CA MONTPELLIER, 21 septembre 2022, RG n° 17/00296 *
Par cet arrêt, dont l'infographie synthétique est téléchargeable, la Cour d'appel de MONTPELLIER est amenée à faire application de la présomption de la faute inexcusable en cas de signalement antérieur effectué par le salarié victime.
Au préalable, comme nous l’avions exposé dans un article précédent, la jurisprudence se réfère directement à l’obligation de sécurité pesant sur l’employeur à l’égard de ses salariés en matière de faute inexcusable.
Ainsi, le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver (Cass. soc., 28 février 2002, n° 99-18.389).
Récemment, suite à l’évolution de la chambre sociale de la Cour de cassation sur l’obligation de sécurité passant d’une obligation de résultat à une obligation de moyen renforcée, la deuxième chambre civile a légèrement modifié sa définition de la faute inexcusable.
A l’instar de la chambre sociale, elle ne fait plus référence à l’obligation de sécurité de résultat mais renvoie à la notion d’« obligation légale de sécurité et de protection de la santé » (Cass. civ. 2ème, 8 octobre 2020, n° 18-25.021).
Surtout, on notera qu’il existe une présomption de droit de la faute inexcusable selon l’article L. 4131-4 du code du travail.
Ainsi, la reconnaissance de la faute inexcusable est de droit « pour le ou les travailleurs qui seraient victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle alors qu'eux-mêmes ou un représentant du personnel au comité social et économique avaient signalé à l'employeur le risque qui s'est matérialisé ».
Tel est le cas, par exemple, d’une victime qui a transmis à son employeur une lettre de menaces reçue dans un contexte de fortes tensions internes à l’entreprise, de sorte qu’elle avait signalé à celui-ci le risque d’agression auquel elle était exposée (Cass. civ. 2ème, 8 juillet 2021, n° 19-25.550).
En l’espèce, il était question d’une salariée qui a été embauchée en qualité d'animatrice socioéducative. Au cours de la relation contractuelle, elle a présenté un syndrome anxiodépressif réactionnel à une souffrance ressentie au travail qui a été pris en charge comme maladie professionnelle.
Elle a ensuite saisi les juridictions de sécurité sociale pour reconnaitre la faute inexcusable de son employeur dans la survenance de sa maladie.
Dans un premier temps, la Cour d'appel de MONTPELLIER rappelle la définition de la faute inexcusable.
Au cas présent, en s'appuyant sur les nombreux témoignages produits, la Cour note que la salariée a été victime d'un syndrome anxiodépressif réactionnel à des relations professionnelles conflictuelles avec sa supérieure hiérarchique de fait.
Surtout, la Cour note que la salariée avait adressé un courriel à sa direction explicitant suffisamment le risque psychosocial qui s'est matérialisé un peu moins d'un an plus tard.
Dès lors, le bénéfice de la faute inexcusable est de droit pour la salariée, l'employeur ne démontrant pas d'ailleurs le respect de son obligation légale de sécurité.
Maître Florent LABRUGERE
Avocat au Barreau de LYON
https://www.labrugere-avocat-lyon.fr/
N.B : On ne sait pas, au jour de la rédaction de ce billet, si l’arrêt est définitif et n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.