Par un arrêt rendu le 17 juin 2009, le Conseil d’Etat a jugé qu’hormis le seul cas où le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour la santé ou la sécurité du salarié, les deux visites médicales espacées de 15 jours sont nécessaires dans tous les cas d’inaptitude, y compris dans le cadre d’un recrutement du salarié, à l’issu duquel médecin du travail constate l’inaptitude du salarié.
En l'espèce, un établissement bancaire saisissait le Conseil d'Etat à propos de l'avis du médecin du travail constatant l'inaptitude d'une salariée à l'exercice de ses fonctions de directrice de crèche.
Le juge administratif rappelle qu'aux termes de l'article L4624-1 du Code du travail, le médecin du travail était habilité à proposer des mesures individuelles, telles que mutations ou transformations de postes, justifiées par des considérations relatives notamment à l'âge, à la résistance physique ou à l'état de santé physique et mentale des travailleurs.
Dans ce cas, l’employeur était tenu de prendre en considération ces propositions et, en cas de refus, de faire connaître les motifs qui s'opposent à ce qu'il y soit donné suite.
Le Conseil d’Etat ajoute que le recours administratif devant l’inspecteur du travail est ouvert, en cas de difficulté ou de désaccord sur l’avis du médecin du travail, notamment, à tous les salariés recrutés faisant l’objet d’une appréciation de leur aptitude par le médecin du travail et non pas seulement à ceux qui ont été définitivement recrutés au terme de leur période d’essai.
Le juge administratif s’appui sur l'article R4624-10 qui impose que tout salarié fasse l'objet d'un examen médical avant l'embauchage ou au plus tard avant l'expiration de la période d'essai qui suit l'embauchage.
Cet examen médical a pour but :
- de rechercher si le salarié n'est pas atteint d'une affection dangereuse pour les autres travailleurs
- de s'assurer qu'il est médicalement apte au poste de travail auquel le chef d'établissement envisage de l'affecter
- de proposer éventuellement les adaptations du poste ou l'affectation à d'autres postes.
En outre le conseil d’Etat rappelle qu’en vertu de l'article R4624-31, sauf dans le cas où le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour la santé ou la sécurité de l'intéressé ou celle des tiers, le médecin du travail ne peut constater l'inaptitude du salarié à son poste de travail qu'après une étude de ce poste et des conditions de travail dans l'entreprise et 2 examens médicaux de l'intéressé espacés de 2 semaines, accompagnés, le cas échéant, d'examens complémentaires.
Enfin, le conseil d’Etat confirme que l'inspecteur du travail est bien compétent lorsqu'il se trouve saisi d'un recours par le salarié qui a fait l'objet d'un avis d'inaptitude par le médecin du travail lors de sa visite médicale d'embauche.
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Conseil d’État, 17 juin 2009, N° 314729
« Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 31 mars et 27 juin 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la SOCIETE LE CREDIT LYONNAIS, dont le siège est 19, boulevard des Italiens à Paris (75002) ; la SOCIETE LE CREDIT LYONNAIS demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler l’arrêt du 30 janvier 2008 par lequel la cour administrative d’appel de Paris, faisant droit au recours du ministre de l’emploi, du travail et de la cohésion sociale, a annulé le jugement du 22 février 2006 du tribunal administratif de Paris annulant la décision du 18 avril 2002 de l’inspecteur du travail infirmant l’avis du 25 janvier 2002 du médecin du travail constatant l’inaptitude de Mme Maguy A à l’exercice de ses fonctions de directrice de crèche ;
2°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
(...)
