CA LYON, 30 septembre 2022, RG n° 19/07372 *
Par cet arrêt, dont l'infographie synthétique est téléchargeable, la Cour d'appel de LYON est amenée à apprécier le bien-fondé du recours au travail temporaire.
Conformément à l’article L. 1251-1 du code du travail, le recours au travail temporaire a pour objet la mise à disposition temporaire d'un salarié par une entreprise de travail temporaire au bénéfice d'un client utilisateur pour l'exécution d'une mission.
Ainsi, à l’instar du contrat à durée déterminée, le contrat de mission, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice.
Les cas de recours à l’intérim sont fixés limitativement à l’article L. 1251-6 du code précité, dont l’accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise utilisatrice.
En cas de méconnaissance de ces règles, le salarié intérimaire peut faire valoir auprès de l'entreprise utilisatrice les droits correspondant à un contrat de travail à durée indéterminée prenant effet au premier jour de sa mission.
En la matière, il appartient à l’entreprise utilisatrice de rapporter la preuve de la réalité de l’accroissement temporaire d’activité (Cass. soc., 23 septembre 2020, n° 18-24.193).
En revanche, il n’est pas nécessaire que l'accroissement présente un caractère exceptionnel (Cass. soc., 03 février 2021, n° 18-24.793).
A titre d’illustration, le recours au contrat de mission pour accroissement temporaire d'activité peut correspondre à une activité supplémentaire liée à la saison, sans avoir comme motif de recours la saisonnalité, dès lors qu'il y a corrélation entre pic d'activité et recours au contrat précaire.
De plus, la circonstance que le salarié ait été affecté par un contrat à durée indéterminée à un emploi présentant de grandes similitudes avec celui ayant motivé le recours au contrat temporaire ne suffit pas à rendre irrégulier ce dernier contrat. Le recrutement en CDI suivant l’intérim établissait que l’entreprise utilisatrice avait tiré les conséquences de la nécessité de pérenniser l'action en prospection, comme le lui avait démontré le salarié, et d'en faire une activité régulière étendue à l'ensemble de l'année (Cass. soc., 9 juin 2022, n° 21-11.482).
Au cas présent, une salariée a été embauchée suivant deux contrats de mission par une entreprise de travail temporaire. Elle a été mise à disposition d'une entreprise utilisatrice dans le cadre d'un accroissement temporaire d'activité lié à la restructuration d'un de ses clients.
Contestant le bien-fondé de ses contrats, elle a saisi les juridictions prud'homales.
Après avoir rappelé les textes précités, la Cour d'appel de LYON constate que l'entreprise utilisatrice avait publié une offre d'emploi pour un poste en contrat à durée indéterminée. Elle relève que les tâches décrites tant pour le poste proposé en contrat à durée indéterminée que dans le contrat de mise à disposition sont très proches, que la formation requise est identique, de même que l'expérience souhaitée, peu important que l'intitulé des postes soient différents.
L'ensemble de ces éléments constituait ainsi un faisceau d'indices accréditant la thèse de la salariée selon laquelle elle a en fait pourvu le poste proposé en contrat à durée indéterminée dans le cadre de missions d'intérim.
Par ailleurs, les seules pièces comptables produites ne démontraient pas la réalité du surcroît d'activité allégué, dont le caractère exceptionnel par rapport à l'activité habituelle de la société n'était pas établi, et qui pourraient justifier le recours au travail temporaire.
La Cour requalifie donc le contrat de la salariée en contrat à durée indéterminée ouvrant droit à plusieurs indemnités.
Maître Florent LABRUGERE
Avocat au Barreau de LYON
https://www.labrugere-avocat-lyon.fr/
N.B : On ne sait pas, au jour de la rédaction de ce billet, si l’arrêt est définitif et n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.