Dans le cadre de cet espèce, la question se posait de savoir si les AGS doivent garantir des sommes dues au salarié en raison de la nouvelle mesure de « sauvegarde de l’entreprise » ?
Il résulte de l’article L. 143-11-1, alinéa 2, du Code du travail, (devenu L. 3253-8 du Code du travail) qu’en cas d’ouverture d’une procédure de sauvegarde de l’entreprise, laquelle n’est pas en état de cessation des paiements, seules sont garanties les créances résultant de ruptures intervenues pendant la période d’observation et dans le mois suivant le jugement qui a arrêté le plan de sauvegarde.
Dans l’arrêt d’espèce, un salarié est engagé en qualité de directeur régional, par la Société X, aux droits de laquelle se trouve la Société Y était licencié pour inaptitude.
Le salarié a demandé la condamnation de l’employeur à lui payer des sommes à titre notamment de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Or, pendant l’instance d’appel, la société a fait l’objet d’une procédure de sauvegarde ouverte par jugement du 2 juillet 2007.
L’AGS, appelée en la cause, a contesté devoir sa garantie.
Le 7 novembre 2007, la Cour d’appel de Montpellier a décidé que les condamnations prononcées au bénéfice du salarié seraient, sous réserve de la justification de l’insuffisance des fonds disponibles, garanties dans les limites légales par l’AGS.
Pour les magistrats de la cour d’appel, il résultait des dispositions combinées des articles L. 625-7 du Code de commerce et L. 143-11-7 du Code du travail que la garantie de l’AGS joue lors d’une procédure de sauvegarde des entreprises, sous réserve que le mandataire judiciaire justifie de l’insuffisance des fonds disponibles.
La Cour de cassation adopte un raisonnement contraire : « …il résulte de l’article L. 143-11-1, alinéa 2, du Code du travail, en sa rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005, devenu L. 3253-8 du Code du travail, qu’en cas d’ouverture d’une procédure de sauvegarde de l’entreprise, laquelle n’est pas en état de cessation des paiements, seules sont garanties les créances résultant de ruptures intervenues pendant la période d’observation et dans le mois suivant le jugement qui a arrêté le plan de sauvegarde ».
Ainsi, seules sont garanties les créances résultant de ruptures intervenues pendant la période d’observation et dans le mois suivant le jugement qui a arrêté le plan de sauvegarde.
Le raisonnement de la Cour d’Appel n’était pourtant pas illogique : la procédure de sauvegarde des entreprises intervient alors que l'entreprise n'est pas encore en état de cessation de paiements, mais doit faire face à des difficultés qui, à défaut de mesures appropriées, pourraient conduire à cet état. Cela explique que, dans le cas d'une procédure de sauvegarde, le mandataire judiciaire devrait justifier auprès de l'AGS, lors de sa demande, que l'insuffisance des fonds disponibles est caractérisée.
Cass. soc. 10 mars 2009
« Attendu, selon l’arrêt attaqué, qu’engagé le 10 mars 1986, en qualité de directeur régional, par la société Leporq, aux droits de laquelle se trouve la société Legal Le Goût, M. P. a été licencié pour inaptitude le 25 août 2005 ; que le salarié a demandé la condamnation de l’employeur à lui payer des sommes à titre notamment de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que pendant l’instance d’appel, la société a fait l’objet d’une procédure de sauvegarde ouverte par jugement du 2 juillet 2007 ; que l’AGS, appelée en la cause, a contesté devoir sa garantie ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal :
Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l’admission du pourvoi ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi incident :
Vu l’article L. 143-11-1, alinéa 2, en sa rédaction issue de la loi n° 2005-841 du 26 juillet 2005, devenu L. 3253-8 du Code du travail ;
Attendu que pour dire que les condamnations prononcées au bénéfice du salarié seraient, sous réserve de la justification de l’insuffisance des fonds disponibles, garanties dans les limites légales, l’arrêt retient qu’il résulte des dispositions combinées des articles L. 625-7 du Code de commerce et L. 143-11-7 du Code du travail que la garantie de l’AGS joue lors d’une procédure de sauvegarde des entreprises, sous réserve que le mandataire judiciaire justifie de l’insuffisance des fonds disponibles ;
Attendu cependant qu’il résulte de l’article L. 143-11-1, alinéa 2, du Code du travail, en sa rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005, devenu L. 3253-8 du Code du travail, qu’en cas d’ouverture d’une procédure de sauvegarde de l’entreprise, laquelle n’est pas en état de cessation des paiements, seules sont garanties les créances résultant de ruptures intervenues pendant la période d’observation et dans le mois suivant le jugement qui a arrêté le plan de sauvegarde ;
Qu’en statuant comme elle a fait, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu à renvoi, la Cour de cassation étant en mesure, en vertu de l'article 627 du Code de procédure civile, de mettre fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a dit que les condamnations bénéficient de la garantie de l’AGS dans les limites légales et sous réserve de la justification de l’insuffisance des fonds disponibles par le mandataire judiciaire ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ;
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