Les modes de preuve admissibles devant le conseil de prud'hommes

Publié le 20/07/2014 Vu 66 361 fois 5
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La preuve en matière judiciaire sous-tend deux questions : la charge de la preuve et le mode de preuve autorisé en justice. La charge de la preuve en droit français repose par principe sur le demandeur qui doit amener les éléments au succès de sa prétention. Réciproquement, celui qui se prétend libéré de son obligation doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation. La preuve prud'homale a elle la caractéristique d'être libre : « En matière prud'homale, la preuve est libre. »

La preuve en matière judiciaire sous-tend deux questions : la charge de la preuve et le mode de preuve autori

Les modes de preuve admissibles  devant le conseil de prud'hommes

Prouver c'est « établir, de manière irréfutable et au moyen de faits, de témoignages, de raisonnements, la vérité ou la réalité d'un fait. »

La preuve en matière judiciaire sous-tend deux questions : la charge de la preuve et le mode de preuve autorisé en justice.

La charge de la preuve en droit français repose par principe sur le demandeur qui doit amener les éléments au succès de sa prétention.

Réciproquement, celui qui se prétend libéré de son obligation doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

La preuve prud'homale a elle la caractéristique d'être libre : « En matière prud'homale, la preuve est libre. »

Ce principe a été posé par un arrêt de la chambre sociale du 27 mars 2001 (pourvoi n° 98-44.666, Bull. 2001, V, n° 108.)

La jurisprudence a pris acte sur ce point de la fragilité du salarié face à l'employeur admet une certaine une différence de traitement entre le salarié et l'employeur, afin de permettre à la partie faible de prouver ses prétentions.

Cependant tout n'est pas permis au royaume de la preuve, car face au principe de liberté de la preuve s'élève un autre principe celui de loyauté reconnu et protégé notamment par la Cour européenne des droits de l'homme utilisé pour écarter les preuves illicites du procès, c'est-à-dire obtenues de façon contraires aux libertés individuelles. (respect de la vie privée, dignité de la personne humaine...)

I. Sur la charge de la preuve

Si le droit commun de la preuve est régi par le principe selon lequel « celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver » (article 1315 du Code civil), le droit du travail quant à lui, met en place des règles spécifiques aux fins de rééquilibrer les rapports entre salariés et employeur.

A) La charge de la preuve incombe exclusivement au salarié demandeur dans deux situations bien spécifiques :

- lors de la contestation par celui-ci de la mutation dont il fait l'objet en application d'une clause de mobilité (Cass. soc. 23 février 2005, n° 04-45.463 et n°03-42.018) et par analogie à toute modification des conditions de travail (Cass. soc. 15 décembre 2006, n°05-42.133).

Dans ce cas, le salarié doit démontrer que la décision de modification ne répond pas aux intérêts de l'entreprise ou a été prise de mauvaise foi par l'employeur.

En effet, en vertu de l'article 2274 du Code civil : « la bonne foi est toujours présumée, et c'est à celui qui allègue la mauvaise foi de la prouver ».

- lors de la demande par le salarié de requalification de sa prise d'acte en un licenciement sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 19 décembre 2007, n°06-44.754).

Il appartient alors au salarié de démontrer l'existence des manquements imputés à son employeur à l'appui de sa prise d'acte ainsi que leur gravité.

Cette règle reste conforme au droit commun imposant au demandeur à l'action de rapporter la preuve de ses allégations (article 1315 du Code civil).

Elle contrevient toutefois au principe du partage de la charge de la preuve mis en place par la loi du 13 juillet 1973 (loi n°73-680, 13 juillet 1973 : JO 18 juillet 1973, p. 7763) et repris par la jurisprudence notamment dans le cas de la preuve de la cause réelle et sérieuse du licenciement qui « n'incombe pas spécialement à aucune des parties » (Cass. soc. 17 mars 1993, n°91-41.882).

B) La charge de la preuve est partagée entre employeur et salarié en matière de :

- Discrimination, « le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 (...).

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination » (L. 1134-1 du Code du travail)

- D'inégalités professionnelles ou de rémunération hommes-femmes, « le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination, directe ou indirecte, fondée sur le sexe, la situation de famille ou la grossesse. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. » (L. 1144-1 et L. 3221-8 du Code du travail)

-De harcèlement : « le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement » (L.1154-1 du Code du travail).

Il ne s'agit donc pas d'un renversement de la charge de la preuve mais simplement d'un aménagement de celle-ci en ce que la procédure s'effectuera en deux étapes successives commençant par l'exposé des éléments du salarié demandeur à l'action.

- De litiges relatifs à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies :

« l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable » (L. 3171-4 du Code du travail).

Toutefois, la jurisprudence précisait que « le salarié doit fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande » (Cass. soc. 25 février 2004, n°01-45.441).

- Le salarié demandeur à l'action devra donc rapporter dans un premier temps ses éléments de preuve ; à charge pour l'employeur d'apporter les siens en réponse. Ici aussi, le processus probatoire est partagé en deux étapes successives.

