Pour mémoire, la contre-visite médicale prévue à l'article 7 de l'Accord national interprofessionnel du 10 décembre 1977 sur la mensualisation s'est vu donner une valeur législative par la loi du 19 janvier 1978.
- Eléments contrôlés par la contre-visite médicale
La contre-visite médicale permet de vérifier :
- que l'arrêt de travail du salarié est fondé ; [1]
- que la durée de l'arrêt de travail est justifiée ; [2]
- que le salarié respecte les horaires de sorties autorisés pendant son arrêt de travail. [3]
- Procédure de la contre visite
Les conditions d'application de la contre-visite médicale sont jurisprudentielle. Â
La Cour de cassation s'est prononcée aussi bien sur les contre-visites prévues par les conventions collectives que sur la contre-visite prévue par le code du travail.
2.1 A la demande de l'employeur
L'employeur a la possibilité de faire procéder à une contre-visite au domicile de ses salariés par le médecin de son choix. En effet, l'article L. 1226-1 du code du travail prévoit que l'absence justifiée par l'incapacité résultant de maladie ou d'accident doit être constatée par certificat médical et par une contre-visite organisée par l'employeur s'il y a lieu.[4]
Pour cela, il communique au médecin-contrôleur l'adresse du salarié qui doit faire l'objet de la contre-visite, sans pour autant porter atteinte à l'intimité de la vie privée du salarié.[5]
Antérieurement au contrôle, l'employeur n'a pas à prévenir le salarié de la contre-visite[6]. De plus, cette dernière n'est subordonnée à aucune consultation préalable par le médecin-contrôleur du dossier médical détenu par le médecin traitant du salarié.[7]
Le médecin contrôleur est librement mandaté par l'employeur[8] qui, dans la pratique, fait le plus souvent appel à des organismes spécialisés dans le contrôle médical ayant généralement une compétence nationale et dont l'objectif déclaré est de lutter contre l'absentéisme. Dès lors le salarié, n'est en mesure de substituer aucune autre mesure de son choix, telle une visite par un médecin expert. (sauf convention collective contraire prévoyant que le contrôle sera exercé par un praticien choisi parmi ceux figurant sur la liste des experts près des tribunaux.)
Le médecin visiteur doit décliner au salarié sa qualité de docteur en médecine et celle de mandataire de l'employeur.
2.2 En cas de refus du salarié
Le principe veut que le salarié ne puisse  refuser le contrôle médical
Lorsqu'un accord prévoit expressément une contre-visite médicale comme condition du versement des indemnités complémentaires de maladie, le salarié ne peut refuser de s'y soumettre sans commettre un manquement à son obligation, manquement qui le prive du bénéfice des indemnités.[9]
Le salarié ne peut exiger ni la présence du médecin traitant ni la présence du médecin de la Sécurité sociale si cette présence n'est pas prévue par la convention collective.[10] En effet, est assimilé à un refus de se soumettre à la contre-visite médicale, le fait de n'accepter la contre-visite qu'en présence du médecin traitant (ou d'un médecin choisi par le salarié), alors qu' une telle exigence n'est pas prévue par la convention collective applicable » [11]
En revanche est un motif légitime de refuser la contre-visite médicale :
- La pratique d'un examen clinique douloureux dès lors que le salarié propose au médecin contrôleur de consulter son dossier médical et les comptes rendus opératoires ; [12]
- Le fait que le médecin ne décline pas sa qualité de docteur en médecine et celle de mandataire de l'employeur.[13]
2.3 En cas d'absence du salarié : Â
En cas d'absence injustifiée du salarié à son domicile ce dernier perd le bénéfice des indemnités complémentaires si, absent de son domicile, il n'a pu se soumettre à la contre-visite et n'a pas été en mesure, à la demande de son employeur, de justifier des motifs de son absence.[14]
A contrario, si l'absence du salarié de son domicile est justifiée, l'employeur ne peut pas suspendre le versement des indemnités complémentaires.[15]
Il ne peut être tenu compte de l'absence du salarié lors de la visite du médecin contrôleur si cette visite a lieu pendant les heures de sorties autorisées.[16]
Dans ce cadre, le salarié doit aviser son employeur de son lieu de repos pendant l'arrêt de travail situé hors de sa résidence habituelle ou si il est autorisé par son médecin traitant à se rendre à la montagne pour y passer sa convalescence.
