Patrick est candidat a un nouvel emploi dans une entreprise, chargée d’assurer la sécurité des aéroports ; ayant passé avec succès différents entretiens d’embauche, il se voit finalement refuser le poste convoité, du fait de son casier judiciaire qui comporte la trace d’une ancienne condamnation, incompatible avec l’emploi envisagé.
Dépité, il se demande quoi faire, afin d’éviter que la situation se reproduise à l’avenir.
Maître Matthieu Gallet, avocat au Barreau de Paris, est avec nous.
- Alors Maître, première question, pouvez-vous nous rappeler ce qu’est exactement le casier judiciaire et les informations qu’il recense ?
Le casier judiciaire est un fichier informatisé qui retrace la « vie pénale » d’une personne en gardant la trace de toutes les condamnations qui ont été prononcées à son encontre.
Il peut s’agir de condamnations prononcées par les juridictions pénales, de certaines condamnations prononcées par les juridictions commerciales, ou encore certaines décisions en matière civile, administrative ou disciplinaire.
Les informations contenues sont alors restituées sous la forme de trois bulletins, le numéro 1, le 2 et le 3.
- Justement, pouvez-vous nous dire quels sont ces différents bulletins et ce qui justifie cette distinction ?
Il existe une double distinction, car le contenu du bulletin est différent en fonction de la qualité des personnes auxquelles il est accessible.
- le bulletin n°1 comprend l’ensemble des condamnations et décisions prononcées à l’encontre de la personne concernée. Ce bulletin n’est destiné qu’aux juges et aux greffes.
- le bulletin n°2, est quant à lui une version allégée du casier judiciaire, où ne figurent qu’un nombre limité de décisions. N’y seront pas mentionnées par exemple les condamnations à l’encontre des mineurs, ou encore les contraventions ou les condamnations avec sursis quand le délai d’épreuve à expiré.
Ce bulletin ne peut être demandé que par certains employeurs, particulièrement en cas d’accès à un emploi public. C’est donc ce bulletin auquel l’employeur de patrick a eu accès.
Enfin, le bulletin n°3 est encore plus allégé que le précédent, et ne comporte que les condamnations pour un crime ou un délit à un emprisonnement de plus de 2 ans sans sursis. Ce bulletin ne peut quant à lui être demandé que par l’intéressé lui-même.
- Mais alors, cette mention pour le moins gênante va-t-elle figurer à vie dans le casier de Patrick ?
Heureusement non Karine.
L’inscription d’une infraction au casier judiciaire est susceptible d’être effacée du bulletin numéro 2 et numéro 3, soit par l’effet de ce que l’on appelle la réhabilitation légale ou judiciaire, soit par le biais d’une requête en effacement du bulletin numéro 2.
- En quoi consiste exactement cette réhabilitation légale ?
La réhabilitation légale est acquise à toute personne à compter de l’expiration d’un certain délai, et dépend de la nature de la peine.
Il s’agit en effet d’un effacement qui intervient automatiquement et qui ne nécessite donc aucune démarche de la part de Patrick.
Cependant, c’est aussi la procédure la plus longue.
Pour résumer, selon l’infraction commise par Patrick, il devra attendre un temps plus ou moins important, pour que sa condamnation disparaisse de son bulletin numéro 2, c'est-à-dire 3, 5 ou 10 ans.
Mais attention, toute nouvelle condamnation intervenant dans ce délai retarde la cet effacement, voire l’en empêche !
- Et qu’en est-il de la réhabilitation judiciaire ?
La réhabilitation judiciaire peut-être sollicitée par toute personne souhaitant anticiper les délais évoqués, sous réserve du respect d’un certain nombre de conditions.
Néanmoins, la demande ne pourra être adressée qu’à compter d’un délai de 5 ans pour les crimes, 3 ans pour les délits, et un an pour les contraventions.
Qu’elle soit légale ou judiciaire, la réhabilitation efface toute les incapacités et les déchéances résultant de la condamnation.
- Et si patrick considère que ces délais sont encore trop longs, dispose-t-il d’un recours ?
Patrick peut aussi avoir une démarche active en vue de l’effacement de son casier judiciaire.
Il est en effet possible d’obtenir l’effacement du bulletin n°2 en justice, grâce à une requête en désinscription du casier judiciaire. Il s’agit d’une requête spéciale, destinée au Procureur de la république, et qui ne peut intervenir que 6 mois après le prononcé de la dernière condamnation.
Pour ce faire, je conseille à Patrick de s’adjoindre les services d’un avocat pénaliste ; en effet, l’effacement du casier judiciaire n’est pas automatique.
L’Avocat devra démontrer le caractère disproportionné du maintien de l’inscription de la condamnation sur le casier judiciaire et son impact sur la vie de l’intéressé.
Cette requête donnera d’ailleurs lieu à une audience en Chambre du Conseil à huis clos, à l’occasion de laquelle l’Avocat devra déployer toute son éloquence, pour convaincre les Juges, d’accéder à la demande d’effacement.
- Patrick aurait-il pu éviter l’inscription de cette condamnation lorsqu’il a été jugé ?
Tout à fait. Patrick aurait pu, au moment de l’audience pénale ayant donné lieu au jugement, demander au juge une dispense d’inscription de sa condamnation au B2, en communiquant des justificatifs probants.
La décision de porter ou non mention de la condamnation revient alors au juge.
En résumé, s’il avait été bien conseillé et défendu, Patrick serait probablement en train de regarder les avions décoller à l’heure où nous répondons à sa question.