A l’approche des fêtes de fin d’années, et pendant la Coupe du Monde de football, la Sécurité Routière a lancé une campagne de sensibilisation des risques de l’alcool au volant : « Quand on tient à quelqu’un, on le retient ».
Dans ce contexte de risque de consommation excessive, nous dressons un bilan de la répression de l’alcool au volant née de notre pratique et des solutions que l’on peut apporter dans le cadre de la défense pénale du conducteur alcoolisé grâce notamment à un nouvel outil l’éthylotest anti démarrage « EAD ».
I - Petit rappel sur les règles applicables : les 3 taux à retenir
Le site du gouvernement rappel que :
« Chaque verre consommé fait monter le taux d’alcool de 0,20 g à 0,25 g en moyenne. Ce taux peut augmenter en fonction de l’état de santé, le degré de fatigue ou de stress, mais aussi le tabagisme ou simplement les caractéristiques physiques de la personne : pour les plus minces, chaque verre peut représenter un taux d’alcool de 0,30 g ».
Le risque de se retrouver au volant avec dans le corps un taux d’alcool illégal est important (deux verres quelques soit l’alcool et vous basculez dans l’interdit) ….
Il convient de retenir les taux légaux :
- Taux égal ou supérieur à 0,2 g/l dans le sang (soit 0,10 mg/l’air expiré) Sont concernés : les conducteurs titulaires d'un permis probatoire, les élèves conducteurs, les conducteurs de véhicules de transport en commun et les conducteurs soumis à l'EAD.
- Taux compris entre 0,5 g/l dans le sang (soit 0,25 mg/l’air expire) et 0,8 /l par litre de sang et 0,40 mg/l air expiré il s’agit d’une contravention de 4eme classe
- Taux égal ou supérieur 0, 8 mg/l dans le sang (soit 0,40 mg/l air expiré) : il s’agit d’un délit
L’alcoolémie est extrêmement dangereuse au volant.
C’est donc le délit le plus sévèrement réprimé sur la route. Il peut également être associé à de la consommation de stupéfiants et dans ce cas, les sanctions sont encore plus sévères, (passibles de trois ans d’emprisonnement, 9 000 € d’amende et d’un retrait de six points ou d’une annulation du permis, stage et confiscation du véhicule).
Le dépistage est pratiqué de façon obligatoire, facultative et préventive par les forces de police. Depuis la loi de programmation du 23 mars 2019 les APJ ont en la matière pratiquement les mêmes compétences que les OPJ.
Il est obligatoire, lorsqu’il y a un accident ou lorsqu’une infraction au Code de la route est punie d’une peine complémentaire de suspension du permis de conduire, même en dehors d’un état d’ivresse manifeste, autrement dit, dans le cadre des infractions les plus graves.
Il peut être facultatif lorsqu’un véhicule est impliqué dans un accident mais qu’il n’a pas occasionné de dommage ou en cas d’infraction connexe aperçue par les forces de police.
Il peut également intervenir hors accident et hors infraction. Le dépistage est pratiqué de manière aléatoire en dehors de toutes circonstances. Les forces de police ont la possibilité de placer un véhicule au bord de la circulation et de faire ce qu’on appelle un dépistage, c’est-à-dire plus communément appelé souffler dans le ballon. L’alcoolémie par dépistage entraîne la mise en place ensuite d’une vérification d’alcoolémie par éthylomètre ou par une analyse sanguine.
C’est dans ce contexte que le législateur a favorisé la mise en place des éthylotests antidémarrages EAD, c’est-à-dire une volonté de responsabiliser le conducteur : lorsque vous avez consommé de l’alcool et que vous êtes en train de démarrer votre véhicule, vous pouvez tester vous-même et prendre la mesure de votre alcoolémie.
L’éthylotest antidémarrage vous permet de ne pas pouvoir redémarrer le véhicule si lorsque, au deuxième souffle, votre taux d’alcool dépasse la limite fixée et que vous avez vous-même enregistré en fonction de votre qualité : jeune conducteur ou non.
II / Dans quel cas doit-on installer l’éthylotest antidémarrage ?
- Dans le cadre de la suspension provisoire préfectorale ( arrêté 1f ou 3f)
L’éthylotest antidémarrage peut être installé comme une alternative à la suspension du permis de conduire par le préfet.
Avant votre jugement sous forme de procès ou de CRPC ou encore d’ordonnance pénale, vous allez être interdit de conduire immédiatement après une rétention par les forces de l’ordre de votre permis retenue au commissariat ou à la préfecture pendant 120 Heures , ensuite le Préfet vous notifiera un avis de suspension provisoire , sous la forme d’arrêté obligatoire et immédiat dit suspension 3F ou dans les mois qui suivent ( rare) dit arrêté de suspension 1F dont les effets courent à compter de la notification.
Le préfet décide soit d’une durée de suspension : interdiction de conduire pure et simple, soit de la pose d’EAD pendant une certaine durée, depuis le 22 mai 2020, la durée au cours de laquelle le préfet peut imposer la mise en place d’un EAD sur le véhicule a été allongée à un an. Donc, dans l’attente d’un jugement, le recours à l’EAD sur décision du préfet constitue une alternative très utile à la suspension de permis.
