Généralement, il n’est pas rare de trouver dans tout contrat de travail une clause relative au lieu de travail et ceci, dans le but d’informer, au mieux, le salarié sur ses conditions de travail.
En présence d’une telle clause, deux positions peuvent s’affronter :
- Celle d’une lecture stricto sensu affirmant que toute modification ultérieure nécessitera, en pratique, la conclusion d’un avenant et donc de l’accord du salarié.
- Celle d’une lecture assez large affirmant que cette clause n’a qu’une valeur informative mais ne lie pas l’employeur pour l’avenir, de telle sorte que ce dernier puisse modifier le lieu de travail sans le consentement de son salarié.
Il en ressort :
- Un principe : la mention du lieu de travail dans le contrat de travail n’a que simple valeur d’information.
- Une exception : les parties peuvent prévoir, par une clause claire et précise, qu’elles ont eu pour intention de fixer définitivement le lieu de travail sauf avenant ultérieur nécessitant l’accord des deux parties, à savoir l’employeur et le salarié.
Dès lors, en présence d’une simple clause informative, l’employeur est par exemple légitime à affecter son salarié dans une autre agence de la même ville (Cass. soc., 8 juilet 2003, n° 01-43.192).
Au contraire, la clause ci-dessous a été considérée comme fixant un lieu de travail fixe et précis par une Cour d’appel (CA AIX-EN-PROVENCE, 26 novembre 2020, RG n° 17/17540) :
« Mme A exercera ses fonctions dans notre établissement de Nice…En fonction des nécessités, Mme A s'engage expressément à effectuer tous déplacements de durée et/ou d'éloignement variables demandés par la société, n'entraînant pas de changement de résidence. Elle s'engage en particulier à accepter tout déplacement qui lui serait demandé ou qui s'imposerait à elle pour la bonne exécution de ses fonctions dans la société ».
Pour la Cour, la rédaction de ladite clause prévoyant la possibilité de déplacements de durée variable ou nécessités par la bonne exécution des fonctions de la salariée au sein de la société permet d'affirmer a contrario que les parties ont entendu contractualisé le lieu d'exécution de la prestation de travail, de sorte que l'employeur qui envisageait un changement dudit lieu devait, au préalable, obtenir l'accord de la salariée.
Cette interprétation des juges du fond est assez audacieuse puisque la position de la Cour de cassation exige que le contrat de travail doit prévoir que les fonctions du salarié s’exercent exclusivement sur le lieu de travail mentionné par une clause dudit contrat (Cass. soc., 24 octobre 2018, n° 17-21.298).
Or, en faisant une lecture a contrario de la clause d’espèce, ceci vient démontrer qu’aucun lieu de travail fixe et définitif n’était expressément prévu dans le contrat.
Il est donc essentiel, dès le stade de la signature du contrat de travail, de bien vérifier l’intention des parties quant à la rédaction de la clause du contrat de travail relative au lieu d’exécution de la prestation de travail.
Maître Florent LABRUGERE
Avocat au Barreau de LYON
https://www.labrugere-avocat-lyon.fr/
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