Le licenciement prononcé durant un arrêt de travail

Publié le 27/02/2023 Vu 2 133 fois 0
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Par cet arrêt, la Cour d'appel de PAU revient sur le bien-fondé d’un licenciement motivé par l’absence prolongée d’un salarié perturbant le bon fonctionnement de l’entreprise.

Par cet arrêt, la Cour d'appel de PAU revient sur le bien-fondé d’un licenciement motivé par l’absence

Le licenciement prononcé durant un arrêt de travail
INFOGRAPHIE_CA_PAU_1.pdf

CA PAU, 16 février 2023, RG n° 21/0515 *

Par cet arrêt, dont l'infographie synthétique est téléchargeable, la Cour d'appel de PAU revient sur le bien-fondé d’un licenciement motivé par l’absence prolongée d’un salarié perturbant le bon fonctionnement de l’entreprise.

En la matière, on rappellera, au préalable, que l’article L. 1132-1 du code du travail fait interdiction de licencier un salarié notamment en raison de son état de santé ou de son handicap.

Pour autant, il ressort d’une jurisprudence constante de la Cour de cassation que ce texte ne s’oppose au « licenciement motivé, non par l'état de santé du salarié, mais par la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l'absence prolongée ou les absences répétées de l'intéressé, celui-ci ne peut toutefois être licencié que si ces perturbations entraînent la nécessité pour l'employeur de procéder à son remplacement définitif » (Cass. soc., 13 mars 2001, n° 99-40.110).

Aux termes de cette jurisprudence actée, un tel licenciement doit réunir les deux conditions suivantes :

  • L’absence prolongée d’un salarié impacte le bon fonctionnement de l’entreprise,
  • Cet impact nécessite le remplacement définitif du salarié, autrement dit, son remplacement par un salarié embauché en CDI et non en CDD ou en intérim.
A titre d’illustration, pour le premier élément, le seul dysfonctionnement d’un service ou d’une agence et non de l’entreprise dans sa globalité ne peut justifier un tel licenciement, hormis si ledit service est essentiel (Cass. soc., 23 mai 2017, n° 14-11.929).

En revanche, ce motif de licenciement ne peut être retenu dans le cas d’une absence consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle dans la mesure où l’article L. 1226-9 du code du travail dispose que l'employeur ne peut rompre ce contrat que s'il justifie (Cass. soc., 9 décembre 2020, n° 19-19.273) :
 
  • soit d'une faute grave de l'intéressé,
  • soit de son impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie.

Sur le second élément, le remplacement définitif du salarié absent doit intervenir à une date proche du licenciement ou dans un délai raisonnable après celui-ci, délai que les juges du fond apprécient souverainement en tenant compte des spécificités de l'entreprise et de l'emploi concerné, ainsi que des démarches faites par l'employeur en vue d'un recrutement (Cass. soc., 24 mars 2021, n° 19-13.188).

Sur ce point, la jurisprudence a tendance à considérer que ni l'existence d'une perturbation, ni la nécessité d'un remplacement définitif ne sont démontrés lorsque l'employeur entend licencier un salarié qui est susceptible de revenir prochainement (Cass. soc., 20 janvier 2010, nº 08-41.697).

Il était d’ailleurs question de cet élément factuel dans le cas de l’arrêt commenté.

En l’espèce, une salariée a été embauchée en qualité d'aide soignante. A compter de mars 2016, elle a été en arrêt de travail prolongé jusqu'en juillet 2018 où une reprise à mi-temps thérapeutique était envisagée.

Le 18 août 2018, elle a été licenciée en raison de l'impossibilité de poursuivre son remplacement temporaire. Ultérieurement, elle a saisi les juridictions prud'homales en vue de contester son licenciement.

Après avoir rappelé les règles précitées, la Cour d'appel de PAU relève que la salariée, embauchée à temps plein, est demeurée en arrêt de travail de mars 2016 jusqu'à la date de son licenciement en août 2018 en raison d'une pathologie invalidante. Elle note qu'aucun arrêt de travail n'a été inférieur à un mois.

Pour autant, peu de temps avec ce licenciement, il résultait du dossier médical de la médecine du travail qu'au 05 juillet 2018, le médecin du travail a pris contact avec l'employeur pour mettre en place une reprise du travail en mi-temps thérapeutique. Ce pourquoi, pour la Cour d’appel, l'employeur avait parfaitement connaissance dès cette date d'une perspective de reprise de travail mais qu'il a pourtant initié la procédure de licenciement.

Au surplus, elle relève que l'employeur a fait le choix de ne pas opérer de remplacement systématique de la salariée durant ses arrêts de travail pourtant assez longs. Il a préféré recruter, à plusieurs reprises, des remplaçants en CDD de très courte durée alors même que les arrêts de travail s'étalaient sur plus d'un mois.

Dès lors, au cas présent, l'employeur ne démontre pas suffisamment la réalité d'une désorganisation de l'entreprise par les absences répétées de la salariée nécessitant son remplacement définitif, ce d'autant qu'une perspective du reprise du travail était envisagée par le médecin du travail.

La Cour d’appel de PAU juge donc le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Maître Florent LABRUGERE

Avocat au Barreau de LYON

https://www.labrugere-avocat-lyon.fr/


N.B : On ne sait pas, au jour de la rédaction de ce billet, si l’arrêt est définitif et n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.

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