La prescription des faits fautifs

Publié le 28/06/2021 Vu 6 432 fois 0
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Par cet arrêt, la Cour d'appel de MONTPELLIER est amenée à s’intéresser au bien-fondé d’un licenciement pour faute grave alors que le salarié soulevait la prescription du fait fautif reproché par son employeur.

Par cet arrêt, la Cour d'appel de MONTPELLIER est amenée à s’intéresser au bien-fondé d’un licencie

La prescription des faits fautifs
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CA MONTPELLIER, 23 juin 2021, RG n° 18/00787 *

 

Par cet arrêt, dont l'infographie synthétique est téléchargeable, la Cour d'appel de MONTPELLIER est amenée à s'intéresser au bien-fondé d'un licenciement pour faute grave alors que le salarié soulevait la prescription du fait fautif reproché par son employeur.

Chronologiquement, il ressort des faits de l'arrêt commenté :

  • Le 1er septembre 2014, le salarié a été recruté en tant que mécanicien.
  • Le 19 mai 2016, ce dernier s’est immatriculé, en son nom propre, au registre du commerce et des sociétés pour une activité de mécanique automobile, remorquage, achat, vente de véhicules d'occasion.
  • Le 19 octobre 2016, l’employeur a convoqué le salarié à un entretien préalable.
  • Le 2 novembre 2016, l’employeur l’a licencié pour faute grave et ce, en raison d’un manquement à son obligation de loyauté. Plus particulièrement, il lui était reproché d’exercer, en son nom propre, une activité concurrentielle à celle de son employeur.

Le code du travail ne donne aucune définition de la faute grave. Traditionnellement, la Cour de cassation juge que « la faute grave, qui peut seule justifier une mise à pied conservatoire, est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise » (Cass. soc., 27 septembre 2007, n° 06-43.867).

Là encore, sans grande surprise, la jurisprudence estime que le fait d’exercer une activité concurrente à celle de son employeur constitue une faute susceptible de justifier un licenciement pour faute grave, voire pour faute lourde (Cass. soc., 15 mai 2019, n° 17-28.943).

Pour autant, toute procédure disciplinaire est encadrée par des délais stricts. A ce titre, l’article L. 1233-4 du code du travail dispose qu'aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance.

Ainsi, dès lors que le supérieur hiérarchique avait connaissance des faits fautifs, l’employeur se doit d’engager la procédure disciplinaire dans les deux mois suivants. A défaut, le licenciement est jugé sans cause réelle et sérieuse, peu importe la réalité et la gravité de la faute du salarié (Cass. soc., 18 novembre 2020, n° 19-14.511).

On précisera, toutefois, que ce délai de deux mois commence à courir à compter du moment où l’employeur a une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l'ampleur des faits reprochés au salarié. Ainsi, si une enquête des institutions représentatives du personnel est nécessaire, ledit délai ne commencera à courir qu’à compter des conclusions de l’enquête (Cass. soc., 7 décembre 2016, n° 15-24.420).

Lorsque les faits sanctionnés par le licenciement ont été commis plus de deux mois avant l'engagement des poursuites, il appartient à l'employeur d'apporter la preuve qu'il n'en a eu connaissance que dans les deux mois ayant précédé l'engagement des poursuites (Cass. soc., 10 avril 2019, n° 17-24.093).

Au cas présent, il n’était pas contesté par le salarié qu’il exerçait, en parallèle de son activité salariée, une activité similaire en nom propre et ce, de façon officielle. Pour autant, il invoquait le fait que l’employeur avait eu connaissance de cette activité dès le départ.

La Cour d’appel constate, en effet, que l'employeur avait connaissance de l'activité concurrente du salarié depuis au moins le 30 mai 2016, alors qu'il n'a engagé la procédure de licenciement disciplinaire que le 19 octobre 2016, soit plus de deux mois après la connaissance des faits.

Cette connaissance était indéniable puisque l’employeur lui-même entretenait des relations commerciales avec l’entreprise crée par son salarié. Il était ainsi versé aux débats des factures relatives à des prestations de services échangées entre les deux professionnels.

Il s'ensuit que les faits reprochés sont prescrits, en sorte que le licenciement du salarié est jugé comme dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Il apparait étonnant que l’employeur n’ait pas soulevé le caractère répété du fait fautif du salarié. En effet, le délai de deux mois ne peut pas être opposé à l’employeur dans l’hypothèse où que le comportement du salarié s'est poursuivi au-delà dudit délai (Cass. soc., 5 décembre 2018, n° 17-27.128).

Tel était le cas en l’espèce puisqu’il était reproché au salarié une violation continue et répétée de ses obligations professionnelles, soit la persistance d'un comportement fautif.
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Maître Florent LABRUGERE

Avocat au Barreau de LYON

https://www.labrugere-avocat-lyon.fr/


N.B : On ne sait pas, au jour de la rédaction de ce billet, si l’arrêt est définitif et n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.

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