II) Sur les moyens de preuve du salarié et de l'employeur

Le salarié est libre de « produire en justice des documents dont il a eu connaissance à l'occasion de ses fonctions », lorsqu'elle est « strictement nécessaire à l'exercice des droits de sa défense dans le litige l'opposant à son employeur » (Cass. soc. 30 juin 2004, n°02-41.720).

Toutefois, la jurisprudence encadre et contrôle l'origine et l'objet des éléments produits ainsi que leur contenu.

A) Le salarié communique uniquement les documents qu'il a pu recueillir à l'occasion de l'exercice normal de ses fonctions (Cass. soc. 30 juin 2004, n°02-41.720).

- La doctrine parle ici de « jurisprudence discriminante » en ce que les modes de preuves dépendent alors de la fonction des salariés qui pourront produire des éléments plus ou moins pertinents selon leur place au sein de l'entreprise (F. DUQUESNE, Nouvelle avancée des droits de la défense du salarié menacé de licenciement : Dr. Soc. 2004, p 938).

- Le salarié ne peut communiquer les documents de l'entreprise que dans le but d'assurer sa défense devant le Conseil de prud'hommes.

- Dans le cadre de son contrôle, la Cour de cassation analyse la chronologie des faits et admet tout élément recueilli par le salarié alors qu'un conflit avec son employeur était susceptible de se présenter devant le Conseil de prud'hommes (Cass. crim. 3 octobre 2006, n°05-86.718) ou lorsque le salarié avait connaissance de l'imminence de son licenciement (Cass. crim.16 juin 2011, n°10-85.079) au moment de la soustraction des documents.

C) Les documents produits par le salarié doivent concourir à la résolution du litige prud'homal.

Sur ce point, la doctrine soulève la problématique selon laquelle il est difficile de reconnaitre la compétence du juge répressif en matière d'utilité de la preuve prud'homale.

Ainsi, le contrôle du juge pénal se limite à la constatation d'une relation directe entre les pièces et les droits revendiqués par le salarié. A défaut de constat réalisable par le juge répressif, il peut se déclarer incompétent (Cass. crim. 23 février 2011, n°10-82.679).

Le salarié doit donc rester prudent lorsqu'il s'empare de documents de l'entreprise en ce qu'il peut aisément les soustraire de bonne foi, pensant qu'ils lui seront utiles alors qu'ils s'avèreront inutiles dans le cadre du procès prud'homal.

De même, le salarié doit être particulièrement vigilant lorsqu'il soustrait des documents couverts par le secret professionnel ou susceptible d'engendrer la violation du droit au respect de la vie privée de ses collègues.

( cf. pour des fiches de paye recueillies en violation de la vie privée, Cass. crim. 1er février 2011, n°09-67.959 )

Dans ces cas, les documents recueillis doivent être « strictement nécessaires » à la défense du salarié, « les seuls à justifier » ses allégations (Cass. crim. 5 juillet 2011, n°09-42.959).

Attention , si le salarié contrevient à l'une de ces règles, il s'expose à une condamnation pour vol ou abus de confiance (Cass. crim. 9 juin 2009, n°08-86.843).

D) Les modes de preuve admis pour l'employeur

De son coté, l'employeur ne peut utiliser n'importe quel mode de preuve sous peine de voir sa sanction annulée.

AInsi s'il peut utiliser des enregistrements issus de la surveillance des locaux comme preuve, il doit en avoir informer les salariés mais egalement resteinddre son systeme de surveillance au contrôle de leur activité professionnelle.

Il est ainsi prévu que le comité d'entreprise ou les délégués du personnel soient informés et consultés préalablement à sa mise en place de tout syteme de surveillance.

La chambre sociale de la Cour de cassation a une position moins rigoureuse s'agissant de la surveillance des locaux auxquels les salariés n'ont pas accès. L'employeur est libre de surveiller les locaux où les salariés ne travaillent pas et n'est pas dans l'obligation de les informer du dispositif mis en place.

L'employeur a un pouvoir de direction, de surveillance et de contrôle des activités de ses salariés, lorsque ceux-ci utilisent à des fins personnelles e matériel informatique qu'il met à leur disposition pour un usage professionnel.

Le fait pour des salariés fautif de détourner l'usage professionnel de la messagerie électronique pour un usage privé, ne peut autoriser l'employeur à pendre connaissance des messages privés.

Dans tous les cas, si le contenu du mail reste privé, il n'exclura pas la possibilité de retenir une sanction fondée sur le motif légitime d'un licenciement pour faute grave.

A contrario tout ce qui aura le caractère professionnel autorisera l'employeur à consulter librement les messages concernés.

