Les réserves motivées dans le cadre d'une déclaration d'accident du travail

Publié le 07/06/2021 Vu 4 815 fois 0
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Par cet arrêt, la Cour d'appel de PARIS rappelle l’obligation pour la CPAM de diligenter une instruction en cas de réserves motivées, formulées en temps utile, lors de la déclaration d’un accident du travail.

Par cet arrêt, la Cour d'appel de PARIS rappelle l’obligation pour la CPAM de diligenter une instruction e

Les réserves motivées dans le cadre d'une déclaration d'accident du travail
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CA PARIS, 28 mai 2021, RG n° 17/06106 *

Par cet arrêt, dont l'infographie synthétique est téléchargeable, la Cour d'appel de PARIS rappelle l’obligation pour la CPAM de diligenter une instruction en cas de réserves motivées, formulées en temps utile, lors de la déclaration d’un accident du travail.


Au cas présent, un salarié, conducteur de bus, a déclaré à son employeur qu'en descendant du bus, il aurait fait un faux mouvement et se serait bloqué le dos. En procédant à la déclaration de l’accident, l’employeur a joint à sa déclaration le courrier de réserves rédigé en ces termes :

« Nous vous adressons, ci-après, la déclaration d'accident du travail relative à l'accident dont déclare avoir été victime l'un de nos salariés monsieur A, le 22/12/2014. Compte tenu des circonstances, nous émettons les plus expresses réserves sur la matérialité de l'accident du travail et l'imputabilité des lésions au travail.

Notre salarié a déclaré ' avoir fait un faux mouvement en descendant du bus et s'être bloqué le dos' alors même qu'il n'effectuait aucun geste de travail. En effet, monsieur A nous informe qu'il descendait simplement du bus. En effet, aucun fait accidentel n'est allégué ou établi, de sorte que nous considérons que ces douleurs sont due exclusivement à un état pathologique indépendant de toute activité professionnelle. Par ailleurs cet état pathologique n'a pas pu être aggravé par les conditions de travail de l'intéressé qui, le jour de l'accident, étaient tout à fait normales et habituelles, l'intéressé n'ayant eu aucun effort particulier à fournir.

Ainsi, il n'existe pas de preuve que la douleur soit imputable à un accident que se serait produit par le fait ou à l'occasion du travail, ni même de faisceau d'indices graves, précis et concordants militant en faveur de cette imputabilité. Compte tenu de l'existence de cet état pathologique, et en l'absence de tout rôle causal du travail, la présomption d’origine professionnelle rattachée à cette douleur doit être considérée comme détruite et par conséquent cette douleur ne peut être prise en charge au titre professionnel ».

On rappellera que l’article R. 441-11 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable en la cause, énonce qu’en cas de réserves motivées de la part de l'employeur, la CPAM se doit de diligenter une instruction en adressant un questionnaire aux protagonistes concernés ou procède à une enquête auprès de ces derniers.

Le texte légal ne donne aucune définition de ce qu’il faut entendre par réserves motivées. La jurisprudence a ainsi été établie depuis longtemps que « les réserves visées par ce texte s'entendant de la contestation du caractère professionnel de l'accident par l'employeur ne peuvent porter que sur les circonstances de temps et de lieu de celui-ci ou sur l'existence d'une cause totalement étrangère au travail » (Cass. civ. 2ème, 10 juillet 2008, n° 07-18.110).

Encore récemment, elle a rappelé cette jurisprudence (Cass. civ. 2ème, 18 mars 2021, n° 20-10.411).

Deux précisions doivent être apportées :

  • Les réserves doivent être formulées en temps utile, soit en général, au moment de la déclaration d’accident du travail. Ainsi, des réserves portées à la connaissance de la CPAM au moment de sa décision de prise en charge sont trop tardives, de telle sorte que la CPAM n’est pas tenue de diligenter une instruction (Cass. civ. 2ème, 18 septembre 2014, n° 13-23.205).

  • Au stade de la rédaction de ces réserves, l’employeur n’a pas à rapporter la preuve absolue que l’accident contesté n’a pas un caractère professionnel. Dès lors, la CPAM n’a pas à apprécier leur bien-fondé, ce qui sera le but de l’enquête (Cass. civ. 2ème, 26 novembre 2020, n° 19-20.058).

Au cas d’espèce, la Cour examine le contenu de la lettre de réserves susvisée. Or, elle note que la société a expressément émis des réserves motivées en relevant, d'une part, l'absence de fait accidentel et en évoquant, d'autre part, le rattachement de la lésion à un état pathologique indépendant.

La CPAM aurait donc dû diligenter une instruction, ce qu’elle n’a pas fait. Dès lors, elle sanction cette carence en déclarant inopposable à l’employeur la décision de prise en charge de l’accident du travail déclaré par son salarié.

Cette solution a pleinement vocation à s’appliquer à la nouvelle procédure d’instruction des accidents du travail applicables depuis le 1er décembre 2019. Le nouvel article R. 441-6 du code de la sécurité sociale ne pose, là encore, aucune définition des réserves motivées. Cependant, il fixe un délai de dix jours à compter de la déclaration d’accident du travail au terme duquel l’employeur peut émettre des réserves. Ainsi, en cas de dépassement de ce délai, la CPAM ne sera plus tenue de diligenter une instruction.

Toutefois, une question reste en suspens : les réserves doivent-elles avoir été reçues par la CPAM avant l’expiration du délai de dix jours ou bien doivent-elles simplement avoir été adressées dans ce même délai ? Il s’agira donc de trancher la question entre la théorie de l’émission et celle de la réception des réserves motivées.
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Maître Florent LABRUGERE

Avocat au Barreau de LYON

https://www.labrugere-avocat-lyon.fr/


N.B : On ne sait pas, au jour de la rédaction de ce billet, si l'arrêt est définitif et n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.

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