Lorsqu'une société souhaite organiser une loterie publicitaire, dans le cadre promotionnel d’une marque, permettant de faire gagner aux acheteurs des produits de cette société elle devra avant tout suivre quelques obligations.
I – Loterie avec ou sans « obligation d’achat »
Est-‐il possible en France d’organiser une loterie publicitaire conditionnée à une obligation d'achat ?
A- Ancienne législation :
Selon l’ancienne disposition L121-‐36 du code de consommation:
« Les opérations publicitaires réalisées par voie d'écrit qui tendent à faire naître l'espérance d'un gain attribué à chacun des participants, quelles que soient les modalités de tirage au sort, ne peuvent être pratiquées que si elles n'imposent aux participants aucune contrepartie financière ni dépense sous quelque forme que ce soit. »
L’interdiction de principe des loteries commerciales avec obligation d’achat posée par la législation Française (L121-‐36 du code de consommation) n’était pas conforme aux dispositions de la directive 2005/29 du 11 mai 2005 sur les pratiques commerciales déloyales. Cette solution fut retenue par la Cour de justice de l’Union Européenne par un arrêt du 14 janvier 2009. (Cf. CJCE Avril 2009 à propos de l’interdiction des ventes liées et des ventes avec prime).
Afin d’écarter le risque d’une condamnation européenne pour défaut de transposition de la directive Européenne (transposition partielle), l’article 45 de la loi n°2011-‐525 du 17 mai 2011 dite « loi de simplification et d’amélioration de la qualité du droit », est venu compléter l’article L.121-‐36 alinéa 1er du Code de la Consommation cité précédemment.
B- Droit applicable :
La loi du 17 mai 2011 modifie le Code de la consommation et rend désormais licite les loteries conditionnées à une obligation d’achat. Selon ses dispositions :
« Lorsque la participation à cette opération est conditionnée à une obligation d'achat, la pratique n'est illicite que dans la mesure où elle revêt un caractère déloyal au sens de l'article L. 120-‐1. »
L’article L.121-‐36 se trouvant modifié par la loi du 17 mai 2011, la loi du 21 mai 1836 portant prohibition des loteries, en revanche, elle ne l’est pas. Il faut donc insister sur le caractère commercial des loteries qui ne sont pas des loteries dites « pures » telles que visées par la loi du 21 mai 1836. Cela permet de confirmer le statut à part de la réglementation des loteries contenue dans le code de la consommation qui ne s’applique dès lors pas aux loteries qui ne seraient pas des loteries publicitaires.
Les loteries publicitaires avec obligation d’achat sont donc désormais licites par la législation Française à condition de ne pas présenter un caractère déloyal. En l’espèce, la société pourra organiser une loterie commerciale avec obligation d’achat de carte pour promouvoir cette dernière si celle-‐ci ne présente pas un caractère déloyal.
II- Caractère déloyal susvisé:
Que représente le caractère déloyal ?
A- Législation applicable
L.120-‐1 du Code de la consommation dispose :
«qu’une pratique commerciale est déloyale lorsqu’elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu’elle altère, ou est susceptible d’altérer de manière substantielle, le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l’égard d’un bien ou d’un service».
De plus, L.120-‐1 du Code de la consommation alinéa 2 :
«Le caractère déloyal d'une pratique commerciale visant une catégorie particulière de consommateurs ou un groupe de consommateurs vulnérables en raison d'une infirmité mentale ou physique, de leur âge ou de leur crédulité s'apprécie au regard de la capacité moyenne de discernement de la catégorie ou du groupe.»
Constituent, en particulier, des pratiques commerciales déloyales les pratiques commerciales trompeuses définies aux articles L. 121-‐1 et les pratiques commerciales agressives définies aux articles L. 122-‐11.
B- Jurisprudence
Outre le caractère cumulatif de ces conditions, il est difficile d’appréhender efficacement cette notion, d’autant plus que la jurisprudence a donné à notre connaissance peu d’indications sur la manière dont il fallait apprécier ce caractère déloyal et cette contrariété à la diligence professionnelle. L’on peut énoncer certaine jurisprudence Européenne, comme par exemple exemple CJUE, 9 nov. 2010 qui énonce que le fait de joindre un bulletin de participation pour une loterie à un magazine et d’inciter de ce fait, au moins une partie des consommateurs, à acheter ledit magazine, ne permet pas de caractériser la déloyauté de la pratique.
III -Conditions de dépôt :
- Un règlement établi et déposé chez un huissier avant le lancement de l’opération
- Tenir le règlement du jeu à la disposition des consommateurs à titre gratuit
- Faire figurer les extraits du règlement sur les documents présentant l’opération comportant : les informations essentielles de participation au jeu-‐concours sans oublier nom et adresse de l’huissier distinctes du bon de commande et du bulletin de participation.
- Les mentions du règlement : modalités de participation, mode de désignation du (des) vainqueur(s), dates de début et de fin du jeu, raison sociale, RCS, conditions de remboursement des frais de participation, valeur et nature des lots, nombre de prix à gagner, éventuelles limitations (en raison de l’âge ou de la situation géographique).
Gaël Collin