Suite à l’épidémie consécutive au covid-19 et de la période de confinement instaurée au niveau national, de plus en plus d’entreprises ont eu recours au télétravail.
L’article L. 1222-9 du code du travail définit le télétravail comme « toute forme d'organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l'employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux de façon volontaire en utilisant les technologies de l'information et de la communication ».
Autrement dit, le salarié reste à son domicile pour effectuer quotidiennement son travail à l’aide de l’outils informatique à sa disposition et lui permettant de travailler à distance.
Le recours au télétravail doit au préalable être strictement encadré (1) et emporte certaines conséquences pratiques autant pour l’employeur que pour le salarié (2).
1. La mise en place du télétravail
Conformément à l’article L. 1222-9 précité, le télétravail nécessite au préalable :
- L’adoption d’un accord collectif,
- A défaut, une charte élaborée par l’employeur après avis du Comité social et économique,
- A défaut, un accord entre l’employeur et le salarié, le plus souvent formalisé par écrit pour des questions de preuve.
Le contenu de l’un de ces documents est précisément décrit par la disposition susvisée, à savoir :
- Les conditions de passage en télétravail, en particulier en cas d'épisode de pollution mentionné à l'article L. 223-1 du code de l'environnement, et les conditions de retour à une exécution du contrat de travail sans télétravail ;
- Les modalités d'acceptation par le salarié des conditions de mise en œuvre du télétravail ;
- Les modalités de contrôle du temps de travail ou de régulation de la charge de travail ;
- La détermination des plages horaires durant lesquelles l'employeur peut habituellement contacter le salarié en télétravail ;
- Les modalités d'accès des travailleurs handicapés à une organisation en télétravail, en application des mesures prévues à l'article L. 5213-6.
Dans le même sens, l’employeur ne peut revenir unilatéralement sur le recours au télétravail dès lors que celui-ci a fait l’objet d’un accord avec le salarié (Cass. soc., 31 mai 2006, n° 04-43.592).
En cas de demande du salarié d’une telle mise en place, l’employeur devra motiver, par des raisons objectives, son éventuel refus.
En revanche, l’article L. 1222-11 du code du travail précise qu’en cas de circonstances exceptionnelles, notamment de menace d’épidémie, le recours au télétravail constitue un simple « un aménagement du poste de travail ».
Sur le fondement de cette disposition, le Gouvernement a ainsi considéré dans ses questions/réponses « TÉLÉTRAVAIL & DÉCONFINEMENT » (voir le document joint à cet article) que cette disposition permettait à l’employeur de courir au télétravail sans l’accord du salarié.
Il convient toutefois de relativiser grandement cette interprétation dès lors que le refus de faire usage du télétravail ne peut justifier à lui seul un licenciement du salarié selon l’article L. 1222-9 précité.
Ainsi, même en période de circonstances exceptionnelles, le refus du salarié de recourir au télétravail ne pourra pas être sanctionné par un licenciement.
2. Sur les conséquences pratiques du télétravail
- Prendre soin des équipements qui lui sont confiés ;
- Aviser immédiatement l'entreprise en cas de panne ou de mauvais fonctionnement de ceux-ci ;
- Se conformer aux règles relatives à la protection des données utilisées et traitées à des fins professionnelles et aux restrictions à l'usage des équipements ou outils informatiques (Internet en particulier) exigées par l'employeur ;
- Respecter et appliquer les politiques de l'entreprise en matière de santé et de sécurité.
- D'informer le salarié de toute restriction à l'usage d'équipements ou outils informatiques ou de services de communication électronique et des sanctions en cas de non-respect de telles restrictions ;
- De lui donner priorité pour occuper ou reprendre un poste sans télétravail qui correspond à ses qualifications et compétences professionnelles et de porter à sa connaissance la disponibilité de tout poste de cette nature ;
- D'organiser chaque année un entretien qui porte notamment sur les conditions d'activité du salarié et sa charge de travail.
En contrepartie de l’occupation à titre professionnel de son domicile se pose la question d’une indemnisation du salarié.
En la matière, le code du travail ne fixe aucune règle. L’accord collectif ou la charte précitées peuvent prévoir une telle indemnisation.
Dans ses questions/réponses « TÉLÉTRAVAIL & DÉCONFINEMENT » publiées lors de l’état d’urgence sanitaire (voir le document joint à cet article), l’administration a estimé que l’employeur ne devait aucunement indemniser un télétravailleur en l’absence de dispositions particulières sur ce point.
Là encore, cette interprétation apparaît plus que surprenante au vu de la jurisprudence de la Cour de cassation dans ce domaine. En effet, « l'occupation, à la demande de l'employeur, du domicile du salarié à des fins professionnelles constitue une immixtion dans la vie privée de celui-ci et n'entre pas dans l'économie générale du contrat de travail ; que si le salarié, qui n'est tenu ni d'accepter de travailler à son domicile, ni d'y installer ses dossiers et ses instruments de travail, accède à la demande de son employeur, ce dernier doit l'indemniser de cette sujétion particulière ainsi que des frais engendrés par l'occupation à titre professionnel du domicile » (Cass. soc., 7 avril 2010, 08-44.865 ; Cass. soc., 8 novembre 2017, n° 16-18.499).
Outre cette indemnisation au titre de l’occupation du domicile à des fins professionnelles, le salarié peut également réclamer le remboursement de ses frais professionnels engendrés par l'exercice de l'activité au domicile du salarié, ce qui a d’ailleurs été récemment rappelé par la Cour d’appel de PARIS (CA PARIS, 22 janvier 2020, RG n° 16/14494).
Il pourrait ainsi par exemple réclamer le remboursement d’une partie de son abonnement internet ou encore de sa facture d’électricité.
Enfin, on notera qu’un accident survenu à son domicile pendant le temps de travail est présumé être un accident du travail au sens de l’article L. 411-1 du code de la sécurité sociale.
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Compte tenu des conséquences pratiques de l’usage du télétravail, il apparaît indispensable d’encadrer au niveau de chaque entreprise un tel recours. Le Cabinet se tient donc à votre disposition pour adopter un accord collectif ou établir une charte en la matière mais également pour examiner une situation individuelle.
Maître Florent LABRUGERE
Avocat au Barreau de LYON
https://www.labrugere-avocat-lyon.fr/
N.B : Cet article est mis en ligne uniquement à des fins d'information. En raison de l'évolution permanente de la législation et la jurisprudence, le Cabinet ne peut toutefois pas garantir son application actuelle et vous invite à l’interroger pour toute question juridique ou problème concernant le thème évoqué.