L’émergence d’un conflit entre associés est une situation malheureusement courante dans le monde des affaires. Lorsque mal anticipée, une telle situation peut engendrer une crise au sein de la société pouvant mener jusqu’à sa dissolution.
La prévention reste de mise, par la définition, dans le cadre des statuts ou d’un pacte d’associés des relations entre ces derniers et des conditions de vie sociale.
Le cas échéant, il est nécessaire de connaître quelles solutions adopter lorsque les associés atteignent une situation de mésentente sur la conduite de la vie sociale.
I- La prévention du conflit entre associés
La prévention des conflits entre associés est d’importance majeure. Il est ainsi nécessaire de :
- organiser le fonctionnement de la société dans des conditions permettant la prévention des conflit, notamment par la définition des pouvoirs, obligations, et droits des différents organes sociaux ;
- anticiper la survenance des conflits et apporter des solutions efficaces et bénéfiques au bon fonctionnement de l’entreprise (il est notamment intéressant de réfléchir à l’utilisation de modes alternatifs de résolution des différends).
1- Définition des pouvoirs, obligations et droits des organes sociaux pour prévenir les conflits entre associés
Lors de la constitution de la société, les associés doivent s’atteler à définir leur rôle et les conditions de leur participation dans la vie sociale, ainsi que celles de fonctionnement des organes de direction :
- participation dans le capital et son éventuelle évolution
- apports financier, en nature ou en industrie et leurs conditions
- clauses de péremption, d’agrément, d’inaliénabilité, de sortie conjointe, etc
- les conditions de gestion de la société et de prise de décision (coordination notamment des différents organes de direction)
- obligations d’information périodique des associés et conditions précises de pris de décisions en assemblée générale
- causes de révocation des mandats sociaux (révocation à tout moment sans motif ou révocation pour juste motif).
2- Anticiper la survenance des conflits entre associés
L’anticipation de la survenance des conflits entre associés peut passer par une prise de décision sur les solutions en amont ainsi que la définition de modes alternatifs de règlement des différends permettant d’éviter le coût et la lenteur des procédures judiciaires.
Les statuts de la société ou le pacte d’associés, peuvent ainsi prévoir une clause de médiation ou de conciliation.
La procédure participative ou le droit collaboratif peuvent également être utilisés avant toute action en justice pour trouver un accord entre les parties qui vise à permettre une satisfaction mutuelle.
Des solutions contractuelles peuvent être prévues dans les statuts de la société ou dans le cadre d’un pacte d’associés, telles que la clause d’exclusion permettant, dans des conditions strictement définies, d’exclure un associé, ou la clause de rachat forcé d’actions.
II- Les conflits entre associés dans un cadre judiciaire
En cas d’échec des tentatives de règlement amiable ou en l’absence de solutions adaptées de prévention des conflits entre associés, ces derniers disposent d’un certain nombre d’outils judiciaires permettant de mettre fin à tout abus subis dans le cadre de la société.
1- La désignation d’un mandataire ad hoc ou d’un administrateur judiciaire
il est possible de désigner amiablement ou judiciairement un mandataire ad-hoc, qui comme son nom l’indique reçoit une mission expressément limitée à des actes précis que les personnes habilitées à les effectuer soit refusent d’effectuer soit sont dans l’impossibilité de les mettre en œuvre (disparition du dirigeant d’une société, absence de convocation de l’assemblée générale, etc). Le rôle précis du mandataire ad hoc est défini par le tribunal.
Lorsque le fonctionnement de la société est paralysé, la désignation d’un administrateur judiciaire pourra également être demandée.
2- Les actions en abus de majorité ou de minorité
Chaque associé ou actionnaire est en principe libre de voter comme il l’entend. Cependant, son droit ne doit pas pour autant être exercé de manière abusive.
Lorsqu’un associé majoritaire impose une décision ou lorsqu’un associé minoritaire bloque la prise d’une décision en assemblée générale, les autres associés pourront agir en abus de majorité ou de minorité.
L’associé doit avoir a agi contrairement aux intérêts de la société et dans l’unique but de favoriser ses propres intérêts.
La décision en question sera ainsi frappée de nullité et l’associé s’expose au paiement de dommages et intérêts.
3- La révocation du dirigeant pour juste motif
Un associé cumulant un mandat social peut être révoqué pour juste motif, lorsque son comportement est de nature à compromettre le fonctionnement de la société. Il n’en perd pas pour autant sa qualité d’associé.
4- La dissolution de la société pour mésentente des associés
Un conflit entre les associé entraînant la paralysie du fonctionnement de la société peut justifier sa dissolution pour mésentente conformément à l’article 1844-7, 5° du Code civil : « La société prend fin […] par la dissolution anticipée prononcée par le tribunal à la demande d’un associé pour justes motifs, notamment en cas d’inexécution de ses obligations par un associé, ou de mésentente entre associés paralysant le fonctionnement de la société ».
La dissolution est notamment prononcée lorsque les associés sont simultanément gérants de la société et, de ce fait, en raison de leur mésentente, bloquent le fonctionnement de celle-ci.
L’impossibilité d’obtenir une majorité dans le cadre des conseils d’administration ou de surveillance en raison de la mésentente entre les associés peut également constituer une cause de dissolution.
Les juges du fond disposent d’un pouvoir souverain d’appréciation sur les faits constituant une mésentente paralysant le fonctionnement de la société.
L’associé à l’origine de la mésentente ne peut pas demander la dissolution de la société. Ce dernier peut être condamné au paiement de dommages-intérêts pour le préjudice subi.