CA PARIS, 8 septembre 2021, RG n° 18/00011 *
Par cet arrêt, dont l'infographie synthétique est téléchargeable, la Cour d'appel de PARIS rappelle les règles de base en matière de licenciement pour motif économique, notamment celles concernant l’application des critères d’ordre.
Il était question d’une salariée, occupant, au dernier état de la relation contractuelle, un poste de chargée de gestion budgétaire et commerciale. Après la mise en place d’un plan de sauvegarde de l’emploi, cette dernière a fait l’objet d’un licenciement économique par courrier daté du 2 août 2012.
Contestant le bien-fondé de celui-ci, elle a saisi les juridictions prud’homales invoquant notamment un non-respect des critères d’ordre prévus en la matière.
En effet, on rappellera qu’en application de l'article 1233-5 du code du travail dans sa rédaction applicable à l'espèce, lorsque l'employeur procède à un licenciement collectif pour motif économique et en l'absence de convention ou accord collectif de travail applicable, il définit les critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements, après consultation du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel (aujourd’hui CSE).
Ces critères prennent notamment en compte :
1° Les charges de famille, en particulier celles des parents isolés ;
2° L'ancienneté de service dans l'établissement ou l'entreprise ;
3° La situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, notamment celle des personnes handicapées et des salariés âgés ;
4° Les qualités professionnelles appréciées par catégorie.
Les critères doivent être appréciés dans la catégorie professionnelle à laquelle appartient le salarié.
Une fois n’est pas coutume, le texte légal ne définit pas la notion de catégorie professionnelle. La jurisprudence est donc venue combler ce vide juridique en précisant « qu'appartiennent à une même catégorie professionnelle les salariés qui exercent dans l'entreprise des activités de même nature supposant une formation professionnelle commune » (Cass. soc., 28 septembre 2010, n° 09-65.118 ; Cass. soc., 30 septembre 2020, n° 19-10.527).
Bien évidemment, les critères susvisés n’ont pas lieu de s’appliquer dans l’hypothèse où un seul salarié compose une catégorie professionnelle (Cass. soc., 4 juillet 2018, n° 17-13.653).
Dans le cas présent, l’employeur soutenait notamment que la salariée en cause était seule dans sa catégorie professionnelle.
Après avoir rappelé les règles précitées, la Cour d’appel constate le contraire. En effet, elle relève qu'un autre salarié était présent dans les effectifs de l'entreprise, ce dernier occupant un poste de contrôleur de gestion junior. Or, après examen des fiches relatives aux postes occupés par les deux salariés, la Cour conclut que les fonctions décrites par lesdites fiches sont de même nature supposant une formation professionnelle commune.
Dès lors, l'employeur aurait dû faire application des critères d'ordre, ce qui n'aurait pas conduit au licenciement de la salariée ayant saisi les juridictions.
La Cour d'appel lui accorde donc des dommages et intérêts à hauteur de 10.000,00 € en réparation du préjudice subi du fait de la perte injustifiée de son emploi consécutive au non-respect de l'ordre de licenciement.
Enfin, on précisera sur ce point que l’inobservation des règles relatives à l'ordre des licenciements n'a pas pour effet de priver le licenciement de cause réelle et sérieuse mais ouvre seulement droit à des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi (Cass. soc., 6 avril 2016, n° 14-29.820).
Ainsi, en l’absence de preuve d’un préjudice, alors même que le manquement de l’employeur est avéré, l’accord de dommages et intérêts n’est pas automatique (Cass. soc., 26 février 2020, n° 17-18.138).
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N.B : On ne sait pas, au jour de la rédaction de ce billet, si l’arrêt est définitif et n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.