CA GRENOBLE, 29 avril 2021, RG n° 18/03636 *
Par cet arrêt, dont l'infographie synthétique est téléchargeable, la Cour d'appel de GRENOBLE rappelle les conditions de prise en charge d’une maladie professionnelle.
Au cas présent, sur la base d'un certificat médical initial faisant état d’une « tendinite sévère de l'épaule gauche (tableau 57A) », un salarié a déposé auprès de la CPAM une déclaration de malade professionnelle.
Après instruction, cette dernière a rendu une décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle et du tableau n° 57 A relatif à une rupture de la coiffe des rotateurs. L’employeur a saisi les juridictions de sécurité sociale en vue d’obtenir l’inopposabilité de cette décision.
Pour rappel, conformément à l’article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, est présumé d’origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées dans l’un desdits tableaux.
Afin de bénéficier de cette présomption d’imputabilité, encore faut-il remplir les conditions fixées par ces tableaux, à savoir :
- Une maladie directement désignée par l’un des tableaux de maladies professionnelles,
- La condition relative au délai de prise en charge,
- La condition relative à l’exposition au risque.
En l’espèce, la Cour est revenue sur ces trois conditions.
Tout d’abord, elle relève une contradiction entre la pathologie déclarée par le salarié et celle finalement mentionnée dans la décision de prise en charge adressée par la CPAM à l’employeur. En effet, autant le certificat médical initial que la déclaration de maladie professionnelle faisaient état d’une tendinite sévère. Or, la décision de prise en charge faisait référence à une rupture de la coiffe des rotateurs.
Au vu de cette contradiction, alors que les tableaux visés par le code de la sécurité sociale ont un caractère limitatif, la Cour en conclut que la pathologie instruite ne correspondait pas à une maladie du tableau n° 57 A.
S’agissant du délai de prise en charge, on rappellera que celui-ci correspond à la période au cours de laquelle, après cessation de l'exposition au risque, la maladie doit se révéler et être médicalement constatée pour être indemnisée au titre des maladies professionnelles. Il s’agit, en réalité, de la date de première constatation médicale de la pathologie qui doit intervenir dans un laps de temps déterminé.
En l’espèce, le délai de prise en charge est fixé à un an. Le salarié ne travaillait plus depuis le 27 janvier 2016, de sorte qu’il aurait dû faire constater médicalement sa maladie avant le 26 janvier 2017. Or, le certificat médical initial accompagnant la déclaration de maladie professionnelle a été établi le 31 janvier 2018, soit quelques jours après la date butoir.
Par ailleurs, aucun document médical n’était produit par la CPAM pour justifier d’une première constatation médicale antérieure à la date d’établissement du certificat médical initial.
Dès lors, cette condition n’était également pas remplie.
Enfin, sur l’exposition au risque, le tableau n° 57 A fixe une liste limitative de travaux susceptibles de provoquer une rupture de la coiffe, à savoir :
« Travaux comportant des mouvements ou le maintien de l'épaule sans soutien en abduction (**) :
- avec un angle supérieur ou égal à 60° pendant au moins deux heures par jour en cumulé
Ou
- avec un angle supérieur ou égal à 90° pendant au moins une heure par jour en cumulé ».
Or, le salarié a lui-même renseigné le questionnaire d'enquête en indiquant avoir pu réaliser des mouvements de décollement du bras gauche par rapport au corps en abduction de plus de 60° et de plus de 90° mais respectivement pendant moins de 2 heures et moins d'1 heure par jour.
Partant, là encore, cette condition n’était pas respectée.
Compte tenu de ces éléments, la Cour d’appel a déclaré inopposable à l’employeur la décision de prise en charge.
Maître Florent LABRUGERE
Avocat au Barreau de LYON
https://www.labrugere-avocat-lyon.fr/
N.B : On ne sait pas, au jour de la rédaction de ce billet, si l' arrêt cité est définitif et n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.