En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, la charge de la preuve appartient aussi bien à l'employeur qu'au salarié (c. trav. art. L. 3171-4). Le salarié, qui prétend avoir effectué des heures supplémentaires et qui en réclame le paiement, doit préalablement fournir au juge des éléments pour étayer sa demande. C'est uniquement dans un second temps que l'employeur devra fournir des éléments pour prouver les horaires effectivement réalisés par le salarié. Ainsi, lorsque l'employeur ne fournit aucun élément de nature à justifier les horaires réalisés par le salarié et se borne à contester le décompte fourni par le salarié sans en proposer un autre, il peut être condamné à régler un rappel de salaire.
Cass. soc. 26 novembre 2008, n° 07-42773 FD
« LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 27 mars 2007), que Mme X... a été engagée par la société Excellis le 4 février 2002 en qualité de cadre ; que la salariée a été licenciée le 15 avril 2005 pour fautes graves ; qu'elle a saisi le conseil de prud'hommes d'une contestation de son licenciement et de diverses demandes en paiement ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'avoir décidé que Mme X... avait effectué des heures supplémentaires et d'avoir ordonné une expertise pour en déterminer le nombre, alors, selon le moyen :
1°/ que seul le travail commandé par l'employeur constitue un travail effectif et donne lieu au paiement des heures supplémentaires ; que la société Excellis soutenait qu'elle n'avait jamais demandé à Mme X... d'effectuer des heures supplémentaires ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties ; qu'en affirmant néanmoins, pour considérer que Mme X... avait effectué des heures supplémentaires, que les éléments dont elle faisait état rendaient vraisemblable l'exécution de ces heures et que la société Excellis ne justifiait pas que Mme X... réalisait l'horaire contractuel, ce dont il résultait qu'aucune des parties ne rapportait la preuve que des heures supplémentaires avaient ou n'avaient pas été effectuées, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur la seule société Excellis, a violé l'article L. 212-1-1 du code du travail ;
3°/ qu'en affirmant que la réalité des heures supplémentaires était avérée, après avoir constaté que le décompte fourni par Mme X... n'était pas significatif du nombre d'heures supplémentaires effectuées et que les autres pièces qu'elle produisait rendaient tout au plus vraisemblable l'accomplissement de telles heures, à telle enseigne qu'elle a ordonné une expertise ayant pour objet de déterminer les heures supplémentaires effectuées par Mme X..., sans expliquer sur quels éléments elle s'était fondée pour considérer que le principe des heures supplémentaires était acquis, la cour d'appel a violé l'article 455 code de procédure civile ;
Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel, qui a relevé que l'employeur avait informé la salariée de ce que le poste nécessitait "une grande disponibilité et des horaires flexibles", que la salariée avait averti son employeur de la situation de sous-effectif ainsi que de son obligation d'allonger la durée de son travail et que Mme X... avait réclamé, en vain, des jours de récupération pour les heures supplémentaires exécutées, a répondu aux conclusions prétendument délaissées ;
Et attendu, ensuite, que s'il résulte de l'article L. 212-1-1, devenu l'article L. 3171-4, du code du travail, que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; que la cour d'appel, qui, ayant constaté que la salariée avait versé aux débats des éléments de nature à étayer sa demande, a retenu que l'employeur ne produisait aucun élément, a fait une exacte application de la règle de preuve instituée par le texte précité ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Excelis aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Excelis et la condamne à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille huit. »