- En quoi consiste le mécanisme de concertation ?
La concertation répond à un objectif d’information du public et de participation à l’élaboration de certaines décisions en matière d’urbanisme et d’environnement.
Introduite à l’article L. 300-2 du code de l’urbanisme par la loi du 18 juillet 1985, elle devait précéder à l’origine la création des ZAC, l’ouverture à l’urbanisation des zones d’urbanisation future, et les opérations d’aménagement importantes, susceptibles de modifier substantiellement le cadre de vie ou l’activité économique.
Son champ d’application a été étendu progressivement à l’élaboration et à la révision des plans locaux d’urbanisme (PLU) et des schémas de cohérence territoriale (SCoT), ainsi qu’aux projets de renouvellement urbain. Cette dernière notion, introduite par la loi du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, reste floue.
- Quelles sont les modifications apportées par la loi ALUR au champ d’application de la concertation ?
L’apport de la loi ALUR est, pour l’heure théorique. Elle étend le nombre des projets et opérations d’aménagement soumis à concertation, pour inclure « notamment ceux susceptibles d’affecter l’environnement au sens de l’article L. 122-1 du code de l’environnement », c’est-à-dire les projets soumis à étude d’impact, figurant sur une liste arrêtée par décret, et codifiée à l’article R. 300-1.
Or, cet article réglementaire n’a pas été modifié pour mettre à jour la liste qui préexistait à la loi ALUR, et aucun décret en ce sens ne figure sur l’échéancier de mise en application de la loi. Le champ d’application ne sera donc pas matériellement élargi avant que l’article R. 300-1 ne soit mis à jour pour lister les nouveaux projets concernés.
Par ailleurs, la loi ALUR n’apporte ni modification ni clarification sur la notion de « projets de renouvellement urbain ».
- Quelles sont les incidences de la loi ALUR sur les modalités de concertation ?
Les exigences relatives à la concertation en matière d’urbanisme sont à l’origine peu précises. La procédure de concertation doit globalement satisfaire à des principes généraux : être réelle et effective, adaptée et antérieure au projet. De plus, la concertation annoncée doit être suivie d’effets, ce qui implique que les modalités fixées pour la concertation doivent être effectivement mises en œuvre.
En revanche, le choix des modalités de concertation est laissé à la libre appréciation de la personne publique, les textes ne précisant, jusqu’à présent, pas de contenu minimal. En pratique, il s’agit couramment de l’organisation de réunions publiques ou d’ateliers, la tenue de registres à disposition du public, de la présentation du projet par voie de publications dans la presse locale, le bulletin municipal, ou sur le site internet de la collectivité.
La loi ALUR a introduit une précision intéressante à l’article L. 300-2- II, 2°. Auparavant, cet alinéa posait pour seule exigence, concernant les modalités de concertation, qu’elles permettent au public d’accéder aux informations du projet pendant une durée suffisante au regard de son importance.
Dans sa nouvelle rédaction, cet article exige désormais que la concertation se déroule en outre « selon des moyens adaptés au regard de l’importance et des caractéristiques du projet ».
- Quel est l’apport de cet ajout sur le contrôle du juge ?
Le juge administratif peut être saisi d’un recours contre la décision fixant les modalités de la concertation. A ce stade, les nouvelles dispositions procèdent à une codification à droit constant, puisque le juge vérifiait d’ores et déjà l’adaptation des modalités de concertation à l’importance du projet. Rien n’indique toutefois que les collectivités perdent leur liberté de choix quant à la nature des modes de concertation retenus.
En revanche, une fois cette décision définitive, le juge administratif est réticent à contrôler les modalités de concertation qu’elle aura fixées, dans le cadre d’un recours contre le projet abouti. A ce second stade, l’article L. 300-2 conserve le mécanisme selon lequel les documents et opérations soumis à concertation ne sont pas illégaux du seul fait des vices susceptibles d’entacher la concertation, dès lors que les modalités fixées dans la décision initiale ont été respectées. En ce sens, la jurisprudence refuse d’exercer ce contrôle, hormis les cas où la décision initiale omettrait purement et simplement de fixer les modalités de la concertation, ou d’en préciser les objectifs (CE 8 octobre 2012, Cne d’Illats, n° 338760).
- En quoi consiste la nouvelle concertation préalable facultative ?
L’article 170 de la loi ALUR a introduit la possibilité de soumettre un projet n’entrant pas dans le champ de la concertation obligatoire au titre de l’article L.300-2 du code de l'urbanisme, à concertation avant le dépôt de la demande de permis de construire ou d’aménager.
Il peut s’agir de tout projet, public ou privé, dans un secteur couvert par un SCoT, un PLU un document en tenant lieu, ou une carte communale, ne relevant pas de la liste des opérations d’aménagement mentionnées à l’article R. 300-1 du code de l’urbanisme.
Le but affirmé de cette mesure est d’associer, en amont d’un projet, par la concertation, les personnes susceptibles d’y être intéressées ou d’être affectées par sa réalisation, afin de désamorcer, en aval, les risques contentieux.
- La concertation préalable est-elle véritablement facultative ?
Le caractère facultatif est à relativiser selon les trois hypothèses possibles. En premier lieu, l’initiative peut provenir de l’autorité compétente pour délivrer le permis, posant la question des conditions dans lesquelles elle pourrait être informée du projet préalablement au dépôt de la demande de permis.
Dans la deuxième hypothèse, prévue au dernier alinéa du III bis, le préfet ou l’organe délibérant de la collectivité peut décider que certains types de projets seront systématiquement soumis, au vu de leur importance, au mécanisme de la concertation.
Dans la troisième hypothèse, l’initiative appartient au maître de l’ouvrage, avec, dans ce cas, l’accord de l’autorité compétente pour se prononcer sur sa demande. Seul ce cas de figure semble effectivement indiquer une procédure facultative.
- La concertation préalable aura-t-elle une incidence sur la recevabilité des recours ?
Non. Lors des débats à l’Assemblée nationale, un amendement proposait de lier la recevabilité du recours contentieux à la procédure de concertation. A l’inspiration du modèle allemand, les personnes ayant fait part de leurs observations sur un projet dans le cadre d’une concertation préalable, n’auraient plus été admises ensuite à contester le projet concerné si leurs observations avaient été prises en compte.
Mais cette proposition n’a pas été retenue, et l’exercice d’une concertation préalable est sans effet sur la recevabilité d’un éventuel recours contentieux.
Ce qu’il faut retenir : La loi ALUR modifie le champ d’application de la concertation obligatoire pour inclure certains projets soumis à étude d’impact qui devront être listés par décret. Elle précise les modalités d’organisation de la concertation en exigeant que celle-ci soit menée selon des moyens adaptés au regard de l’importance et des caractéristiques du projet. L’apport le plus notable introduit par la loi ALUR est la procédure de concertation facultative, préalable aux projets de permis de construire ou d’aménager, dans le but de « désamorcer » les contentieux.
Ismaël TOUMI Avocat
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