CA DIJON, 01 décembre 2022, n° 21/00503 *
Par cet arrêt, dont l'infographie synthétique est téléchargeable, la Cour d'appel de DIJON rappelle les conditions de forme d’une contrainte adressée par l’URSSAF (venant aux droits de l’ex-RIS) à un cotisant.
Au cas présent, l’ex-RSI (aujourd’hui remplacé par l’URSSAF) a signifié par acte d'huissier une contrainte, le 15 juillet 2016, à une cotisée lui réclamant le paiement de la somme de 7.517 euros au titre des cotisations sociales et majorations de retard concernant le troisième trimestre de l'année 2015.
Elle lui a également signifiée par acte d'huissier une contrainte, le 19 septembre 2017, lui réclamant le paiement de la somme de 6.950 euros au titre des cotisations sociales et majorations de retard concernant la régularisation des cotisations exigibles de l'année 2015.
La cotisée a formé une opposition aux deux contraintes et a saisi les juridictions de sécurité sociale.
En la matière, la Cour de cassation rappelle que toute action aux fins de recouvrement de cotisations de sécurité sociale doit être précédée, à peine de nullité, de l'envoi d'une mise en demeure adressée au redevable (Cass. civ. 2ème, 21 février 2008, n° 07-11.963).
A cet effet, il résulte des articles L. 244-2 et R. 244-1 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable au litige, que la mise en demeure, qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, doit permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation ainsi que la période à laquelle elles se rapportent.
Ainsi, selon une jurisprudence constante, la contrainte signifiée à un indépendant doit lui permettre de connaitre précisément la nature, la cause et l'étendue de son obligation, sous peine de nullité, sans qu’il y ait besoin de justifier d’un préjudice (Cass. civ. 2ème, 3 novembre 2016, n° 15-20.433)
Au cas présent, la cotisée a demandé la nullité des contraintes en raison de l'absence de motivation suffisante. Elle estimait notamment que les sommes réclamées ne concernaient pas une régularisation des cotisations sociales de l'année 2015 mais celle de l'année 2014.
En réalité, les sommes réclamées portaient sur une régularisation des cotisations de l'année 2014 suite à la déclaration de revenus effectuée par la cotisée en 2015. Or, sur ce point, la Cour d’appel de DIJON relève que l'URSSAF ne justifiait pas que le courrier en date du 16 juin 2015, dont elle se prévalait, concernant le détail de la régularisation des cotisations de l'année 2014 réclamée en 2015 a bien été reçu par la cotisée.
Ainsi, ni les mises en demeure ni les contraintes au cas présent ne mentionnent la période concernée par le redressement. En effet, ces documents ne mentionnent que l'année 2015 alors qu'il s'agit de l'année 2014, ce qui ne permettent pas à la cotisée de connaître l'étendue de son obligation.
Dans des affaires similaires, des juges du fond ont rendu des décisions dans le même sens :
- Une contrainte délivrée par Pôle emploi est irrégulière lorsqu’elle vise une période trop étendue (CA PAU, 30 juin 2022, RG n° 19/03972).
- Une contrainte qui ne permettait pas au cotisant de connaitre précisément la période recouvrée (CA CAEN, 22 septembre 2022, RG n° 19/02172).
De plus, dans le cas présent, la Cour d’appel de DIJON constate qu'il existe une différence entre les sommes mentionnées dans les contraintes et celles dans les mises en demeures alors qu'aucun décompte n'est produit avec la signification des contraintes pour justifier ces différences.
Dès lors, elle prononce la nullité des contraintes, de sorte que la cotisée ne doit aucune somme à l'URSSAF.
Maître Florent LABRUGERE
Avocat au Barreau de LYON
https://www.labrugere-avocat-lyon.fr/
N.B : On ne sait pas, au jour de la rédaction de ce billet, si l’arrêt est définitif et n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.