- Attention :
En l’absence de suspension dans les 120 heures et jusqu’à la notification en LRAR de l’avis du préfet vous retrouvez le droit de conduire, il peut être prolongé de 15 jours si vous n’allez pas chercher votre recommandé…Si par chance (très rare) le Préfet ne prend pas d’avis de suspension, même si physiquement votre titre de conduite est au commissariat vous pouvez reconduire jusqu’à la comparution au Tribunal ou ordonnance pénale
ð Ce que l’on vous propose : le recours gracieux immédiat
Nous contestons l’avis suspension provisoire du préfet en demandant par un recours gracieux une mesure alternative permettant de conduire à savoir la pose d’un EAD.
Le préfet, très souvent, l’accepte car en contrepartie, cette mesure permet de sauver l’emploi du conducteur. Le dispositif est étendu à tout le territoire depuis le 9 janvier 2018 et c’est effectivement une mesure concrète, très utile et qui permet de pallier à l’interdiction de conduire qui peut entraîner pour les professionnels de la route une perte d’emploi avant jugement
- Attention :
Problème pratique l’articulation des sanctions : est-ce que la durée de la mesure imposant un EAD dans le cadre d’une suspension administrative va être défalquée sur la durée fixée par la Tribunal (ex : les 6 mois déjà exécutés en suspension provisoire viennent ils se substituer à la sanction de l’ordonnance pénale qui mettrait 6 mois en sanction judicaire est-ce que l’on a déjà exécuté la suspension ou on repart sur 6 mois ?)
La solution a été donnée sur une Réponse à une question parlementaire du 18 janvier 2022 : fixant la combinaison des sanctions suivantes :
- EAD préfectorale puis le juge prononce une EAD judiciaire = déduction des mois déjà effectués
- EAD préfectorale puis une suspension simple pas de déduction des mois déjà effectués (on peut donc faire 6 mois avec un EAD et reprendre 6 mois en suspension simple…)
þ Ce que l’on propose : Nous vous invitons à faire opposition aux ordonnances pénales et à refuser les CRPC pour éviter le piège des doubles durée de suspension!
- L’EAD sur proposition de la commission médicale préfectorale
À l’issue de la suspension provisoire du préfet, vous avez l’obligation de passer une visite médicale et c’est dans le cadre de cette visite médicale que l’EAD peut également être prescrit.
Il peut vous être accordé le droit de reconduire par la Commission médicale de la Préfecture sous réserve de poser également un EAD homologué dans votre véhicule et d’effectuer un suivi médico-psychologique dans une consultation d’addictologie.
- þ Attention : attention au rdv de commission médicale des délais de visite sont très longs il faut les prendre bien à l’avance pour pourvoir reconduire dans les délais
- La pose de l’EAD à titre de sanction du juge
L’EAD peut être décidé par le Juge dans le cadre d’une mesure de peine complémentaire. A ce moment-là, il fixe une durée. ( cf : Article L234-2 du CR : EAD proposé sans récidive à titre de peine complémentaire)
Le Tribunal, au moment où le prévenu lui sera présenté, pourra décider de prolonger l’obligation qui avait été fixée par le préfet pour une durée pouvant aller jusqu’à cinq ans.
Selon le nouvel article L234-13 en cas de récidive la pose de l’EAD est obligatoire, donc, un récidiviste ne pourra pas reprendre le volant sur son véhicule s’il n’équipe pas son véhicule d’un éthylotest antidémarrage. Néanmoins, il n’aura pas de délai imposé pour repasser son permis annulé de plein droit, c’est une loi pénale favorable
La pose de l’EAD est à la charge du contrevenant tout naturellement et elle peut être également appréciée dans le cadre de l’évaluation de l’amende puisque ça entraîne des frais pour le conducteur qu’il convient d’énoncer au Tribunal dans le cadre de la défense. Le Tribunal pourra donc choisir de moduler l’amende encourue jusqu’à un maximum de 4 500 €.
- ð À retenir :
Pour les avocats praticiens de la défense pénale de l’alcool au volant, il existe des moments d’intervention clés dans la procédure et des pratiques extrêmement efficaces.
Le recours à l’EAD est une solution efficace
- Nous pouvons plaider le recours à l’EAD pour faire lever une suspension provisoire devant le Préfet dans le recours hiérarchique
- Nous pouvons plaider le recours à l’EAD pour minorer une amende ou la durée d’une interdiction de repasser son permis ;
- Nous pouvons plaider le recours à l’EAD pour permettre à une personne de reconduire immédiatement en sortant du Tribunal quand bien même son permis serait annulé en cas de récidive notamment confirmation jurisprudence (Cass crim 24 mai 2022 n°21-86672).
C’est donc un moyen de défense très utile, outre les autres moyens de défense qu’un avocat praticien en droit du permis de conduire saura soulever ( cf partie 2 de notre dossier).Aujourd’hui, la pratique de la défense pénale de l’alcool au volant tourne essentiellement autour de recours à l’EAD qui permet de continuer de reconduire immédiatement !
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