CA RIOM, 10 mai 2022, RG n° 19/01992 *
Par cet arrêt, dont l'infographie synthétique est téléchargeable, la Cour d'appel de RIOM est amenée à apprécier la régularité formelle d’un licenciement par rapport à la personne signataire de la lettre de licenciement.
En la matière, le code du travail ne prévoit aucune règle spécifique. La jurisprudence est venue préciser les règles applicables dans ce domaine.
En premier lieu, l’absence de signature de la lettre de licenciement rend irrégulière la procédure (Cass. soc., 5 janvier 2005, n° 02-47.290).
En revanche, une absence de signature ne rend pas la rupture du contrat de travail abusive (Cass. soc., 4 avril 2012, n° 10-28.266).
En second lieu, la personne signataire de la lettre de licenciement doit disposer du pouvoir de licencier.
Tel n’est pas le cas par exemple d’une personne extérieure à l’entreprise comme le cabinet d’expertise comptable (Cass. soc., 26 avril 2017, n° 15-25.204).
En revanche, selon la jurisprudence, aucune disposition n'exige que la délégation du pouvoir de licencier soit donnée par écrit. Celle-ci peut être tacite et découler des fonctions du salarié qui conduit la procédure de licenciement. Tel est le cas d’un responsable des ressources humaines (Cass. ch. mixte., 19 novembre 2010, no°10-10.095).
Dans le cadre d’une association, le pouvoir de licencier appartient, en principe, à son Président, sauf disposition statutaire contraire (Cass. soc., 29 septembre 2004, n° 02-43.771).
En cas de signature par une personne incompétence, la procédure de licenciement est non seulement irrégulière mais prive également le licenciement de cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 20 octobre 2021, n° 20-11.485).
La sanction est donc plus sévère que l’hypothèse précédente d’une absence de signature.
Au cas d’espèce, une salariée avait été embauchée par une Association en qualité d’éducatrice spécialisée, Association comprenant plusieurs établissements. Après une procédure de licenciement engagée à son encontre, elle a été licenciée pour faute grave.
Après avoir rappelé la jurisprudence susvisée, la Cour d’appel de RIOM relève que la lettre de licenciement notifiée à la salariée avait été signée par un directeur de site qui aurait reçu délégation de licencier par le Directeur général de l’Association.
Or, elle constate que si les statuts de l’Association permettait à son Président de déléguer certains de ses pouvoirs au Directeur général, ceci était néanmoins limité aux seuls actes de gestion des établissements et services, soit des activités administratives et financières au nombre desquelles ne peut figurer le pouvoir de licencier.
Au surplus, les pouvoirs faisant l'objet d'une délégation au Directeur général devaient être fixés et précisés dans le cadre d'un document unique de délégations qui n'a pas été produit aux débats.
Il n'était ainsi pas démontré que le directeur général de l'association aurait reçu une quelconque délégation de la part du président de l'association.
Dans ces conditions, la délégation du Directeur général donnée au directeur du site pour notifier le licenciement de la salariée n'est également pas valable et ne produit aucun effet.
Dès lors, l'absence de pouvoir du signataire de la lettre de rupture prive le licenciement de cause réelle et sérieuse, de sorte que la Cour d’appel condamne l’employeur sur ce point.
Maître Florent LABRUGERE
Avocat au Barreau de LYON
https://www.labrugere-avocat-lyon.fr/
N.B : On ne sait pas, au jour de la rédaction de ce billet, si l’arrêt est définitif et n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.