Considérant qu’aux termes de l’article L. 241-10-1 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable, devenu article L. 4624-1 : Le médecin du travail est habilité à proposer des mesures individuelles telles que mutations ou transformations de postes, justifiées par des considérations relatives notamment à l’âge, à la résistance physique ou à l’état de santé physique et mentale des travailleurs. / Le chef d’entreprise est tenu de prendre en considération ces propositions et, en cas de refus, de faire connaître les motifs qui s’opposent à ce qu’il y soit donné suite. / En cas de difficulté ou de désaccord, la décision est prise par l’inspecteur du travail après avis du médecin-inspecteur du travail. ; qu’aux termes du I de l’article R. 241-48 du même code, dans sa rédaction alors applicable, devenu article R. 4624-10 : Tout salarié fait l’objet d’un examen médical avant l’embauchage ou au plus tard avant l’expiration de la période d’essai qui suit l’embauchage. / Le salarié soumis à une surveillance médicale spéciale définie à l’article R. 241-50 bénéficie obligatoirement de cet examen avant son embauchage. / L’examen médical a pour but : / 1° De rechercher si le salarié n’est pas atteint d’une affection dangereuse pour les autres travailleurs ; / 2° De s’assurer qu’il est médicalement apte au poste de travail auquel le chef d’établissement envisage de l’affecter ; / 3° De proposer éventuellement les adaptations du poste ou l’affectation à d’autres postes. ; qu’enfin, aux termes de l’article R. 241-51-1 du même code, dans sa rédaction alors applicable, devenu article R. 4624-31 : Sauf dans le cas où le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour la santé ou la sécurité de l’intéressé ou celle des tiers, le médecin du travail ne peut constater l’inaptitude du salarié à son poste de travail qu’après une étude de ce poste et des conditions de travail dans l’entreprise et deux examens médicaux de l’intéressé espacés de deux semaines, accompagnés, le cas échéant, des examens complémentaires mentionnés à l’article R. 241-52. / Le médecin du travail peut, avant d’émettre son avis, consulter le médecin inspecteur régional du travail et de la main-d’oeuvre. Les motifs de son avis doivent être consignés dans le dossier médical du salarié. ;
Considérant qu’en jugeant qu’il résulte de ces dispositions que le recours administratif devant l’inspecteur du travail prévu par le dernier alinéa de l’article L. 241-10-1 du code du travail était ouvert, en cas de difficulté ou de désaccord sur l’avis du médecin du travail, notamment, à tous les salariés recrutés faisant l’objet d’une appréciation de leur aptitude par le médecin du travail et non pas seulement à ceux qui ont été définitivement recrutés au terme de leur période d’essai, la cour, qui a suffisamment répondu au moyen tiré par la requérante de ce qu’un tel recours n’était pas ouvert à l’occasion de la visite médicale d’embauche, n’a pas commis d’erreur de droit ;
Considérant que la cour n’a ni entaché son arrêt d’une erreur de droit ni dénaturé les pièces du dossier qui lui étaient soumis en jugeant que l’inspecteur du travail avait pu, sans méconnaître les termes de la demande qui lui était adressée, s’estimer compétemment saisi au titre des dispositions du dernier alinéa de l’article L. 241-10-1 du code du travail par Mme A, qui avait fait l’objet d’un avis d’inaptitude par le médecin du travail lors de sa visite médicale d’embauche ;
Considérant que la cour n’a pas davantage commis d’erreur de droit en jugeant qu’il résultait des dispositions précitées de l’article R. 241-51-1 du code du travail que celles-ci étaient applicables, hormis le seul cas où le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour la santé ou la sécurité de l’intéressé ou celle des tiers, à tous les cas, y compris celui de la visite médicale d’embauche opérée après le recrutement du salarié, dans lesquels le médecin du travail constate l’inaptitude du salarié ; qu’elle n’a pas dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis en estimant que le second examen requis ne constituait pas en l’espèce une formalité impossible et que le maintien de la salariée à son poste de travail n’entraînait pas un danger immédiat pour la santé ou la sécurité de l’intéressée ou celle des tiers ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le pourvoi de la SOCIETE LE CREDIT LYONNAIS doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
Article 1er : Le pourvoi de la SOCIETE LE CREDIT LYONNAIS est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE LE CREDIT LYONNAIS, à Mme Maguy A et au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville. »