CA TOULOUSE, 17 septembre 2021, RG n° 19/03359  *
Par cet arrêt, dont l'infographie synthétique est téléchargeable, la Cour d'appel de TOULOUSE statue sur le bien-fondé d’un licenciement en raison du fait d’avoir fumé sur son lieu de travail et ce, pendant son temps de travail.
Le salarié en cause avait été embauché en 1988. Le 5 avril 2018, ce dernier a fait l'objet d'un licenciement pour faute grave, son employeur lui reprochant d'avoir fumé en dehors de la zone fumeur et pendant son temps de travail.
Contestant son licenciement, il a saisi les juridictions prud'homales.
Avant de s’intéresser à la réalité et la gravité de la faute reprochée au salarié, la Cour d’appel de TOULOUSE rappelle la définition d’une faute grave s’entendant comme d'une particulière gravité ayant pour conséquence d'interdire le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée limitée du préavis.
Lorsque l'employeur retient la qualification de faute grave dans la lettre de licenciement, il lui incombe de rapporter la preuve matérielle des faits reprochés à son salarié. Le contrôle de la matérialité des faits reprochés auquel le juge doit procéder implique une appréciation de leur imputabilité au salarié, de leur caractère objectivement fautif et sérieux justifiant la rupture du contrat de travail, ainsi que de leur gravité rendant impossible le maintien dans l'entreprise.
En l’espèce, la matérialité du fait fautif ne portait pas à discussion. En effet, le salarié reconnaissait avoir fumé pendant son temps de travail et ce, dans un lieu inapproprié. Cependant, il contestait la gravité de la sanction prise.
Sur ce point, la Cour rappelle les dispositions du règlement intérieur de l’entreprise qui interdisait de fumer pendant les heures de travail. Elle note également que le salarié présentait un passif disciplinaire puisqu’il avait fait l’objet d’un rappel à l’ordre quelques mois avant son licenciement pour avoir quitté l'atelier pour aller téléphoner.
Elle estime ainsi que le fait d’avoir fumé pendant son temps de travail justifie un licenciement. Cependant, elle juge que le prononcé du licenciement pour faute grave apparaît manifestement disproportionné au regard des faits reprochés au salarié, et alors que ce dernier comptait plus de vingt-neuf ans d'ancienneté.
Ainsi, elle requalifie le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse, de sorte que le salarié peut prétendre au paiement d’une indemnité de licenciement et d’une indemnité compensatrice de préavis.
A cet égard, on remarquera que l’ancienneté constitue l’un des indices les plus prépondérants en vue d’apprécier le degré de gravité d’un comportement fautif. A titre d’illustration, des propos critiques, même vifs, tenus pour un salarié disposant d’une ancienneté de plus de onze ans ne peuvent pas justifier un licenciement pour faute grave (Cass. soc., 17 janvier 2018, n° 16-21.522).
En revanche, des comportements particulièrement graves, de type propos raciste à l’encontre d’un collègue (Cass. soc., 5 décembre 2018, n° 17-14.594) ou des coups physiques (Cass. soc., 9 juin 2021, n° 20-14.365) constituent nécessairement une faute grave, peu important l’ancienneté du salarié.
Par le passé, la Cour de cassation avait déjà confirmé le bien-fondé d’un licenciement pour faute grave fondé sur le fait d’avoir fumé sur le lieu de travail (Cass. soc., 1er juillet 2008, n° 06-46.421).
Maître Florent LABRUGERE
Avocat au Barreau de LYON
https://www.labrugere-avocat-lyon.fr/
N.B : On ne sait pas, au jour de la rédaction de ce billet, si l’arrêt est définitif et n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.