Pierre, comptable pour une chaîne de restaurant, reçoit la convocation d’un commissariat à son domicile.
Sur place, l’Officier de Police Judiciaire lui notifie son placement en garde à vue immédiat.
La maman de Pierre, informée du placement de son fils en garde à vue et particulièrement choquée, souhaiterait avoir plus de précisions sur cette mesure privative de liberté.
Maître Matthieu GALLET, Avocat au Barreau de Paris, est avec nous.
- Avant toute chose Maître GALLET, pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste une garde à vue ?
La garde à vue est une mesure privative de liberté qui permet à un Officier de Police Judiciaire de garder au poste de police, pour les besoin d’une enquête et pour l’interroger, une personne suspectée d’avoir commis ou tenté de commettre une infraction.
- Alors, si je comprends bien, toute personne suspectée d’avoir commis ou tenté de commettre une infraction peut être placée en garde à vue ?
Pas exactement Karine.
Pour qu’une personne soit placée en garde à vue, il faut qu’il existe à l’encontre de cette personne, une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis de tenter ou commettre un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement.
Par conséquent, aucune garde à vue n’est possible lorsqu’une personne est simplement poursuivie pour une simple contravention ou pour un délit pour lequel une peine d’emprisonnement n’est pas encourue.
- D’accord, et qu’en est-il de la durée de cette garde à vue ?
La durée de principe de la garde à vue est de 24 heures.
Celle-ci démarre au moment où la personne est privée de sa liberté d’aller et venir.
Toutefois, ce délai peut être prolongé, avant son expiration, avec l’autorisation du procureur de la république.
- Et, quelles peuvent être ces prolongations ?
La garde à vue peut être prolongée :
-Soit de 24 heures sur autorisation du procureur ou du juge d’instruction, la durée étant alors portée à 48 heures ;
- Soit de 48 heures pour les affaires de stupéfiants, de délinquance organisée et de terrorisme, la durée étant alors portée à 96 heures ;
- Soit de 96 heures pour les besoins d’une enquête relative au terrorisme lorsqu’il existe un risque actuel d’actes de terrorisme ; dans ce cas la durée de la garde à vue est portée à 6 jours ;
- Et alors, que se passe –t-il a l’issue de ces délais ?
Au terme de ce délai, la personne est obligatoirement :
- Soit remis en liberté,
- Soit présenté à un Juge qui décidera des suites à donner aux poursuites ;
En tout état de cause, que la maman de Pierre se rassure, de nombreuses garanties sont offertes à la personne gardée à vue.
Sur ce point Maître GALLET, pouvez-vous nous en dire davantage ? Quelles sont les garanties offertes à une personne placée en garde à vue ?
Alors Karine, il est important de préciser avant toute chose que la personne placée en garde à vue est immédiatement informée dans une langue qu’elle comprend:
- De la nature de l’infraction faisant l’objet de l’enquête ;
- De la durée de la garde à vue ;
- Mais également et surtout de la notification de ses droits ;
- Alors justement, pouvez-vous nous préciser quels sont ces droits ?
Tout d’abord, Pierre a le droit de faire prévenir, par téléphone, la personne avec laquelle il vit habituellement, l’un de ses parents en ligne directe, l’un de ses frères et sœurs, son employeur, son curateur et son tuteur.
Ensuite, Pierre a le droit de se faire examiner à tout moment par un médecin désigné par le procureur ; si la personne gardée à vue ne demande pas cet examen, l’un des membres de sa famille peut le faire, et il est obligatoirement fait droit à cette requête.
Par ailleurs, et depuis la condamnation de la France par la Cour Européenne des droits de l’homme, étant à l’origine de la réforme de la garde à vue du 14 Avril 2011, la personne gardée à vue a le droit de se taire face aux questions qui lui sont posées, sauf en ce qui concerne l’obligation de décliner son identité aux Officiers de Police Judiciaire.
Enfin, et dès le début de la garde à vue, et en cas en prolongation, au début de celle-ci, l’Avocat peut s’entretenir 30 minutes avec le gardé à vue.
- A ce sujet, quelle est réellement la place de l’Avocat en garde en vue ?
Depuis la loi du 14 Avril 2011, l’Avocat dispose d’un rôle beaucoup accru dans le cadre de la garde à vue.
En effet, avant cette loi, la présence de l’Avocat dans le cadre de la procédure de garde à vue s’assimilait à une simple visite de courtoisie.
L’Avocat peut désormais s’entretenir pendant 30 minutes avec le gardé à vue. En outre,
celui-ci peut consulter les procès-verbaux de notification du placement en garde à vue et des droits y étant attachés, le certificat médical d’aptitude au maintien en garde à vue et le
procès-verbal d’audition de la personne qu’il assiste.
L’Avocat peut également assister à tous les interrogatoires, auditions et confrontations de la personne qu’il assiste. L’Avocat peut également poser des questions à l’issue de chaque audition ou confrontation ou présenter des observations écrites.
L’Avocat aura aussi, et surtout, pour rôle de s’assurer que les droits du gardé à vue ont été correctement respectés.
- D’ailleurs, sur ce point, que se passe-t-il en cas d’atteinte aux droits du gardé à vue ?
Si une irrégularité survient dans la mise en œuvre de la garde à vue, comme par exemple un retard dans la notification des droits ou encore la non-réalisation de l’examen médical demandé, celle-ci porte nécessairement atteinte aux intérêts de la personne concernée et la nullité de la procédure pourra automatiquement être prononcée.
Sur ce point, l’Avocat de Pierre n’aura aucune difficulté à obtenir l’annulation de la procédure de garde à vue.