouverneur de Province dont ce dernier est aussi Maire…Elle avait lancé l’opération d’identification de tous les taxis bus en attribuant à chacun un numéro afin qu’il soit identifié. Et cette identification est sanctionnée par la remise d’un imprimé de valeur, qui demande que les propriétaires des taxis bus puissent verser des frais administratifs pour ces imprimés avait commandé auprès d’une entreprise privée.

4. Conclusion

L’opération lancée par le Maire de Mbandaka rentre bel et bien dans ses compétences prévues par la loi, qui lui permet de prendre des mesures de police et préventives dans son entité. Il ne s’agit pas là, d’une taxe car celle-ci doit être crée que par le législateur, mais au contraire il s’agit des frais purement administratifs sollicités pour permettre à l’entité urbaine d’obtenir les imprimés de valeur par exemple.

Les frais demandés sont  constitutionnels et légaux.

Le Mairie de la Ville n’est pas responsable devant l’Assemblée Provinciale mais devant le Conseil Urbain qui n’est pas encore installé pour la non tenue des élections urbaines, municipales et locales.

Enfin, nous conseillons au Maire de Mbandaka de tenir compte des difficultés que la population connait pendant cette période de la COVID-19 qui du reste, a déstabilisé l’économie du pays. Qu’il lui plaise de rabaisser la tarification des frais à payer pour les motards un montant de 8.000 FC et 5.000 FC pour les privés en lieu et place respectivement de 15.000 FC et 8.000 FC.

Copyright Me Edmond MBOKOLO ELIMA© Mbandaka 16_ mai_2020.

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A propos de l'auteur
Blog de Edmond MBOKOLO ELIMA

MBOKOLO ELIMA Edmond, Magistrat, Officier du Ministère Public et Substitut du Procureur de la République

Ancien avocat au Barreau de l'Équateur, Enseignant à la Faculté de Droit de l'Université de Mbandaka et Apprenant en D. E. S à la Faculté de droit de l'Université de Kisangani et Chercheur en droit à l'Université de Kinshasa. 

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