CA LYON, 01er juin 2023, RG n° 21/02793 *
Par cet arrêt, dont l'infographie synthétique est téléchargeable, la Cour d'appel de LYON est amenée à apprécier la validité d’une clause de non-concurrence stipulée dans un contrat de travail.
En la matière, on rappellera que le régime juridique d’une telle clause est posé par des règles prétoriennes. Ainsi, depuis un arrêt de principe en date du 10 juillet 2002, la validité d’une telle clause est largement admise par la Cour de cassation selon l’attendu de principe suivant (Cass. soc., 10 juillet 2002, n° 00-45.135) :
« Attendu qu'une clause de non-concurrence n'est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace, qu'elle tient compte des spécificités de l'emploi du salarié et comporte l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives ».
S’agissant de la condition relative à la contrepartie financière, celle-ci ne doit pas être symbolique. A défaut, la clause est réputée nulle. Ainsi, selon la jurisprudence, une contrepartie financière dérisoire à la clause de non-concurrence contenue dans un contrat de travail équivaut à une absence de contrepartie (Cass. soc., 15 novembre 2006, n° 04-46.721).
Dans le même ordre d’idée, est nulle la clause de non-concurrence qui ne prévoit le versement d'une contrepartie pécuniaire qu'en cas de rupture du contrat de travail à l'initiative du salarié (Cass. soc., 15 mars 2023, n° 21-16810).
Au cas présent, il était question d’un salarié qui a été engagé, en qualité de consultant, au sein d'une entreprise de travail temporaire. Au sein de son contrat de travail, il était stipulé une clause de non-concurrence prévoyant la contrepartie financière suivante :
« (…) En contrepartie de cette interdiction et pendant sa durée d'application postérieure au terme effectif du présent contrat, la société paiera mensuellement au salarié une contrepartie pécuniaire égale à 20% de la moyenne mensuelle de ses appointements fixes apprécié sur les 3 derniers mois de présence dans la société (étant précisé que toute prime ou gratification de caractère annuel ou exceptionnel, qui aurait été versé au salarié pendant cette période, ne sera pas prise en compte) pour la première année, et 10% pour la deuxième année ».
Après sa démission, estimant que son ancien salarié avait violé cette clause, l'employeur a saisi les juridictions prud'homales.
En premier lieu, la Cour d’appel de LYON rappelle qu'une clause de non-concurrence qui ne précise ni le montant de la contrepartie financière, ni les modalités de son versement est nulle.
A la rédaction de la clause, elle note qu'il n'est pas précisé si la rémunération de référence, base de calcul de la contrepartie financière, doit s'apprécier au regard du montant du salaire en brut ou de son montant en net. Elle ajoute que la référence à la notion d'appointements en brut est à l'inverse utilisée s'agissant du montant de la clause pénale due par le salarié en cas de violation de la clause.
Ainsi, selon la Cour, l'employeur ne saurait arguer d'une évidence quant au montant prévu, alors même qu'il est attendu d'une clause stipulant le mode de calcul d'une contrepartie à non-concurrence une rédaction en des termes explicites et précis.
Dès lors, elle indique que cette stipulation, et plus encore en présence d'une rédaction de la clause pénale utilisant une formulation différente, sera jugée ambiguë et il sera ainsi retenu que cette stipulation imprécise ne déterminait pas clairement le montant de la contrepartie financière due. Cette ambiguïté équivaut à une indétermination de cette stipulation essentielle qui rend nulle la clause de non-concurrence.
Dès lors, elle déboute l'employeur de sa demande de dommages et intérêts pour violation de la clause de non-concurrence.
Florent LABRUGERE
Avocat au Barreau de LYON en droit du travail et droit de la sécurité sociale
https://www.labrugere-avocat-lyon.fr/
N.B : On ne sait pas, au jour de la rédaction de ce billet, si l’arrêt est définitif et n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.