La production forcée de documents

Publié le 10/01/2022 Vu 3 199 fois 0
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Par cet arrêt, la Cour d'appel de GRENOBLE est amenée à statuer sur le bien-fondé d’une demande de production forcée de documents formulée par un salarié invoquant une rupture d’égalité en matière de salaire.

Par cet arrêt, la Cour d'appel de GRENOBLE est amenée à statuer sur le bien-fondé d’une demande de prod

La production forcée de documents
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CA GRENOBLE, 04 janvier 2022, RG n° 21/02944 *

Par cet arrêt, dont l'infographie synthétique est téléchargeable, la Cour d'appel de GRENOBLE est amenée à statuer sur le bien-fondé d’une demande de production forcée de documents formulée par un salarié invoquant une rupture d’égalité en matière de salaire.

A cette fin, après son licenciement, un salarié, occupant au dernier état de la relation contractuelle un poste de chargé d’affaires, a saisi le Conseil de prud’hommes, en référé, aux fins de transmission par son employeur d'un certain nombre de documents.


Plus précisément, il sollicitait, d’une part, des éléments portant sur la situation professionnelle d’anciens collègues occupant des postes différents que le sien et, d’autre part, des éléments d’un salarié pour le versement d’une prime pour laquelle il pouvait potentiellement en réclamer le bénéfice.

Dans ce type de demande, deux droits s’opposent :

  • D’un côté, la vie privée des salariés dont les documents sont réclamés puisque lesdits documents comportent des informations confidentielles, de type rémunération, adresse personnelle, classification…
  • De l’autre, le droit à la preuve du salarié à l’origine de l’action puisque sa demande de production forcée est son seul moyen pour parvenir à ces fins.

En la matière, l’article 145 du code de procédure civile dispose que s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.

Plus particulièrement, en droit du travail, la chambre sociale de la Cour de cassation a donné des précisions dans la marche à suivre pour les juges du fond en vue d’examiner une telle demande. Ainsi, il leur appartient de vérifier si les mesures demandées étaient nécessaires à l'exercice du droit à la preuve de la partie qui les sollicitait et ne portaient pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie personnelle des salariés concernés (Cass. soc., 16 novembre 2016, n° 15-17.163).

Ainsi, dès lors qu’un salarié justifie d’un motif légitime à obtenir la communication de documents nécessaires à la protection de ses droits, dont seul l'employeur disposait et qu'il refusait de communiquer, et sans qu’une atteinte excessive et disproportionnée à la vie privée d’autres personnes ne soit avérée, le juge peut ordonner, sous astreinte, la communication desdits documents à l’encontre de l’employeur (Cass. soc., 19 décembre 2012, n° 10-20.526).

En l’espèce, la Cour d’appel de GRENOBLE se fonde sur ces différents jurisprudences pour statuer sur la demande du salarié.

Ainsi, selon elle, le salarié, qui sollicite la communication d'un certain nombre d'éléments liés à la classification et à la rémunération de nombreux salariés de l'entreprise pouvant porter atteinte à leur vie privée au nom du principe de l'égalité de traitement, doit énoncer des indices et éléments précis et concrets laissant présumer un manquement par l'employeur au principe « À travail égal, salaire égal ».

La production sollicitée doit par ailleurs non seulement être indispensable à l'exercice de ce droit mais l'atteinte doit être proportionnée au but poursuivi.


Or, la Cour reproche au salarié l'absence de commencement de preuve laissant présumer qu'il effectuerait une partie des missions des salariés auxquels il se compare. Ainsi, le seul fait qu'il ait pu bénéficier d'un véhicule de service au même titre que ces derniers est insuffisant à justifier l'atteinte à la vie privée desdits salariés parla production de leurs noms, résultats d'objectifs, évolution de carrière, classification, ancienneté, rémunération.

En revanche, le salarié apportait des éléments suffisants pour ordonner la production de certains documents sans porter une atteinte excessive à la vie privée du seul salarié concerné pour le versement d'une prime auquel il pouvait potentiellement en revendiquer le paiement.

Partant, la Cour fait droit partiellement à cette document de production.

Maître Florent LABRUGERE

Avocat au Barreau de LYON

https://www.labrugere-avocat-lyon.fr/


N.B : On ne sait pas, au jour de la rédaction de ce billet, si l’arrêt est définitif et n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.

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