CA RENNES, 23 février 2023, RG n° 19/06257*
Par cet arrêt, dont l'infographie synthétique est téléchargeable, la Cour d'appel de RENNES vient rappeler la différence entre une rétrogradation et le changement de poste consécutif à la mise en application d’une période probatoire.
Lors de l’embauche d’un salarié, il est généralement prévu de fixer une période d’essai qui permet à l'employeur d'évaluer les compétences du salarié dans son travail, notamment au regard de son expérience, et au salarié d'apprécier si les fonctions occupées lui conviennent.
Dans le même ordre d’idée, en cours d’exécution du contrat de travail, lors d’une promotion, il est, cette fois-ci, prévu de mettre en place une période probatoire qui a la même finalité qu’une période d’essai.
La principale différence réside au niveau des effets de chacun de ces mécanismes. Là où la mise en œuvre d’une période d’essai a pour conséquence la rupture du contrat de travail, la période probatoire a, au contraire, pour effet de replacer le salarié à son ancien poste et ce, sans son accord.
La période probatoire n’étant pas prévue initialement, la jurisprudence a précisé que sa mise en place constitue une modification du contrat de travail, de sorte qu’elle nécessite l’accord exprès du salarié (Cass. soc., 16 mai 2012, n° 10-10.623).
En pratique, il arrive que les parties confondent période d’essai et période probatoire.
Dans ce type d’hypothèse, la Cour de cassation a indiqué qu’ « en présence de deux contrats de travail successifs entre les mêmes parties, la période d'essai stipulée dans le second contrat conclu à l'occasion d'un changement de fonction du salarié, ne peut être qu'une période probatoire dont la rupture a pour effet de replacer le salarié dans ses fonctions antérieures » (Cass. soc., 30 mars 2005, n° 02-46.338).
Tel était le cas dans l’arrêt commenté. Il était question d’un salarié initialement engagé en qualité de vendeur au sein d'un magasin à compter du 01er juin 2015.
Le 16 août 2016, il s'est vu promu directeur du magasin à titre d'essai. Quelques mois après, son employeur lui a demandé de reprendre son ancien poste puis l'a finalement licencié. Ultérieurement, il a contesté son changement de poste en saisissant le Conseil de prud'hommes.
Au cas présent, le salarié soutenait avoir fait l'objet d'une rétrogradation lorsqu'il avait été replacé sur son ancien poste de vendeur par son employeur.
La Cour d'appel de RENNES relève qu'un nouveau contrat de travail a été conclu entre les parties lors de la promotion du salarié. Celui-ci comprenait une clause fixant une période d'essai de trois mois renouvelable une fois par accord écrit des deux parties avant le terme initialement fixé. Le 10 novembre 2016, l'employeur avait usé de cette clause pour replacer le salarié sur son ancien poste.
Sur ce point, la Cour d'appel rappelle la jurisprudence précitée pour finalement interpréter la clause susvisée qui avait été mal intitulée puisqu'en réalité, elle fixait une période probatoire et non une période d'essai.
Dès lors, pour la Cour, les parties ont pu valablement convenir d'une période probatoire, improprement qualifiée de période d'essai, dans le cadre du contrat en date du 16 août 2016 qui attribuait au salarié les fonctions de responsable de magasin.
La rupture de ladite période probatoire entraînait ainsi la réintégration du salarié dans ses fonctions originelles de vendeur, sans qu'une telle situation puisse s'analyser en une sanction de rétrogradation, fût-elle accompagnée du retour aux conditions salariales propres aux fonctions d'origine.
Maître Florent LABRUGERE
Avocat au Barreau de LYON
https://www.labrugere-avocat-lyon.fr/
N.B : On ne sait pas, au jour de la rédaction de ce billet, si l’arrêt est définitif et n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.