Dès lors que le salarié a utilisé l'outil informatique mis à disposition par l'employeur pour les besoins de son travail et n'a pas expressément identifié les courriels comme personnel, les échanges électroniques sont donc considérés comme ayant un caractère professionnel. Cass. Soc., 10 janvier 2012, n°10-23483

Il faut néanmoins préciser que si l'employeur peut consulter les courriels qui ne sont pas identifier expressément comme personnels, il ne peut es utiliser pour sanctionner le salarié s'il s'avère relever de sa vie privée .

La Cour de cassation a cependant décidé qu'un courriel émanant d'un salarié ne peut être utilisé pour prouver sa faute que s'il a été recueilli dans des circonstances garantissant son authenticité et permettant l'identification de son auteur.

Ainsi, tout est question des circonstances de fait entourant l'interception de l'email du salarié.

Maitre JALAIN

Avocat en droit du travail

En savoir plus : www.avocat-jalain.fr

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1 Publié par Visiteur
07/12/2015 12:37

Bonjour,

voilà la situation : un matin, à mon travail, je me suis fait injurié, menacé ... par une de mes collègue devenu hystérique. Celle-ci ne s'arrêtant pas et en l'absence de responsable, j'ai déclenché un enregistreur afin de me protéger. Oubliant celui- ci, il semble qu'il soit rester à enregistrer quelques heures. Tout ce qui a eu lieu dans le bureau à donc été capter par cet enregistrement, enregistrement où l'on entend donc la conversation qu'il y a eu entre mon responsable, une de ses collègue , ma collègue hystérique et moi- même (une 5 ème personne alors présente n'a pas parlé apparemment) . Cet enregistrement ne s'est pas arrêté à ce moment, et on voit bien qu'il a été "oublié".
j'aimerai savoir si cette conversation peut être utilisé dans un procès prud'homal à titre de preuve (loyauté) car mon employeur prétend des choses qui sont en contradictions avec ce qui s'est réellement passé ?

Cordialement,

2 Publié par Visiteur
07/04/2017 19:11

les menaces d'un membres du CHSCT enregistré lors d'une conversation téléphonique après que ce dernier m'est laisser deux messages vocaux avec insultes menaces...et la phrase je sais que tu enregistre tout fait en se que tu veux..
question l'enregistrement est t'il recevable ?

3 Publié par Visiteur
22/06/2017 18:27

Mon ancienne nounou me reclame des salaires soit disant impayés et les somme marquer ne correspond absolument pas au fiche de paie et de mon coté j'ai la preuve de virements et un papier qu'elle a signer comme quoi elle a toucher une somme total en virements et espèce malgré sa elle vx me mettre au prudhomme...pensez vous qu'elle a une chance de gagner ou perdre?? Dois je répondre a son courrier..

4 Publié par Visiteur
15/03/2018 15:26

Mon CDD d'un an arrive à son terme le 31 mars 2018. J'ai pris mes 5 semaines de congés payés de façon effective et les congés non acquis m'ont été déduit financièrement. Le 8 mars le chef d'entreprise me dit de prendre des congés payés à partir du 16 mars car il ne souhaite pas me payer d'indemnités de congés payés. Je refuse et j'envoie un courrier recommandé le 10 mars. Le chef d'entreprise refuse le recommandé et m'envoie un texto pour me dire de ne plus revenir dans l'entreprise et qu'il m'a renvoyé les effets personnels qui étaient dans mon casier par colissimo. Colissimo envoyé le 12 mars, texto reçu le 13 mars. Le 14 mars je me rends à mon travail mais le chef d'entreprise refuse de m'ouvrir. Une collègue m'envoie un message pour me dire qu'elle a tenté de m'ouvrir la porte mais que le chef d'entreprise lui a interdit. Il faut donc que je puisse prouver que je me suis rendue sur mon lieu de travail mais que le chef d'entreprise refuse de m'ouvrir, comment faire pour éviter au maximum les frais d'huissier ? Est-ce qu'au pire des cas, si je ne peux pas faire autrement, ça me reviendra moins cher de faire authentifier le texto de ma collègue ou alors de faire constater par l'huissier que ma chef refuse d'ouvrir la porte ? Demain je vais faire du forcing, est--ce qu'un enregistrement audio peut servir de preuve ?

5 Publié par Visiteur
19/11/2018 21:50

Bonjour, je travail 24h/24 et je suis payer pour un 35h/semaine... Je suis fatigué et n'arrive pas a trouver la force. Je suis en heure d'astreintes tout les jour après mes heure normal... En échange mon employeur me dit qu'il me met à disposition un logement de fonction... Mais il n'y a pas de fenêtre directe extérieur et il y a de la moisissure partout. Es qu'il est possible de quitter mon travail par prise d'acte et es que c'est une raison valable pour partir... J'ai déjà discuter avec mon employeur et ma répondu par texto es que c'est une preuve valable... Merci d'avance

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Maître JALAIN, avocat à Bordeaux,  met à votre service depuis plus de 10 ans ses competences en droit du travail et droit commercial et  vous assiste dans le cadre de vos problématiques tant au niveau du conseil, de la négociation que dans le cadre de contentieux devant les Tribunaux.

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