En s'abstenant de remplir ces formalités, le salarié ne permet pas le contrôle de son état de santé. L'employeur n'est donc pas tenu de lui verser une indemnisation complémentaire.[17]
En revanche, en cas d'arrêt maladie survenu à l'étranger, pendant les congés annuels du salarié par exemple, l'employeur qui ne peut faire effectuer le contrôle vu l'éloignement du salarié, ne peut cependant pas lui supprimer les indemnités complémentaires.[18]
Dans tous les cas, il appartient à l'employeur qui a pris l'initiative du contrôle d'établir qu'il n'a pu faire procéder à la contre-visite en raison de la carence ou de l'opposition du salarié.[19]
- Conséquence de la contre visite
Le salarié qui ne s'est pas plié à la contre-visite perd le bénéfice des indemnités complémentaires de maladie. Mais l'impossibilité de faire procéder à une contre-visite ne peut priver le salarié du complément de salaire pour la période antérieure à la date de la visite.[20]
La Cour de cassation a également précisé que « si l'absence du salarié de son domicile lors de la contre-visite peut entraîner la perte du droit à indemnisation complémentaire, elle ne peut, en soi, constituer une cause de licenciement ».[21]
Le salarié doit se soumettre à la décision du médecin qui a effectué la contre-visite. Ainsi, il doit reprendre le travail à la date fixée par le médecin-contrôleur, sous peine de perdre le bénéfice des indemnités complémentaires.[22]
La prolongation d'arrêt de travail prescrite par le médecin traitant, postérieurement au contrôle médical de l'arrêt de travail, rétablit le salarié dans son droit aux indemnités complémentaires de maladie et si l'employeur conteste ce droit, il lui appartient de faire procéder à un nouveau contrôle médical.[23]
Si le salarié conteste les résultats de la contre-visite, il lui appartient de solliciter une autre contre-visite ou de demander une expertise judiciaire.[24]
Le salarié qui conteste les conclusions du médecin-contrôleur peut saisir le juge des référés aux fins de désignation d'un médecin-expert. [25]
Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).
Gaël Collin
Avocat à la Cour
38 rue de Lisbonne - 75008 Paris
[1] Cass. soc., 26 octobre 1982, n° 80-40.875
[2] Cass. soc., 17 avril 1980, n° 78-41.878
[3] Cass. soc., 27 avril 1983, n° 81-40.387
[4] Cet article renvoie à un décret le soin de déterminer les formes et les conditions de la contre-visite.  Le fait que ce texte ne soit jamais paru ne peut entraver l'application de cet article. (Cass. soc., 10 novembre 2010, n° 09-41.628)
[5] Cass. soc., 2 juin 1981, n° 80-10.935
[6] Cass. soc., 4 décembre 1986, n° 85-43.357
[7] Cass. soc., 2 juillet 1980, n° 79-40.283
[8] Cass. soc., 2 juillet 1980, n° 79-40.263
[9] Cass. soc., 3 mai 1979, n° 77-41.312
[10] Cass. soc., 22 juillet 1986, n° 84-41.588
[11] Cass. soc., 8 juin 1983, n° 81-40.801
[12] Cass. soc., 13 février 1996, n° 92-40.713
[13] Cass. soc., 10 février 1998, n° 95-41.600
[14] Cass. soc., 28 avril 1981, n° 79-41.806
[15] Cass. soc., 20 novembre 1986, n° 84-40.217
[16] Cass. soc., 26 septembre 2012, n° 11-18.937
[17] Cass. soc., 13 mai 1992, n° 88-44.963
[18] Cass. soc., 5 juillet 1995, n° 92-40.235
[19] Cass. soc., 30 juin 1988, n° 86-41.898
[20] Cass. soc., 15 octobre 1987, n° 85-40.555
[21] Cass. soc., 10 novembre 1998, n° 96-42.969
[22] Cass. soc., 17 avril 1980,  n° 78-41.878
[23] Cass. soc., 5 mars 1997, n°75-89.158
[24] Cass. soc., 26 octobre 1982, n° 80-40.875
[25] Cass. soc., 28 février 1996, n° 92-42.021